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10/03/2015 | FRANCE | N°386585

France | France, Conseil d'État, 10ème / 9ème ssr, 10 mars 2015, 386585


Vu les procédures suivantes :

Par une demande enregistrée le 25 juin 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...D...et Mme C...B...ont demandé l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la délibération n° 2014-27 APF du 14 mars 2014 de l'assemblée de la Polynésie française relative au haut conseil de la Polynésie française, d'autre part, de l'arrêté n° 560 CM du 3 avril 2014 du conseil des ministres de cette collectivité, pris pour l'application de cette délibération et modifiant l'arrêté n° 1398 CM du 17 octobre 2013 relatif à ce haut co

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Par une ordonnance n° 381815 du 7 juillet 2014, le président de la S...

Vu les procédures suivantes :

Par une demande enregistrée le 25 juin 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...D...et Mme C...B...ont demandé l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la délibération n° 2014-27 APF du 14 mars 2014 de l'assemblée de la Polynésie française relative au haut conseil de la Polynésie française, d'autre part, de l'arrêté n° 560 CM du 3 avril 2014 du conseil des ministres de cette collectivité, pris pour l'application de cette délibération et modifiant l'arrêté n° 1398 CM du 17 octobre 2013 relatif à ce haut conseil.

Par une ordonnance n° 381815 du 7 juillet 2014, le président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de cette affaire au tribunal administratif de la Polynésie française.

Le 29 juillet 2014, le haut-commissaire de la République en Polynésie française a déféré au tribunal administratif de la Polynésie française les dispositions du II de l'article 3, du IV de l'article 5 et du I de l'article 7 de cette délibération n° 2014-27 APF du 14 mars 2014.

Par un second déféré du même jour, le haut-commissaire a contesté devant ce tribunal la légalité de l'arrêté n° 560 CM du 3 avril 2014.

1° Par un jugement n° 1400390 du 9 décembre 2014, enregistré sous le n° 386585 le 19 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de la Polynésie française, avant de statuer sur le déféré dirigé contre la délibération mentionnée ci-dessus, a décidé, en application de l'article 174 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les deux questions suivantes :

1°) En tant qu'il crée un emploi que seuls les membres du Conseil d'Etat et les magistrats administratifs en activité ont vocation à occuper et qu'il ne prévoit que la voie du détachement pour le recrutement du titulaire de cet emploi, le II de l'article 3 de la délibération n° 2014-27 APF du 14 mars 2014 est-il intervenu dans une matière relevant de la compétence de l'Etat en vertu des dispositions de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 '

2°) Le IV de l'article 5 de cette délibération, relatif à la rémunération des membres du haut conseil de la Polynésie française, ainsi que le I de l'article 7 du même texte, qui déroge en tant que de besoin à toutes les dispositions antérieures contraires et notamment à celles portant sur le statut des agents de la Polynésie française, ont-ils été pris dans une matière devant nécessairement faire l'objet, en application de l'article 140 de la loi organique, de l'acte dénommé 'loi du pays' prévu par ce dernier article '

..............................................................................

2° Par un jugement n° 1400391 du 9 décembre 2014, enregistré sous le n° 386586 le 19 décembre 2014, le tribunal administratif de la Polynésie française, avant de statuer sur le déféré dirigé contre le premier arrêté mentionné ci-dessus, a décidé, en application de l'article 174 de la loi organique, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante :

En tant qu'ils disposent que le haut conseil de la Polynésie française est obligatoirement saisi par le gouvernement de projets de texte ou de saisine, notamment des projets de 'loi du pays' et de certains projets de délibération à caractère réglementaire et que le choix fait par le gouvernement entre le texte de son projet initial ou celui résultant de l'avis du haut conseil de la Polynésie française s'opère dans les conditions et selon les modalités fixées par une instruction du président de la Polynésie française, les articles 5, 7 et 13 de l'arrêté modifié n° 1398 CM du 17 octobre 2013 empiètent-ils sur le domaine de la loi organique fixé par l'article 74 de la Constitution '

..............................................................................

