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11/02/2015 | FRANCE | N°366636

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 11 février 2015, 366636


Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 mars et 6 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL Société de participation Coppet, dont le siège est Galeries-de-Houelbourg, boulevard Marquisat-de-Houelbourg à Baie-Mahault (97122), venant aux droits de la SA Coppet Auto ; la Société de participation Coppet demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n°12BX00064 du 6 décembre 2012 de la cour administrative d'appel de Bordeaux rejetant ses conclusions tendant à l'annulation du jugement n°0100382 du 20 juillet 2

006 du tribunal administratif de Basse-Terre, en tant que ce tribunal a...

Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 mars et 6 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL Société de participation Coppet, dont le siège est Galeries-de-Houelbourg, boulevard Marquisat-de-Houelbourg à Baie-Mahault (97122), venant aux droits de la SA Coppet Auto ; la Société de participation Coppet demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n°12BX00064 du 6 décembre 2012 de la cour administrative d'appel de Bordeaux rejetant ses conclusions tendant à l'annulation du jugement n°0100382 du 20 juillet 2006 du tribunal administratif de Basse-Terre, en tant que ce tribunal a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités y afférent auxquels la société anonyme Coppet Auto a été assujettie à raison d'une part, de la remise en cause du droit de cette société à déduire de ses bases imposables, au titre de l'exercice clos en 1993 et sur le fondement de l'article 238 bis HA du code général des impôts, l'investissement consenti par l'intéressée dans l'acquisition d'un actif incorporel amortissable et d'autre part, de la réintégration des amortissements pratiqués par cette société sur cet actif au titre des exercices clos en 1994 et 1995 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions en décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la décision n°320205 du 30 décembre 2011 du Conseil d'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la Société de Participation Coppet ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société anonyme Coppet Auto, dont le siège est en Guadeloupe, s'est vu concéder à titre onéreux, par un contrat conclu le 29 septembre 1993 avec la société GPM, pour une période de cinq ans renouvelable, le droit d'exploitation exclusive d'une licence de fabrication et de commercialisation d'un véhicule dénommé " Eole " sur les territoires de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et des îles Caraïbes ; que la société intéressée a entendu bénéficier, pour ce motif et au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1993, du régime fiscal de faveur prévu par l'article 238 bis HA du code général des impôts ouvrant droit à déduire des bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés le montant de certains investissements productifs réalisés dans les départements d'outre-mer ; que la société a par ailleurs inscrit, au passif de son bilan arrêté le 30 septembre 1994, une dette correspondant au coût d'acquisition de ce droit d'exploitation ; qu'elle a également pratiqué, au titre des exercices clos les 30 septembre des années 1994 et 1995, un amortissement de l'actif incorporel constitué par ce droit ; qu'à l'issue d'une vérification de la comptabilité de la société portant sur la période couverte par ces trois exercices, l'administration fiscale a notamment remis en cause le bénéfice du régime fiscal de faveur au titre de l'exercice clos en 1993 ainsi que le caractère déductible des dotations aux amortissements consenties au titre des exercices clos en 1994 et 1995 et de la dette inscrite au passif de la société au cours de l'exercice clos en 1994 ; que la société a ainsi été assujettie, notamment, à des suppléments d'impôt sur les sociétés assortis de majorations à raison de ces trois chefs de redressement ; que, par un jugement du 20 juillet 2006, le tribunal administratif de Basse-Terre a notamment rejeté les conclusions en décharge dirigées par l'intéressée contre ces impositions ; que la SARL Société de participation Coppet, venant aux droits de la SA Coppet Auto, a interjeté appel de ce jugement, dans cette mesure, devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ; que, par un arrêt n°06BX02252 du 30 juin 2008, la cour a réformé ce jugement et déchargé la société de l'ensemble des suppléments d'imposition correspondant à ces trois chefs de redressement ; que, saisi d'un pourvoi formé par le ministre de l'économie et des finances, le Conseil d'Etat a, par une décision n° 320205 du 30 décembre 2011, cassé l'arrêt n°06BX02252 en tant qu'il statuait sur les impositions établies à raison des deux premiers chefs de redressement, renvoyé dans cette mesure l'affaire à la cour administrative d'appel de Bordeaux et rejeté le surplus des conclusions du pourvoi ; que la Société de participation Coppet se pourvoit en cassation contre l'arrêt n°12BX00064 du 6 décembre 2012 par lequel la cour a une nouvelle fois statué sur l'appel formé devant elle ;

Sur la méconnaissance de la chose jugée par le Conseil d'Etat :

