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28/05/2014 | FRANCE | N°367471

France | France, Conseil d'État, 8ème / 3ème ssr, 28 mai 2014, 367471


Vu le pourvoi, enregistré le 8 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre délégué, chargé du budget ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1101242 du 8 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice, statuant sur la demande de la société SLC, l'a déchargée de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010 à raison d'un immeuble situé 24, avenue de la reine Elisabeth de Belgique à Cannes (Alpes-Maritimes) et a c

ondamné l'Etat à rembourser à la société les cotisations de taxe foncière sur l...

Vu le pourvoi, enregistré le 8 avril 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre délégué, chargé du budget ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1101242 du 8 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice, statuant sur la demande de la société SLC, l'a déchargée de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010 à raison d'un immeuble situé 24, avenue de la reine Elisabeth de Belgique à Cannes (Alpes-Maritimes) et a condamné l'Etat à rembourser à la société les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties que cette dernière a acquittées au titre des années 2005 à 2009 ;

2°) réglant l'affaire au fond, à titre principal, de rejeter la demande de la société SLC et, à titre subsidiaire, de mettre à la charge des consorts A...les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles la société SLC a été assujettie au titre des années 2005 à 2010 à raison de cet immeuble ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Maxime Boutron, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société SLC a acheté un immeuble à la famille A...le 11 février 2004 ; que le bien était grevé d'hypothèques, l'acquéreur devant engager une procédure de purge afin de rendre le prix définitif ; que le 9 novembre 2005, le vendeur a fait signifier à la société un commandement de payer le prix dans lequel il déclarait son intention de se prévaloir de cette clause résolutoire ; que, le 22 mars 2006, la famille A...a assigné la société SLC en résolution de la vente ; que cette dernière n'ayant pas exécuté son obligation de paiement du prix dans les conditions prévues par la clause résolutoire, le tribunal de grande instance de Grasse le 10 mars 2009, confirmé par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 16 mars 2010, dont l'arrêt est devenu définitif, a prononcé la résolution de la vente ; que le ministre se pourvoit en cassation contre le jugement du 8 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a déchargé la société SLC des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties mises à sa charge à raison de cet immeuble au titre des années 2005 à 2010 ;

2. Considérant qu'en vertu des articles 1380 et 1415 du code général des impôts, la taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties situées en France d'après les faits existants au 1er janvier de l'année d'imposition ; qu'aux termes du I de l'article 1400 du même code : " Sous réserve des dispositions des articles 1403 et 1404, toute propriété, bâtie ou non bâtie, doit être imposée au nom du propriétaire actuel. " ; qu'aux termes de l'article 1402 du même code : " Les mutations cadastrales consécutives aux mutations de propriété sont faites à la diligence des propriétaires intéressés. Aucune modification à la situation juridique d'un immeuble ne peut faire l'objet d'une mutation si l'acte (...) n'a pas été préalablement publié au fichier immobilier. " ; qu'enfin, aux termes du I de l'article 1404 de ce code : " Lorsque au titre d'une année une cotisation de taxe foncière a été établie au nom d'une personne autre que le redevable légal, le dégrèvement de cette cotisation est prononcé à condition que les obligations prévues à l'article 1402 aient été respectées. L'imposition du redevable légal au titre de la même année est établie au profit de l'Etat dans la limite de ce dégrèvement. " ; qu'il résulte de ces dispositions, que, lorsque, à la suite d'une mutation de propriété, une cotisation de taxe foncière a été établie au nom d'une autre personne que le redevable légal, le dégrèvement ne peut être prononcé qu'après que les propriétaires intéressés ont fait procéder à la mutation cadastrale, après publication de l'acte au fichier immobilier ;

