La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/07/2015 | FRANCE | N°385989

France | France, Conseil d'État, 5ème ssjs, 22 juillet 2015, 385989


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les opérations électorales organisées les 23 et 30 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux de la commune de Montmagny (Val d'Oise). Par un jugement n° 1403404 du 27 octobre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa protestation.

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre et 24 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce juge

ment ;

2°) de faire droit à sa protestation ;

3°) de mettre à la charge de l'E...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les opérations électorales organisées les 23 et 30 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux de la commune de Montmagny (Val d'Oise). Par un jugement n° 1403404 du 27 octobre 2014, le tribunal administratif a rejeté sa protestation.

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre et 24 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa protestation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gérald Bégranger, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. B...;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au terme du second tour des opérations électorales, organisé le 30 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux de la commune de Montmagny (Val d'Oise), la liste " Ensemble construisons l'avenir " conduite par M.E..., maire sortant, a obtenu 2 050 voix soit 53,45 % des suffrages exprimés, la liste " Une équipe, une force d'entreprendre " menée par M. B...1 332 voix soit 34,73 % des suffrages exprimés et la liste " Pour une ville solidaire, écologique, sociale et participative " conduite par M. G...431 voix soit 11,63 % des suffrages exprimés ; qu'ainsi l'écart séparant la liste " Ensemble construisons l'avenir ", arrivée en tête au second tour, de la liste " Une équipe, une force d'entreprendre " a été de 718 voix sur 3 835 suffrages exprimés ; que M. B...a formé une protestation tendant à l'annulation de ces opérations électorales devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, que celui-ci a rejetée par un jugement du 27 octobre 2014 ; que M. B...relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que, par l'effet de l'article R. 119 du code électoral, un grief soulevé après l'expiration du délai prenant fin à 18 heures le cinquième jour qui suit l'élection est nouveau et par suite irrecevable, hormis le cas où ce grief est d'ordre public ; qu'il résulte de l'instruction que les griefs soulevés par M. B...en première instance, tirés d'une part de l'utilisation par M. E... au cours de la campagne électorale de locaux, de documents graphiques et de moyens matériels, notamment audiovisuels ou de communication, ainsi que du bureau du maire, et d'autre part du défaut de sincérité des comptes de campagne de la liste " Ensemble construisons l'avenir " n'ont été soulevés pour la première fois devant le tribunal administratif que par un mémoire enregistré le 16 octobre 2014, soit au-delà du délai de cinq jours après l'élection ; qu'aucun de ces griefs n'étant d'ordre public, il n'appartenait pas aux premiers juges de les soulever d'office ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a regardé ces griefs comme étant irrecevables ; que, par le même motif, ces griefs repris en appel par M. B...sont également irrecevables ;

Sur les moyens tirés d'irrégularités commises pendant la campagne électorale :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que des affichettes portant des mentions critiquant la politique conduite par l'Etat d'Israël dans les Territoires palestiniens, et laissant à penser que M. B... soutiendrait cette politique, ont été collées au début du mois de février 2014 sur des affiches électorales de la liste conduite par ce candidat ; que M. B...soutient que des tracts revêtant les mêmes mentions auraient été déposés dans des boîtes aux lettres d'habitants de Montmagny au début du mois de mars 2014, M. B...ayant pour ces faits déposé une plainte au commissariat de police ; qu'il résulte également de l'instruction qu'au cours de la nuit précédant le premier tour de scrutin, des tracts appelant à voter contre M. B...au motif que celui-ci soutiendrait la politique de l'Etat d'Israël dans les Territoires palestiniens ont été distribués dans des boîtes aux lettres d'habitants de Montmagny ou répandus sur la voie publique ; que, toutefois, M. B...n'a produit aucun élément de nature à établir l'ampleur de la diffusion des affichettes et tracts litigieux ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que les tracts répandus sur la voie publique pendant la nuit du samedi 22 au dimanche 23 mars 2014 ont été enlevés le lendemain matin, jour du premier tour de scrutin, avant l'ouverture des bureaux de vote par les services techniques de la commune agissant sur instruction de M.E..., maire sortant ; qu'ainsi, en tout état de cause, ces faits n'ont pas été, dans les circonstances de l'espèce et eu égard à l'écart des voix séparant les listes conduites par MM. E...etB..., de nature à altérer la sincérité du résultat ;

