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28/03/2014 | FRANCE | N°351768

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 28 mars 2014, 351768


Vu le pourvoi, enregistré le 9 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. A...B..., demeurant au ... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de l'ordonnance n° 0704111 du 1er juin 2011 du vice-président du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il fixe le point de départ de la revalorisation de la pension ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'enjoindre au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique d'établir, dans le délai d'un mois, un nouveau titre de pension portant revalorisatio

n de sa pension à compter du 1er janvier 1999 ;

3°) de mettre à la char...

Vu le pourvoi, enregistré le 9 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. A...B..., demeurant au ... ; M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 2 de l'ordonnance n° 0704111 du 1er juin 2011 du vice-président du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il fixe le point de départ de la revalorisation de la pension ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'enjoindre au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique d'établir, dans le délai d'un mois, un nouveau titre de pension portant revalorisation de sa pension à compter du 1er janvier 1999 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Louis Dutheillet de Lamothe, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. B...;

1. Considérant que, par une première demande enregistrée le 13 janvier 2003 au greffe du tribunal administratif de Strasbourg, M. B...a demandé l'annulation du refus de réviser sa pension à compter du 1er janvier 1999 en vue de prendre en compte la bonification mentionnée au b) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'il contestait ainsi les modalités de liquidation de la pension concédée à compter du 13 février 1995, telles qu'elles résultaient de son titre de pension ; que cette demande a été rejetée par une ordonnance du 19 février 2004 ;

2. Considérant que, par une seconde demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Strasbourg le 29 août 2007, M. B...a sollicité l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 13 février 1995 lui ayant concédé sa pension en tant qu'il ne prenait pas en compte la bonification mentionnée au b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et a demandé qu'il soit enjoint au ministre de procéder à une nouvelle liquidation ainsi qu'à la revalorisation rétroactive de cette pension, avec versement des intérêts de droit et capitalisation de ces derniers ; qu'après que le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, par une décision du 16 juin 2008, annulé une première ordonnance du président du tribunal administratif de Strasbourg du 28 septembre 2007 ayant rejeté la demande de M.B..., le vice-président de ce tribunal a rendu une seconde ordonnance, le 1er juin 2011, faisant droit, pour l'essentiel, à cette demande ;

3. Considérant que M. B...se pourvoit en cassation contre cette dernière ordonnance du 1er juin 2011 en tant qu'elle enjoint au ministre chargé du budget de revaloriser rétroactivement sa pension à compter du 1er janvier 2003 et non à compter du 1er janvier 1999, comme il le demandait ; que, par un pourvoi incident, le ministre demande l'annulation de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle fait droit aux conclusions de M. B...;

4. Considérant, en premier lieu, que l'autorité de la chose jugée d'une décision juridictionnelle s'attache au dispositif de cette décision et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire ; que M. B...soutient que la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 16 juin 2008 n'ayant pas opposé l'irrecevabilité invoquée par le ministre dans son pourvoi incident, l'autorité de chose jugée qui s'attache à cette décision s'opposerait à ce que ce moyen soit accueilli dans la présente instance ;

5. Considérant, toutefois, que, si, par la décision du 16 juin 2008 annulant l'ordonnance du 28 septembre 2008, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a implicitement jugé recevable le pourvoi que M. B...avait formé contre cette ordonnance, cette décision n'a pas statué sur la recevabilité de la demande présentée par M. B...au tribunal administratif de Strasbourg mais a renvoyé, après avoir censuré une erreur de droit portant sur l'étendue de la chose jugée par la précédente ordonnance du 19 février 2004, le jugement de cette demande au tribunal administratif de Strasbourg ; que, par suite, la circonstance que le vice-président du président du tribunal administratif de Strasbourg ait, par l'ordonnance attaquée, implicitement jugé recevable la demande de M.B..., qu'il a, pour l'essentiel, accueillie, peut être contestée devant le juge de cassation ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la question de la recevabilité d'une demande introduite devant le juge administratif est d'ordre public ; qu'ainsi, la circonstance que le ministre n'ait pas soutenu devant le juge du fond que la demande de M. B...était tardive et que l'ordonnance attaquée n'ait pas relevé une telle tardiveté ne fait pas obstacle à ce que cette question soit examinée devant le juge de cassation ;

7. Considérant, en dernier lieu, que si le requérant soutient que l'accueil du moyen du ministre porterait atteinte à son droit à un procès équitable dans la mesure où la durée de la présente procédure conduirait à lui faire application des règles nouvelles dégagées, en cours d'instance, par le Conseil d'Etat statuant au contentieux dans sa décision n° 340353 du 22 février 2012, cette circonstance n'est pas de nature, à elle seule, à faire obstacle à l'application de règles de procédure qui, au demeurant, découlent des textes en vigueur à la date de la décision attaquée, tels que les a interprétés le juge administratif au regard des principes généraux qui gouvernent la procédure contentieuse administrative ;

8. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 421-1 et R. 421-5 du code de justice administrative, que, si un recours tendant à l'annulation d'une décision concédant une pension en application du code des pensions civiles et militaires de retraite doit être introduit dans le délai de deux mois à compter de sa notification, ce délai n'est pas opposable si la notification de la décision ne contenait pas la mention des voies et délais de recours ; que, toutefois, la formation d'un recours juridictionnel tendant à l'annulation du titre de pension ou à la révision de cette pension établit que l'auteur de ce recours a eu connaissance de la liquidation de sa pension au plus tard à la date à laquelle il a formé ce recours ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. B...doit être est réputé avoir eu connaissance de l'arrêté du 13 février 1995 portant concession de sa pension et des voies et délais de recours contre cet arrêté au plus tard à la date du 13 janvier 2003, à laquelle il a formé devant le tribunal administratif de Strasbourg une demande en révision de sa pension ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté, enregistrées le 29 août 2007 au greffe du même tribunal, ont été formées après l'expiration du délai de recours de deux mois, sans qu'y fasse obstacle le fait qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que cet arrêté ait été initialement notifié à l'intéressé avec mention des voies et délais de recours ; que, dès lors, le ministre est fondé à soutenir que le vice-président de ce tribunal a commis une erreur de droit en ne relevant pas d'office la tardiveté de ces conclusions, ainsi que de l'ensemble des conclusions accessoires de la demande ; qu'il suit de là que l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

10. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire " ; qu'il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 9 que la demande présentée par M. B...devant le tribunal de Strasbourg le 29 août 2007 était tardive et, par suite, irrecevable ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés par M. B...devant le juge du fond et le juge de cassation et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du vice-président du tribunal administratif de Strasbourg du 1er juin 2011 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Strasbourg et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée pour information au service des pensions de La Poste et de France Télécom.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 351768
Date de la décision : 28/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 28 mar. 2014, n° 351768
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:351768.20140328
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