3° Par un jugement n° 1400334 du 9 décembre 2014, enregistré sous le n° 386587 le 19 décembre 2014, le tribunal administratif de la Polynésie française, après avoir rejeté celles des conclusions de M. D...et de Mme B...qui tendaient à l'annulation de l'arrêté du 3 avril 2014, a décidé, en application de l'article 174 de la loi organique et avant de statuer sur le surplus des conclusions présentées par les intéressés, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les mêmes questions que celles formulées par son jugement n° 1400390 visé ci-dessus.

..............................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution ;

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- la loi organique n° 2007-1719 du 7 décembre 2007 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

- la délibération n° 2014-27 APF du 14 mars 2014 de l'assemblée de la Polynésie française, l'arrêté n° 1398 CM du 17 octobre 2013 et l'arrêté n° 560 CM du 3 avril 2014 du conseil des ministres de la Polynésie française ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Béreyziat, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;

REND L'AVIS SUIVANT :

1. Par sa délibération n° 2014-27 APF du 14 mars 2014, l'assemblée de la Polynésie française a institué un haut conseil de la Polynésie française. Pour l'application de cette disposition ont notamment été modifiés, par l'arrêté n° 560 CM du 3 avril 2014 du conseil des ministres de cette collectivité, les articles 5, 7 et 13 de l'arrêté n° 1398 CM du 17 octobre 2013 antérieurement pris par la même autorité. Les demandes d'avis visées ci-dessus, présentées sur le fondement de l'article 174 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, portent toutes trois sur l'exacte application, par cette délibération et ces articles, de la répartition des compétences entre l'Etat et la Polynésie française ainsi que des dispositions relatives aux attributions de l'assemblée de la Polynésie française. Il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, d'y répondre par un unique avis.

Sur la délibération n° 2014-27 APF du 14 mars 2014 :

En ce qui concerne les conditions de nomination à l'emploi de président du haut conseil de la Polynésie française :

2. Ainsi que le rappelle le jugement avant dire droit n° 1400390, il résulte des dispositions combinées de l'article 45 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, de l'article 14 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de mise à disposition et de cessation définitive de fonctions, ainsi que des articles R. 135-1 et R. 235-2 du code de justice administrative que les membres du Conseil d'Etat et du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel peuvent, notamment, être détachés auprès de collectivités territoriales.

3. Aux termes du II de l'article 3 de la délibération déférée à la juridiction de renvoi : " Le président du haut conseil est nommé pour une durée de six ans par arrêté pris en conseil des ministres. Il exerce ses fonctions à temps complet (...). Il est choisi parmi les membres en activité du Conseil d'Etat ou du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, dans le respect des dispositions du statut du corps auquel il appartient et sous réserve de l'accord de l'autorité hiérarchique compétente et de son détachement auprès de la Polynésie française ".

4. Les dispositions de la dernière phrase citée ci-dessus ont pour seul objet de fixer le cadre à l'intérieur duquel doit être exercé, par l'autorité compétente, le choix de la personne nommée à la présidence du haut conseil de la Polynésie française. Elles n'ont pas pour effet d'imposer une quelconque obligation aux membres des corps de la fonction publique d'Etat qu'elles mentionnent, non plus qu'aux autorités investies des pouvoirs de gestion de ces corps ni à celles qui sont compétentes pour prononcer le détachement des membres en cause, et n'ont pas davantage pour effet de modifier la consistance des droits que ces derniers tirent de leur appartenance à ces corps, notamment du droit à détachement rappelé au point 2. La mesure édictée par ces dispositions ne saurait, dès lors, être regardée comme relevant du statut de la fonction publique de l'Etat, au sens notamment de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française. Par suite, en adoptant ces dispositions, l'assemblée de la Polynésie française n'a pas méconnu le champ des compétences réservées à l'Etat par ce dernier article.