4. Considérant que, si M. B...soutient que M. E...et certains de ses colistiers auraient tenu à son égard des propos désobligeants et mettant en cause son honneur, un tel grief, dépourvu de toute précision quant à la nature des propos qui auraient ainsi été tenus et d'éléments susceptibles d'en établir le bien-fondé, ne peut qu'être écarté ;

Sur les moyens relatifs au déroulement du scrutin :

5. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.B..., l'organisation par la municipalité d'un service de véhicules permettant à des électeurs, notamment âgés, d'être transportés entre leur domicile et leur bureau de vote lors du second tour du scrutin, n'est constitutif d'aucune irrégularité dès lors qu'il ne ressort pas de l'instruction que les électeurs bénéficiant de ce service auraient fait l'objet, à cette occasion et sous quelque forme que ce soit, de pressions susceptibles d'exercer une influence sur le sens de leur vote ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 26 du code électoral : " La campagne électorale est ouverte à partir du deuxième lundi qui précède la date du scrutin et prend fin la veille du scrutin à minuit. En cas de second tour, la campagne électorale est ouverte le lendemain du premier tour et prend fin la veille du scrutin à minuit " ;

7. Considérant que s'il résulte de l'instruction que la présence de M.D..., candidat de la liste " Pour une ville solidaire, écologique, sociale et participative " a été observée à proximité de certains bureaux de vote durant les opérations électorales du premier tour, il n'est pas établi que l'intéressé se serait livré à cette occasion à une quelconque action de propagande électorale ; que, contrairement à ce que soutient M.B..., la seule présence de ce candidat n'est constitutive d'aucune méconnaissance de l'article R. 26 du code électoral, et n'a pas été de nature à altérer la sincérité du résultat ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la présence de M. D... aurait vicié le résultat du premier tour doit en tout état de cause être écarté ;

8. Considérant que M. B...fait valoir que M. E...s'est rendu dans les vestiaires du stade de Montmagny le dimanche 30 mars dans l'après-midi, jour du second tour, et y a été vu en compagnie de membres de l'équipe de football des vétérans ; que dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la présence en ce lieu de M.E..., qui est d'ailleurs membre de ce club sportif, ait donné lieu à une action de propagande électorale, le moyen tiré de ce que M. E... aurait à ce titre méconnu la prohibition résultant de l'article R. 26 du code électoral doit être écarté ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 62 du code électoral : " A son entrée dans la salle du scrutin, l'électeur, après avoir fait constater son identité (...), prend, lui-même, une enveloppe. (...) " ; que s'il résulte de l'instruction, en particulier des mentions du procès-verbal du bureau de vote n° 7, que, lors du second tour de scrutin, le président suppléant de ce bureau a refusé qu'un électeur prenne lui-même une enveloppe et la lui a fait remettre, cette irrégularité a été dépourvue d'incidence sur les résultats dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle aurait porté atteinte à la liberté de choix de l'électeur en cause, ou au secret de son vote ;

10. Considérant que M. B...soutient que le défaut de sincérité des résultats du scrutin serait établie du seul fait que le taux d'abstention constaté lors des élections municipales des 23 et 30 mars 2014 à Montmagny a été plus élevé que le taux d'abstention relevé à l'échelle nationale ; qu'il ne résulte toutefois pas de l'instruction que, lors des deux tours de scrutin, il aurait été fait obstacle, de quelque manière que ce soit, au libre exercice du droit de vote par les électeurs de cette commune ; que la seule circonstance que l'abstention à Montmagny a été plus élevée que la moyenne nationale n'est pas de nature à établir que la sincérité du résultat en ait été altérée ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa protestation ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par M. B...soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie à la présente instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme qui est demandée au même titre par M. E...et autres ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. E...et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B..., à M. F...E..., à M. C...G...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème ssjs
Numéro d'arrêt : 385989
Date de la décision : 22/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2015, n° 385989
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Gérald Bégranger
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:385989.20150722
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award