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24/06/2014 | FRANCE | N°359799

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 24 juin 2014, 359799


Vu l'arrêt n° 10LY00303 du 12 juin 2012, enregistré le 18 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi de M.A... ;

Vu le pourvoi, enregistré le 10 février 2010 au greffe de la cour administrative de Lyon, et le mémoire complémentaire, enregistré le 20 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

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°) d'annuler le jugement n° 0602420 et 0603403 du 1er décembre 2009 par...

Vu l'arrêt n° 10LY00303 du 12 juin 2012, enregistré le 18 juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi de M.A... ;

Vu le pourvoi, enregistré le 10 février 2010 au greffe de la cour administrative de Lyon, et le mémoire complémentaire, enregistré le 20 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0602420 et 0603403 du 1er décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du maire de Bellentre du 21 mars 2006 le mettant en demeure de faire cesser l'état de péril grave et imminent affectant son immeuble situé sur la parcelle E1369, d'autre part, du titre exécutoire émis à son encontre le 11 mai 2006 pour le recouvrement d'une somme de 12 318,80 euros, correspondant au montant des travaux exécutés d'office ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bellentre la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. A...et à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la commune de Bellentre ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 21 mars 2006, pris sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, le maire de Bollentre a mis en demeure M. A...de faire cesser le péril imminent résultant de l'état d'un immeuble lui appartenant ; que les mesures de démolition prescrites par cet arrêté n'ayant pas été réalisées dans le délai imparti, le maire a fait exécuter d'office et aux frais de M. A...une partie de ces travaux ; que M. A...se pourvoit en cassation contre le jugement du 1er décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes dirigées contre l'arrêté du 21 mars 2006 et le titre exécutoire émis à son encontre le 11 mai 2006 en vue du recouvrement d'une somme de 12 318,50 euros correspondant au montant des travaux exécutés d'office ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices menaçant ruine lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque d'une façon générale , ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaire au maintien de la sécurité publique ( ...)" ; que l'article L. 511-2 du même code dispose que : " Dans les cas prévus aux premier alinéa de l'article L. 511-1, le propriétaire est mis en demeure d'effectuer dans un délai déterminé les travaux de réparation ou de démolition de l'immeuble menaçant ruine (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-3 : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, provoque la nomination par le juge du tribunal d'instance d'un homme de l'art qui est chargé d'examiner l'état des bâtiments dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination. / Si le rapport de cet expert constate l'urgence ou le péril grave imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité et, notamment l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient point été exécutés dans le délai imparti par la sommation, le maire a le droit de faire exécuter d'office et aux frais du propriétaire les meures indispensables. Il est ensuite procédé conformément aux dispositions édictées par l'article précédent (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si le maire peut ordonner la démolition d'un immeuble en application des dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation, après accomplissement des formalités qu'il prévoit, il doit, lorsqu'il agit sur le fondement de l'article L. 511-3 afin de faire cesser un péril imminent, se borner à prescrire les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité ; qu'en présence d'une situation d'extrême urgence créant un péril particulièrement grave et imminent qui exige la mise en oeuvre immédiate d'une mesure de démolition, le maire ne peut ordonner cette mesure que sur le fondement des pouvoirs de police générale qu'il tient des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales ;

4. Considérant que, pour écarter le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté ne pouvait légalement être fondé sur les dispositions de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, le tribunal a relevé que si, lorsqu'il agit dans le cadre de ces dispositions, le maire ne peut en principe ordonner la démolition de l'immeuble en cause, il en va autrement en cas de circonstances exceptionnelles ; qu'en statuant ainsi, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que, par suite, son jugement doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il ressort de pièces du dossier que l'immeuble dont M. A... est propriétaire sur le territoire de la commune de Bollentre, qui ne comportait, à l'origine, qu'un rez-de-chaussée, a fait l'objet de travaux destinés à le surélever de deux niveaux ; qu'à la suite de l'interruption de ces travaux pendant plusieurs années, une partie d'un mur s'est effondrée ; que, par l'arrêté contesté, le maire a prescrit la démolition " du plancher bois ainsi que tous les murs en aggloméré de ciment ", constituant la surélévation de l'immeuble, et " des deux murs en pierre, façade Nord- Ouest et façade Nord-Est jusqu'à une hauteur d'environ 2, 50 m vis-à-vis du sol pied de mur " ; que, par leur ampleur, ces mesures de démolition excédaient les mesures provisoires que le maire peut ordonner en vertu de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens qu'il invoque, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté contesté ainsi que, par voie de conséquence, celle du titre exécutoire pris sur le fondement de cet arrêté ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bollentre le versement à M. A...de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune de Bollentre sur le même fondement ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 1er décembre 2009 du tribunal administratif de Grenoble, l'arrêté du maire de Bollentre du 21 mars 2006 et le titre exécutoire émis le 11 mai 2006 sont annulés.

Article 2 : La commune de Bellentre versera à M. A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Bellentre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la commune de Bellentre.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 359799
Date de la décision : 24/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2014, n° 359799
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI ; SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:359799.20140624
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