En ce qui concerne les modalités de rémunération des membres du haut conseil :

5. Aux termes du IV de l'article 5 de la délibération déférée à la juridiction de renvoi : " Le régime indemnitaire des membres du haut conseil est fixé par arrêté en conseil des ministres. La rémunération et, le cas échéant, les autres éléments du régime indemnitaire des membres du haut conseil tiennent notamment compte de leur statut et de leurs responsabilités respectives au sein de l'autorité, de l'importance et de la qualité des travaux et missions qui leur sont confiés et leur assiduité aux séances et travaux ; elle peut être fixée par référence à la grille des emplois fonctionnels. / Nonobstant toute disposition antérieure contraire à celles du présent article, le montant individuel de leur rémunération est fixé pour chacun d'eux par décision du Président de la Polynésie française dans les conditions déterminées par l'arrêté en conseil des ministres mentionné au premier alinéa ; elle peut également être fixée dans le même cadre par voie contractuelle, quel que soit le statut du membre du haut conseil à la date de sa nomination, y compris pour les agents de la Polynésie française ". Le I de l'article 7 de la même délibération dispose que : " Les dispositions de la présente délibération dérogent en tant que de besoin à toutes les dispositions antérieures contraires, et notamment celles portant sur le statut des agents de la Polynésie française, dont aucune ne peut être appliquée ou interprétée comme limitant la portée des règles énoncées aux articles 3 à 5 ".

6. Dans sa rédaction initiale, l'article 140 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française disposait que " les actes de l'assemblée de la Polynésie française, dénommés 'lois du pays', sur lesquels le Conseil d'Etat exerce un contrôle juridictionnel spécifique, sont ceux qui, relevant du domaine de la loi, soit ressortissent à la compétence de la Polynésie française, soit sont pris au titre de la participation de la Polynésie française aux compétences de l'Etat et interviennent dans les matières suivantes : (...) 7° Garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires de la Polynésie française (...) ". L'article 25 de la loi organique du 7 décembre 2007 tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française a ultérieurement donné à cet article 140 la rédaction suivante, aujourd'hui en vigueur : " Les actes de l'assemblée de la Polynésie française, dénommés 'lois du pays', sur lesquels le Conseil d'Etat exerce un contrôle juridictionnel spécifique, sont ceux qui, relevant du domaine de la loi, soit ressortissent à la compétence de la Polynésie française (...), soit sont pris au titre de la participation de la Polynésie française à l'exercice des compétences de l'Etat (...) ". Il résulte des travaux préparatoires à l'introduction de ces modifications qu'en procédant à ces dernières, le législateur organique a entendu simplifier les termes de définition de la 'loi du pays', en renvoyant pour l'essentiel au domaine que la Constitution attribue à la loi, mais non restreindre, à cette occasion, le domaine d'intervention des 'lois du pays' que des dispositions organiques antérieures avait déterminé. Il s'ensuit qu'alors même qu'aucune disposition de la Constitution, notamment pas les neuvième et treizième alinéas de son article 34, ne prévoit ni n'implique que les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires de la Polynésie française relèveraient du domaine de la loi, de telles garanties ne peuvent être déterminées que par la voie d'une 'loi du pays'.

7. Toutefois, ne figurent pas au nombre de ces garanties les modalités de rémunération et d'indemnisation des agents publics que sont, en vertu de la délibération litigieuse, les membres du haut conseil, telles que déterminées par les dispositions du IV de son article 5, ni, par voie de conséquence, la mesure énoncée au I de son article 7, en tant qu'elle permet de déroger, pour l'application de ces mêmes modalités, aux prévisions du statut des agents de la Polynésie française.

8. Il résulte de ce qui précède que les dispositions citées au point 5, en tant qu'elles portent sur la rémunération et le régime indemnitaire des membres du haut conseil, ne sont pas au nombre des mesures que l'article 140 de la loi organique du 27 février 2004 imposerait d'adopter par la voie d'une 'loi du pays'.

Sur l'arrêté n° 560 CM du 3 avril 2014 modifiant l'arrêté n° 1398 CM du 17 octobre 2013 :

9. Il est loisible aux autorités compétentes de la Polynésie française de créer des organes administratifs de conseil et d'expertise dans les différents domaines de compétence de la collectivité. Toutefois, ces autorités ne sauraient, sans méconnaître la compétence du législateur organique, instituer des organes dont l'étendue des domaines et des actes qui sont susceptibles de leur être soumis, ainsi que les conditions dans lesquelles ces organes sont saisis et rendent leurs avis, sont telles qu'elles portent atteinte à l'équilibre des institutions de la collectivité ou modifient le régime de ces actes et relèvent, par suite, de l'organisation et du fonctionnement de ces institutions, au sens du cinquième alinéa de l'article 74 de la Constitution.

