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04/03/2015 | FRANCE | N°368054

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 04 mars 2015, 368054


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre des périodes allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 et du 1er janvier au 31 décembre 2007. Par un jugement n° 0900422, 0900423 du 1er avril 2010, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ces demandes.

Par un arrêt n° 10MA01831 du 28 février 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a accordé à Mme B...la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés au t

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Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre des périodes allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 et du 1er janvier au 31 décembre 2007. Par un jugement n° 0900422, 0900423 du 1er avril 2010, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ces demandes.

Par un arrêt n° 10MA01831 du 28 février 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a accordé à Mme B...la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés au titre des périodes allant du 1er janvier au 31 décembre 2006 et du 1er janvier au 31 décembre 2007, a réformé dans cette mesure le jugement n°s 0900422, 0900423 du tribunal administratif de Nîmes du 1er avril 2010, a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de MmeB....

Par un pourvoi enregistré le 24 avril 2013, le ministre délégué, chargé du budget, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 1er de l'arrêt du 28 février 2013 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il prononce la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée relatifs à la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de remettre à la charge de Mme B...ces mêmes droits qui lui ont été restitués à hauteur de 6 836 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2005 et à hauteur de 8 117 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2006.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 77/388/CE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

- le décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 ;

- le décret n° 2007-437 du 25 mars 2007 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Patrick Quinqueton, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public.

1. Considérant qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) " ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) " ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive, précité, qui est de garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des Etats membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ; que toutefois, conformément à l'interprétation des dispositions de la sixième directive qui résulte de l'arrêt rendu le 27 avril 2006 par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires C-443/04 et C-444/04, l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de cette directive, serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou cette activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles propres à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalente à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dans sa version applicable au présent litige : " L'usage professionnel du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l'ostéopathie ou à la chiropraxie délivrée par un établissement de formation agréé par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret. Le programme et la durée des études préparatoires et des épreuves après lesquelles peut être délivré ce diplôme sont fixés par voie réglementaire. (...) Les praticiens en exercice, à la date d'application de la présente loi, peuvent se voir reconnaître le titre d'ostéopathe ou de chiropracteur s'ils satisfont à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires du diplôme mentionné au premier alinéa. Ces conditions sont déterminées par décret. (...) Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant du titre d'ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appelés à les accomplir. / Ces praticiens ne peuvent exercer leur profession que s'ils sont inscrits sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département de leur résidence professionnelle, qui enregistre leurs diplômes, certificats, titres ou autorisations " ;

3. Considérant que les décrets relatifs aux actes et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie et à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation en ostéopathie, ainsi que l'arrêté intervenu en application de ces deux décrets ont été pris le 25 mars 2007 ; que, jusqu'à la date de leur entrée en vigueur, les actes dits d'ostéopathie ne pouvaient être pratiqués que par les docteurs en médecine, et le cas échéant, pour certains actes seulement et sur prescription médicale, par les autres professionnels de santé habilités à les réaliser ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, pour faire droit à la demande de restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés par Mme B...sur ses prestations d'ostéopathie antérieurement à l'entrée en vigueur des décrets et de l'arrêté du 25 mars 2007, la cour devait vérifier que celle-ci démontrait disposer, pour la fourniture de ces prestations, de qualifications professionnelles propres à leur assurer un niveau de qualité équivalente à celles fournies, selon le cas, par un médecin ou par un masseur-kinésithérapeute ; qu'une telle appréciation ne peut être portée qu'au vu de la nature des actes accomplis sous la dénomination d'actes d'ostéopathie et, s'agissant des actes susceptibles de comporter des risques en cas de contre-indication médicale, en considération des conditions dans lesquelles ils ont été effectués ;

5. Considérant que, pour faire droit à la demande de Mme B...de restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait spontanément acquittés au titre de la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 à raison d'actes d'ostéopathie, la cour a déduit de la circonstance que ce praticien était titulaire d'un diplôme d'ostéopathe et qu'elle avait bénéficié d'une formation conforme, tant dans sa durée que dans son contenu, aux exigences édictées par le décret du 25 mars 2007 pour cette profession, qu'elle disposait de qualifications aptes à assurer aux prestations effectuées un niveau de qualité équivalent à celles fournies par des personnes bénéficiant pendant la période d'imposition de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en se fondant seulement, pour apprécier cette condition d'équivalence dans la qualité des prestations, sur la formation suivie par l'intéressé et les titres obtenus, sans rechercher si Mme B... établissait en outre que la nature des actes pratiqués et les conditions dans lesquelles ils l'avaient été permettaient également de regarder comme remplie la condition de qualité équivalente, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, le ministre est fondé à demander l'annulation de l'article 1er de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il a accordé à Mme B...la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés au titre de la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 1er de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 28 février 2013 est annulé en tant qu'il porte sur la restitution à Mme B...des droits de taxe sur la valeur ajoutée acquittés au titre de la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à Mme A...B....


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 368054
Date de la décision : 04/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 04 mar. 2015, n° 368054
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Patrick Quinqueton
Rapporteur public ?: Mme Nathalie Escaut

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:368054.20150304
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