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22/07/2015 | FRANCE | N°388788

France | France, Conseil d'État, 5ème ssjs, 22 juillet 2015, 388788


Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en application des dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 6 novembre 2014 constatant le dépôt hors délai du compte de campagne de Mme B...A..., candidat tête de liste aux élections municipales et communautaires qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014 dans la commune de Deuil-la-Barre (Val d'Oise). Par un jugement n° 1411029 du 12 février 2015, le tribunal administratif a déclaré

Mme A...inéligible pour une durée d'un an.

Par une requête, enregi...

Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en application des dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 6 novembre 2014 constatant le dépôt hors délai du compte de campagne de Mme B...A..., candidat tête de liste aux élections municipales et communautaires qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014 dans la commune de Deuil-la-Barre (Val d'Oise). Par un jugement n° 1411029 du 12 février 2015, le tribunal administratif a déclaré Mme A...inéligible pour une durée d'un an.

Par une requête, enregistrée le 18 mars 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement du tribunal administratif en tant qu'il la déclare inéligible. Elle soutient qu'eu égard au faible montant de ses dépenses de campagne et de sa bonne foi, c'est à tort que le tribunal administratif l'a déclarée inéligible.

Par des observations, enregistrées le 24 avril 2015, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques déclare s'en remettre à la sagesse du Conseil d'Etat s'agissant de la durée de l'inéligibilité susceptible d'être prononcée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- la loi n° 2011-412 du 14 avril 2011 portant simplification de dispositions du code électoral et relative à la transparence financière de la vie politique ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gérald Bégranger, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

1. Considérant que, par une décision du 6 novembre 2014, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté que Mme A..., candidate aux élections qui se sont déroulées les 23 et 30 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Deuil-la-Barre (Val-d'Oise), n'avait pas déposé son compte de campagne dans le délai qui lui était imparti en vertu de l'article L. 52-12 du code électoral ; que, saisi en application de l'article L. 52-15 du même code, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a déclaré Mme A...inéligible pour une durée d'un an, par un jugement du 12 février 2015 ; que Mme A...relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que l'article L. 52-12 du code électoral dispose : " Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés est tenu d'établir un compte de campagne (...) / Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte. (...) Cette présentation n'est pas nécessaire lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne. Dans ce cas, le mandataire établit une attestation d'absence de dépense et de recette (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 52-15 du même code : " La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. / (...) Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, (...) la commission saisit le juge de l'élection (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 118-3 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 14 avril 2011 : " Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, (...) le juge de l'élection peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12. /(...) L'inéligibilité (...) est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. Toutefois, elle n'a pas d'effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision (...) " ;

3. Considérant que le manquement à l'obligation de déposer un compte de campagne est constitué à la date à laquelle expire le délai imparti au candidat pour procéder à ce dépôt, lequel est impératif et ne peut être prorogé ; qu'en l'espèce, le délai imparti à Mme A... pour déposer son compte de campagne expirait le 30 mai 2014 à 18 heures ;

4. Considérant qu'il appartient au juge de l'élection, pour apprécier s'il y a lieu de faire usage de la faculté donnée par les dispositions précitées de l'article L. 118-3 du code électoral, de déclarer inéligible un candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans le délai imparti, contrairement aux prescriptions de l'article L. 52-12 du même code, de tenir compte, eu égard à la nature de la règle méconnue, du caractère délibéré ou non du manquement ainsi que de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la liste " Dynamique Deuil-la-Barre ", conduite par MmeA..., a obtenu 3,22 % des voix au premier tour du scrutin qui s'est déroulé le 23 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Deuil-la-Barre ; qu'il n'est pas contesté qu'elle n'a pas déposé son compte de campagne dans le délai prescrit par les dispositions précitées de l'article L. 52-12 du code électoral, soit le 30 mai 2015 ainsi qu'il a été dit ci-dessus, mais le 6 juin suivant ; qu'elle a ainsi méconnu une obligation substantielle ; que Mme A...fait valoir qu'en se rendant chez son expert-comptable le 30 mai 2015, afin que celui-ci certifie son compte de campagne, l'écran de l'ordinateur regroupant la totalité des données comptables de sa campagne s'est accidentellement brisé ; qu'elle soutient, en outre, que cet incident a, dans un premier temps, fait techniquement obstacle à la récupération de ses données comptables, qui n'auraient pu être exploitées que quelques jours plus tard ; que, toutefois, un tel incident n'est pas à lui seul de nature à justifier la méconnaissance de l'obligation résultant des dispositions précitées de l'article L. 52-12 du code électoral, dès lors qu'eu égard à la date à laquelle il se serait produit, le 30 mai 2015, Mme A...n'avait pas accompli toutes les diligences requises pour faire en sorte que son compte de campagne puisse être déposé le jour même ;

6. Considérant toutefois que le compte de campagne produit tardivement par Mme A...retrace des mouvements financiers de montant limité, à savoir 902 euros de dépenses et 1 400 euros de recettes, celles-ci incluant 1 200 euros d'apport personnel ; qu'il ne résulte de l'instruction ni que ces indications soient inexactes ni que la candidate ait commis, au regard des règles de financement des campagnes électorales, des irrégularités autres que celle résultant du dépôt tardif de son compte de campagne ; qu'eu égard à l'ensemble de ces circonstances, il y a lieu de ramener la durée de l'inéligibilité prononcée par les premiers juges contre Mme A...à six mois ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé son inéligibilité pour une durée supérieure à six mois ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Mme A...est déclaré inéligible pour une durée de six mois à compter de la présente décision.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 12 février 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée Mme B...A...et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème ssjs
Numéro d'arrêt : 388788
Date de la décision : 22/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2015, n° 388788
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Gérald Bégranger
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:388788.20150722
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