10. L'article 2 de la délibération du 14 mars 2014 mentionnée ci-dessus, instituant le haut conseil de la Polynésie française, se borne à disposer que cet organe est consulté par le président de cette collectivité sur toute question de nature juridique, de rédaction ou de codification de textes normatifs ainsi que sur la simplification et l'amélioration de la qualité, de l'intelligibilité et de l'accessibilité du droit, sur la déontologie des agents publics ou sur les relations entre les usagers et l'administration, soit lorsque le président le décide, soit lorsqu'un arrêté en conseil des ministres le prévoit.

11. Il résulte, toutefois, des dispositions combinées des articles 5 et 7 de l'arrêté n° 1398 CM du 17 octobre 2013, tel que modifié par l'arrêté n° 560 CM du 3 avril 2014 déféré à la juridiction de renvoi, que le haut conseil de la Polynésie française est obligatoirement saisi pour avis, notamment, des projets de 'loi du pays', de délibération à caractère réglementaire à l'exception de celles ayant un objet exclusivement budgétaire, de convention internationale ou de convention de coopération décentralisée conclue dans le champ des compétences de la Polynésie française, de convention conclue avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel en vue de l'association de cette collectivité à la politique audiovisuelle de la République, de saisine du Conseil constitutionnel ou du Conseil d'Etat en vue du déclassement de dispositions intervenues dans le champ des compétences réglementaires de la collectivité et prises en la forme, respectivement, de lois ou de 'lois du pays', de saisine pour avis du tribunal administratif de la Polynésie française par le gouvernement de la collectivité, d'arrêtés réglementaires affectant les attributions, le fonctionnement ou le statut des membres du haut conseil, d'arrêtés du conseil des ministres ou de décisions du président de la Polynésie française relatifs à la codification du droit localement applicable et à la mise à jour de ces codes, ainsi que des projets d'instructions générales, d'instructions ou de circulaires relatives à la codification, à la simplification ou à l'amélioration de la qualité du droit et de son accessibilité, aux relations des usagers avec les administrations, à la déontologie, à la prévention des conflits d'intérêts et aux relations du haut conseil avec les services du gouvernement. L'article 6 de l'arrêté du 17 octobre 2013 modifié prévoit, quant à lui, que le haut conseil peut être saisi par le président de la Polynésie française, à titre facultatif, sur toute question juridique ou sur tout projet ou toute proposition de texte qui ne ferait pas l'objet d'une consultation obligatoire. Le premier alinéa de l'article 12 de cet arrêté dispose que le haut conseil, saisi d'un projet de texte, donne son avis et propose les modifications qu'il juge nécessaires. L'article 13 du même arrêté dispose que " le choix fait par le gouvernement entre le texte de son projet initial ou celui résultant de l'avis du haut conseil de la Polynésie française s'opère dans les conditions et selon les modalités fixées par une instruction du Président de la Polynésie française ".

12. Eu égard à l'étendue du champ d'intervention obligatoire ainsi attribué au haut conseil par les articles 5 et 7 mentionnés ci-dessus, dont les prévisions ne sont assorties d'aucune exception, l'arrêté déféré à la juridiction de renvoi doit être regardé comme affectant l'équilibre des institutions de la Polynésie française, tel que défini par le législateur organique. En outre, en obligeant le gouvernement de la Polynésie française à choisir entre le texte des projets initiaux qu'il soumet au haut conseil et celui résultant des avis éventuellement émis par cet organe, les dispositions de l'article 13 cité ci-dessus ont pour effet de modifier le régime des actes de la Polynésie française. Pour ces motifs, l'arrêté déféré à la juridiction de renvoi est entaché d'incompétence.

Sur les conclusions présentées par le président de la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les conclusions présentées à ce titre ne peuvent être portées que devant le juge saisi du litige à l'occasion duquel les questions de droit visées ci-dessus ont été soulevées.