3. Considérant que ces dispositions trouvent à s'appliquer lorsqu'une décision de justice passée en force de chose jugée a prononcé, avec effet rétroactif, l'annulation ou la résolution d'un acte portant transfert de propriété qui a lui-même fait l'objet d'une publication et d'une mutation cadastrale ; que, par suite, en jugeant que du fait du caractère rétroactif de la résolution de la vente, il n'y avait pas eu de changement de propriétaire et que la famille A...devait être regardée comme le redevable légal de la taxe foncière à raison de cet immeuble, sans qu'il y eût lieu de procéder à une mutation cadastrale, le tribunal administratif a méconnu les dispositions rappelées ci-dessus ; que le ministre est, par suite, fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 du jugement qu'il attaque ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant qu'il n'est pas contesté qu'il n'a pas été procédé à la publication requise par l'article 1402 du code général des impôts, ainsi qu'il a été dit aux points 2 et 3, pour pouvoir bénéficier du dégrèvement prévu à l'article 1404 du même code ; que si la société SLC, qui n'a effectué aucune diligence en ce sens, soutient qu'il incombait à la famille A...de procéder à une telle publicité en application du c) du 4° de l'article 28 du décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, aux motifs qu'elle était toujours demeurée propriétaire par l'effet de la résolution de la vente de l'immeuble et qu'elle avait sollicité la résolution de la vente, il n'appartient pas, en tout état de cause, au juge administratif de se prononcer sur un tel litige ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de la société SLC doit être rejetée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Nice du 8 février 2013 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par la SARL SLC devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.

Article 3 : Les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles la SARL SLC a été assujettie au titre des années 2005 à 2010 dans les rôles de la commune de Cannes à raison de l'immeuble situé 34 avenue de la reine Elisabeth de Belgique sont remises à sa charge.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à la SARL SLC.


Synthèse
Formation : 8ème / 3ème ssr
Numéro d'arrêt : 367471
Date de la décision : 28/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES. TAXES FONCIÈRES. - QUESTIONS COMMUNES - COTISATION ÉTABLIE, À LA SUITE D'UNE MUTATION DE PROPRIÉTÉ, AU NOM D'UNE PERSONNE AUTRE QUE LE REDEVABLE LÉGAL - DÉGRÈVEMENT SUIVI DU RÉTABLISSEMENT DE LA TAXE AU NOM DU PROPRIÉTAIRE (ART. 1404 DU CGI) - CONDITION - MUTATION CADASTRALE - APPLICATION AUX CAS D'ANNULATION OU DE RÉSOLUTION JUDICIAIRES DE L'ACTE PORTANT TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ - EXISTENCE [RJ1].

19-03-03 Les dispositions de l'article 1402 et du I de l'article 1404 du code général des impôts (CGI), dont il résulte que, lorsque, à la suite d'une mutation de propriété, une cotisation de taxe foncière a été établie au nom d'une autre personne que le redevable légal, le dégrèvement ne peut être prononcé qu'après que les propriétaires intéressés ont fait procéder à la mutation cadastrale, après publication de l'acte au fichier immobilier, trouvent à s'appliquer lorsqu'une décision de justice passée en force de chose jugée a prononcé, avec effet rétroactif, l'annulation ou la résolution d'un acte portant transfert de propriété qui a lui-même fait l'objet d'une publication et d'une mutation cadastrale.... ,,Par suite, lorsque la vente d'un immeuble a fait l'objet d'une résolution judiciaire, un tribunal administratif commet une erreur de droit en jugeant que, du fait du caractère rétroactif de cette résolution, il n'y a pas eu de changement de propriétaire et que le propriétaire initial doit être regardé comme le redevable légal de la taxe foncière à raison de cet immeuble sans qu'il y ait lieu de procéder à une mutation cadastrale.


Références :

[RJ1]

Comp., avant la loi n° 93-1352 du 30 décembre 1993, CE, Section, 26 juillet 1991, Société d'études et de réalisation de port Deauville, n° 51086, p. 304.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 mai. 2014, n° 367471
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Maxime Boutron
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:367471.20140528
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