La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/03/2016 | FRANCE | N°383335

France | France, Conseil d'État, 3ème - 8ème ssr, 17 mars 2016, 383335


Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Versailles la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2001 et 2002, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0805374 du 28 décembre 2012, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 13VE00855 du 13 mai 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel que M. et Mme B...ont formé contre ce jugement.
r>Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août e...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Versailles la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2001 et 2002, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0805374 du 28 décembre 2012, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 13VE00855 du 13 mai 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel que M. et Mme B...ont formé contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août et 28 octobre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur la fortune, signée le 26 novembre 1996 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Romain Victor, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de M. et Mme B...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et MmeB..., de nationalité russe, ont fait l'objet, à compter du 28 janvier 2004, d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant, en matière d'impôt sur le revenu, sur les années 2001 et 2002 ; qu'après avoir été mis en demeure de souscrire des déclarations d'ensemble des revenus au titre de chacune de ces années, M. et Mme B...ont souscrit des déclarations portant la mention " néant " ; que, le 16 novembre 2004, le service vérificateur leur a adressé, sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, deux demandes pour qu'ils justifient, notamment, l'origine des crédits bancaires figurant sur deux comptes ouverts au nom de M. B...à Monaco ; que, par des propositions de rectification des 23 décembre 2004 et 11 mars 2005, l'administration a informé M. et Mme B... qu'elle considérait qu'ils avaient leur domicile fiscal en France au titre des années 2001 et 2002 et étaient passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus, de source française ou étrangère ; que les contribuables se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 13 mai 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'ils ont formé contre le jugement du 28 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis en conséquence de ces redressements ;

2. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française " ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles ;

3. Considérant qu'en se fondant sur la circonstance qu'au cours des années d'imposition en litige, M. et MmeB..., tous deux titulaires d'une carte de résident, étaient locataires d'un appartement situé à Neuilly-sur-Seine, régulièrement occupé eu égard aux consommations de gaz, d'électricité et de téléphone et dans lequel leur fils mineur, scolarisé à Neuilly-sur-Seine, résidait de manière permanente, pour en déduire que les contribuables avaient en France le centre de leurs intérêts familiaux, alors même que M. B...avait principalement séjourné hors de France en 2001 et 2002 et que Mme B...avait davantage résidé hors de France qu'en France en 2001, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune erreur de qualification juridique et n'a pas commis d'erreur de droit ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la convention signée le 26 novembre 1996 entre la France et la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur la fortune : " La présente Convention s'applique aux personnes qui sont des résidents d'un Etat contractant ou des deux Etats contractants " ; qu'aux termes de son article 4 : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège social, de son siège de direction, ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus de sources situées dans cet Etat ou pour la fortune qui y est située. 2. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne physique est un résident des deux Etats contractants, sa situation est réglée de la manière suivante : a) Cette personne est considérée comme un résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; b) Si l'Etat où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat où elle séjourne de façon habituelle ; c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans les deux Etats ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident de l'Etat contractant dont elle possède la nationalité (...) " ;

5. Considérant qu'après avoir relevé que M. et Mme B...disposaient d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, la cour a recherché, conformément aux stipulations du a) du 2 de l'article 4 de la convention fiscale franco-russe, avec lequel de ces Etats les contribuables avaient les liens personnels et économiques les plus étroits ; qu'en se fondant sur les circonstances que l'enfant mineur de M. et Mme B...demeurait en France au cours des années d'imposition en litige, dans l'appartement loué par la famille à Neuilly-sur-Seine, où il était scolarisé, que les intéressés détenaient tous deux des cartes de résident les autorisant à demeurer en France au cours de cette même période et qu'ils avaient reçu chacun, et de manière répétée, d'importantes sommes d'argent sur leur comptes bancaires français, en provenance d'un compte monégasque détenu par une société constituée au Costa Rica, dont M. B... était le président, tout en relevant qu'il n'était pas démontré que les activités économiques, militaires, politiques, sportives ou associatives que les contribuables déclaraient avoir en Russie, dont la nature précise et l'ampleur n'étaient au demeurant pas établies, leur auraient procuré des revenus, pour en déduire que M. et Mme B...devaient être regardés comme ayant eu, au titre des années 2001 et 2002, le centre de leurs intérêts vitaux en France, au sens du a) du 2 de l'article 4 de la convention franco-russe du 26 novembre 1966, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune erreur de qualification juridique et n'a pas commis d'erreur de droit ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. / A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. / Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. / Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A. / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 16 de ce livre, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet (...) des avoirs ou revenus d'avoirs à l'étranger. / (...) / Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent (...). / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) / Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent (...) " ; qu'il résulte, enfin, de l'article L. 69 du même livre que sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ;

7. Considérant qu'il résulte des termes mêmes des articles L. 12 et L. 16 du livre des procédures fiscales qu'au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle d'une personne physique au titre de l'impôt sur le revenu, l'administration peut adresser à celle-ci, quel que soit le domicile fiscal qu'elle a déclaré, des demandes de justifications portant, notamment, sur des avoirs ou revenus d'avoirs à l'étranger ; que l'administration n'est pas tenue d'établir préalablement que cette personne a son domicile fiscal en France, dès lors que le contrôle a notamment pour objet d'établir la domiciliation fiscale de l'intéressée et de vérifier l'existence éventuelle de revenus imposables en France et devant être déclarés à ce titre ; qu'il suit de là que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'était sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre de M. et Mme B...la circonstance que l'administration n'aurait pas établi, avant de leur adresser les demandes de justifications du 16 novembre 2014 portant sur les comptes bancaires monégasques de M.B..., qu'ils avaient leur domicile fiscal en France ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent ; que leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme B...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 3ème - 8ème ssr
Numéro d'arrêt : 383335
Date de la décision : 17/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-003 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal.


Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2016, n° 383335
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Romain Victor
Rapporteur public ?: M. Vincent Daumas
Avocat(s) : SCP DE NERVO, POUPET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:383335.20160317
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award