Le présent avis sera notifié au président du tribunal administratif de la Polynésie française, au haut-commissaire de la République en Polynésie française, à M. A...D..., à Mme C...B..., au président de la Polynésie française, au président de l'assemblée de la Polynésie française, à la ministre des outre-mer et au président du haut conseil de la Polynésie française.

Il sera publié au Journal officiel de la Polynésie française.


Synthèse
Formation : 10ème / 9ème ssr
Numéro d'arrêt : 386585
Date de la décision : 10/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE - GÉNÉRALITÉS - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE L'ETAT ET LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - 1) POSSIBILITÉ POUR LA POLYNÉSIE FRANÇAISE DE CRÉER DES ORGANES ADMINISTRATIFS DE CONSEIL ET D'EXPERTISE - EXISTENCE - CONDITION - ORGANES NE PORTANT PAS ATTEINTE À L'ÉQUILIBRE DES INSTITUTIONS DE LA COLLECTIVITÉ ET NE MODIFIANT PAS LE RÉGIME DE SES ACTES - 2) APPLICATION - CRÉATION D'UN HAUT CONSEIL DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - ATTEINTE À L'ÉQUILIBRE DES INSTITUTIONS - EXISTENCE - EU ÉGARD À L'ÉTENDUE DU CHAMP D'INTERVENTION OBLIGATOIRE ATTRIBUÉ - MODIFICATION DU RÉGIME DES ACTES - EXISTENCE - DU FAIT DE L'INTERDICTION FAITE AU GOUVERNEMENT DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE D'ADOPTER UN TIERS TEXTE - CONSÉQUENCE - COMPÉTENCE DU SEUL LÉGISLATEUR ORGANIQUE - EXISTENCE - COMPÉTENCE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - ABSENCE [RJ1].

46-01-01-005 1) Il est loisible aux autorités compétentes de la Polynésie française de créer des organes administratifs de conseil et d'expertise dans les différents domaines de compétence de la collectivité. Toutefois, ces autorités ne sauraient, sans méconnaître la compétence du législateur organique, instituer des organes dont l'étendue des domaines et des actes qui sont susceptibles de leur être soumis, ainsi que les conditions dans lesquelles ces organes sont saisis et rendent leurs avis, sont telles qu'elles portent atteinte à l'équilibre des institutions de la collectivité ou modifient le régime de ces actes et relèvent, par suite, de l'organisation et du fonctionnement de ces institutions, au sens du cinquième alinéa de l'article 74 de la Constitution.... ,,2) En l'espèce, arrêté du conseil des ministres de la Polynésie française relatif au haut conseil de la Polynésie française. Eu égard à l'étendue du champ d'intervention obligatoire attribué au haut conseil par deux des articles de cet arrêté, dont les prévisions ne sont assorties d'aucune exception, l'arrêté doit être regardé comme affectant l'équilibre des institutions de la Polynésie française, tel que défini par le législateur organique. En outre, en obligeant le gouvernement de la Polynésie française à choisir entre le texte des projets initiaux qu'il soumet au haut conseil et celui résultant des avis éventuellement émis par cet organe, les dispositions d'un autre article de cet arrêté ont pour effet de modifier le régime des actes de la Polynésie française. Pour ces motifs, l'arrêté est entaché d'incompétence.

