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16/03/2016 | FRANCE | N°386200

France | France, Conseil d'État, 9ème ssjs, 16 mars 2016, 386200


Vu la procédure suivante :

La SA Cegas a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, en droits et pénalités, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, et la réduction de l'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle à cet impôt mis à sa charge au titre de l'exercice clos en 2011. Par un jugement nos 1200350, 1201245 du 2 mai 2013, le tribunal administratif de Châlons-

en-Champagne a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 13NC01474 du 2 octobr...

Vu la procédure suivante :

La SA Cegas a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, en droits et pénalités, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, et la réduction de l'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle à cet impôt mis à sa charge au titre de l'exercice clos en 2011. Par un jugement nos 1200350, 1201245 du 2 mai 2013, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 13NC01474 du 2 octobre 2014, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la SA Cegas contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 décembre 2013, 4 mars 2015 et 5 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SA Cegas demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de la SA Cegas ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juges du fond que la SA Cegas, qui détient l'usufruit de la SAS Montmartre Comptabilité, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2008, 2009 et 2010, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause le bénéfice du régime fiscal des sociétés mères pour les dividendes qu'elle a perçus de cette société. La SA Cegas, qui a contesté ces rectifications, a également demandé en vain le bénéfice du régime fiscal des sociétés mères pour l'exercice clos en 2011. Elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 octobre 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du 2 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes.

2. Aux termes de l'article 216 du code général des impôts : " Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges (...) ". Aux termes de l'article 145 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini à l'article 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après : / a. Les titres de participation doivent revêtir la forme nominative ou être déposés dans un établissement désigné par l'administration ; / b. Les titres de participation doivent représenter au moins 5 % du capital de la société émettrice ; ce pourcentage s'apprécie à la date de mise en paiement des produits de la participation. (...) ; / 6. Le régime fiscal des sociétés mères n'est pas applicable : (...) / b ter. Aux produits des titres auxquels ne sont pas attachés des droits de vote, sauf si la société détient des titres représentant au moins 5 % du capital et des droits de vote de la société émettrice (...) ". Il résulte de ces dispositions que le régime fiscal des sociétés mères, qui tend à prévenir le risque de double imposition des dividendes provenant des filiales et a pour objectif de favoriser les concentrations d'entreprises, est soumis notamment aux conditions que la société qui entend en réclamer le bénéfice détienne des titres de participation et que ces titres représentent au moins 5 % du capital de la société émettrice. Si la qualité d'usufruitier permet une participation aux éventuels bénéfices, elle ne confère pas à son titulaire des droits équivalents, notamment vis-à-vis du capital, à ceux d'un propriétaire détenteur du titre. Par suite, en jugeant que le législateur avait entendu exclure du bénéfice du régime fiscal des sociétés mères les sociétés qui ne détiennent que l'usufruit des titres dont elles perçoivent les produits, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

3. Aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ". Aux termes de l'article 14 de cette convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ". Une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens de ces stipulations, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi. Dès lors qu'une société qui détient l'usufruit de titres ne se trouve pas, au regard de l'objet de la loi, dans une situation analogue à celle d'une société qui détient la pleine propriété de titres, la cour n'a ni commis d'erreur de droit ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que les articles 145 et 216 du code général des impôts n'avaient pas pour effet d'instituer, au détriment des sociétés usufruitières, une discrimination prohibée par les stipulations précitées.

4. Il résulte de ce qui précède que la SA Cegas n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la SA Cegas est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SA Cegas et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 9ème ssjs
Numéro d'arrêt : 386200
Date de la décision : 16/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 mar. 2016, n° 386200
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Matt
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:386200.20160316
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