2. Considérant que si la Société de participation Coppet soutient que, par l'article 1er du dispositif de l'arrêt attaqué, la cour aurait rejeté l'ensemble des conclusions de sa requête d'appel, alors pourtant qu'en vertu de la chose jugée par le Conseil d'Etat le 30 décembre 2011, le précédent arrêt de la cour était devenu définitif en tant qu'il prononçait la décharge des impositions établies à raison du troisième et dernier chef de redressement analysé au point 1, le dispositif de l'arrêt attaqué doit être interprété au regard de l'ensemble des énonciations de l'arrêt ; qu'il ressort des visas de ce dernier que la cour a jugé qu'elle ne restait saisie que des seules conclusions d'appel dirigées contre les impositions établies à raison des premier et deuxième chefs de redressement déjà mentionnés ; qu'en outre, par les motifs de son arrêt, la cour n'a statué que sur la régularité et le bien-fondé de ces seules impositions ; que, dès lors, la cour doit être regardée comme s'étant bornée à rejeter les conclusions d'appel dirigées contre ces mêmes impositions ; que, par suite elle n'a pas méconnu les termes de la décision de renvoi prise par le juge de cassation ;

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, s'agissant des impositions restant en litige devant la cour, l'administration fiscale contestait notamment que l'acquisition par la SA Coppet Auto de la licence d'exploitation mentionnée au point 1 répondît aux critères de définition de l'investissement productif auxquels est subordonnée l'application de l'article 238 bis HA du code général des impôts ; que, dès lors et à supposer même que les écritures de l'administration au stade de la procédure de redressement contradictoire aient seulement motivé les redressements en cause par le caractère fictif de cette acquisition, la cour a exactement qualifié les faits de la cause en jugeant que l'administration fiscale ne fondait pas implicitement les impositions litigieuses sur la répression d'un abus de droit imputable au contribuable ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la Société de participation Coppet n'était pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition était irrégulière, faute pour la contribuable d'avoir bénéficié des garanties offertes par la procédure prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Sur le moyen relatif au bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 238 bis HA du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " I. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés (...) peuvent déduire de leurs résultats imposables une somme égale au montant total des investissements productifs réalisés dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion à l'occasion de la création ou de l'extension d'exploitations appartenant aux secteurs d'activité de l'industrie (...). La déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel l'investissement est réalisé (...) " ; qu'aux termes de l'article 46 quaterdecies A de l'annexe III au même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les investissements productifs que les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés (...) peuvent déduire de leurs résultats imposables en vertu de l'article 238 bis HA-I du code général des impôts s'entendent des acquisitions ou créations d'immobilisations neuves, amortissables, affectées aux opérations professionnelles des établissements exploités dans les départements d'outre-mer et appartenant aux secteurs d'activité de l'industrie (...) " ; qu'aux termes de l'article 46 quaterdecies D de la même annexe : " La déduction est pratiquée par l'entreprise propriétaire. Elle est opérée sur les résultats imposables, déterminés avant tout autre déduction ou abattement, de l'exercice au cours duquel l'immobilisation a été livrée à l'entreprise ou créée par elle (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le droit à déduction du montant des investissements que peut exercer l'entreprise est constitué soit par la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé, soit par la livraison effective de l'immobilisation dans le département d'outre-mer ; que, dans le cas de la création de l'immobilisation dans un département d'outre-mer, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise dispose matériellement de l'investissement productif et peut commencer son exploitation effective ; que, lorsque l'immobilisation a un caractère incorporel, la date à retenir est celle de sa mise en oeuvre effective au sein du processus de production et non celle de son acquisition ;

6. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour refuser que la SA Coppet Auto déduise de son résultat imposable, au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1993 et sur le fondement de l'article 238 bis HA cité ci-dessus, le coût des éléments incorporels qu'elle avait acquis par le contrat de licence conclu le 29 septembre de la même année, la cour a jugé que, la licence en cause ayant pour objet la production et la commercialisation d'un modèle de véhicule, le droit à déduction prévu par le régime fiscal de faveur ne pouvait naître qu'à compter de l'exercice au cours duquel ce véhicule serait produit et vendu ; qu'en statuant ainsi, elle n'a pas méconnu la loi fiscale interprétée conformément aux principes mentionnés au point 5 ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Société de participation Coppet n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ; que, par suite, les conclusions qu'elle a présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la Société de participation Coppet est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SARL Société de participation Coppet et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 366636
Date de la décision : 11/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 fév. 2015, n° 366636
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle Lemesle
Rapporteur public ?: M. Edouard Crépey
Avocat(s) : SCP LE BRET-DESACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:366636.20150211
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