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE - STATUTS - POLYNÉSIE FRANÇAISE - 1) A) DOMAINE DE LA LOI DU PAYS (ART - 140 DE LA LOI ORGANIQUE DU 27 FÉVRIER 2004) - RENVOI AU DOMAINE DE LA LOI DÉFINI PAR LA CONSTITUTION - POUR L'ESSENTIEL SEULEMENT - CONSÉQUENCE - GARANTIES FONDAMENTALES ACCORDÉES AUX FONCTIONNAIRES DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - DOMAINE DE LA LOI DU PAYS - INCLUSION - ALORS MÊME QU'ELLES NE RELÈVERAIENT PAS - EN MÉTROPOLE - DU DOMAINE DE LA LOI - B) GARANTIES FONDAMENTALES ACCORDÉES AUX FONCTIONNAIRES DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - EXCLUSION - MODALITÉS DE RÉMUNÉRATION ET D'INDEMNISATION DES AGENTS PUBLICS - 2) A) POSSIBILITÉ POUR LA POLYNÉSIE FRANÇAISE DE CRÉER DES ORGANES ADMINISTRATIFS DE CONSEIL ET D'EXPERTISE - EXISTENCE - CONDITION - ORGANES NE PORTANT PAS ATTEINTE À L'ÉQUILIBRE DES INSTITUTIONS DE LA COLLECTIVITÉ ET NE MODIFIANT PAS LE RÉGIME DE SES ACTES - B) APPLICATION - CRÉATION D'UN HAUT CONSEIL DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - ATTEINTE À L'ÉQUILIBRE DES INSTITUTIONS - EXISTENCE - EU ÉGARD À L'ÉTENDUE DU CHAMP D'INTERVENTION OBLIGATOIRE ATTRIBUÉ - MODIFICATION DU RÉGIME DES ACTES - EXISTENCE - DU FAIT DE L'INTERDICTION FAITE AU GOUVERNEMENT DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE D'ADOPTER UN TIERS TEXTE - CONSÉQUENCE - COMPÉTENCE DU SEUL LÉGISLATEUR ORGANIQUE - EXISTENCE - COMPÉTENCE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE - ABSENCE [RJ1].

46-01-02-02 1) a) En modifiant, par l'article 25 de la loi organique n° 2007-1719 du 7 décembre 2007, l'article 140 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, le législateur organique a entendu simplifier les termes de définition de la loi du pays , en renvoyant pour l'essentiel au domaine que la Constitution attribue à la loi, mais non restreindre, à cette occasion, le domaine d'intervention des lois du pays que des dispositions organiques antérieures avait déterminé. Il s'ensuit qu'alors même qu'aucune disposition de la Constitution, notamment pas les neuvième et treizième alinéas de son article 34, ne prévoit ni n'implique que les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires de la Polynésie française relèveraient du domaine de la loi, de telles garanties ne peuvent être déterminées que par la voie d'une loi du pays .,,,b) Toutefois, ne figurent pas au nombre de ces garanties les modalités de rémunération et d'indemnisation des agents publics, ni, par voie de conséquence, une mesure qui permet de déroger, pour l'application de ces mêmes modalités, aux prévisions du statut des agents de la Polynésie française.,,,2) a) Il est loisible aux autorités compétentes de la Polynésie française de créer des organes administratifs de conseil et d'expertise dans les différents domaines de compétence de la collectivité. Toutefois, ces autorités ne sauraient, sans méconnaître la compétence du législateur organique, instituer des organes dont l'étendue des domaines et des actes qui sont susceptibles de leur être soumis, ainsi que les conditions dans lesquelles ces organes sont saisis et rendent leurs avis, sont telles qu'elles portent atteinte à l'équilibre des institutions de la collectivité ou modifient le régime de ces actes et relèvent, par suite, de l'organisation et du fonctionnement de ces institutions, au sens du cinquième alinéa de l'article 74 de la Constitution.... ,,b) En l'espèce, arrêté du conseil des ministres de la Polynésie française relatif au haut conseil de la Polynésie française. Eu égard à l'étendue du champ d'intervention obligatoire attribué au haut conseil par deux des articles de cet arrêté, dont les prévisions ne sont assorties d'aucune exception, l'arrêté doit être regardé comme affectant l'équilibre des institutions de la Polynésie française, tel que défini par le législateur organique. En outre, en obligeant le gouvernement de la Polynésie française à choisir entre le texte des projets initiaux qu'il soumet au haut conseil et celui résultant des avis éventuellement émis par cet organe, les dispositions d'un autre article de cet arrêté ont pour effet de modifier le régime des actes de la Polynésie française. Pour ces motifs, l'arrêté est entaché d'incompétence.


Références :

[RJ1]

Cf. CE 19 février 2014, Haut-commissaire de la République en Polynésie française et M. Temaru, n°370850-371540, à mentionner aux Tables.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 mar. 2015, n° 386585
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Béreyziat

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:386585.20150310
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