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15/04/2016 | FRANCE | N°384385

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 15 avril 2016, 384385


Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...B..., M. et Mme H... B...et M. et Mme D... F...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier de Montélimar à leur verser la somme de 363 478,60 euros en réparation des préjudices subis du fait du décès de Maëlys B...survenu le 17 décembre 2006 dans cet établissement. Par un jugement n° 1002761 du 25 janvier 2013, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le centre hospitalier à verser une indemnité de 45 569 euros à M. et Mme A...B...et une indemnité de 3 750 euros chacun à M. et Mme

H... B...et à M. et Mme D...F....

Par un arrêt n° 13LY00781 du 10 jui...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...B..., M. et Mme H... B...et M. et Mme D... F...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier de Montélimar à leur verser la somme de 363 478,60 euros en réparation des préjudices subis du fait du décès de Maëlys B...survenu le 17 décembre 2006 dans cet établissement. Par un jugement n° 1002761 du 25 janvier 2013, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le centre hospitalier à verser une indemnité de 45 569 euros à M. et Mme A...B...et une indemnité de 3 750 euros chacun à M. et Mme H... B...et à M. et Mme D...F....

Par un arrêt n° 13LY00781 du 10 juillet 2014, la cour administrative d'appel de Lyon, sur appel du centre hospitalier de Montélimar et sur appel incident des consorts B...etF..., a réformé ce jugement en ramenant à 25 379,65 euros l'indemnité due à M. et Mme A... B...et à 2 500 euros l'indemnité due à M. et Mme H...B...et à M. et Mme D...F....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 septembre et 10 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les consorts B... et F...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel incident ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Montélimar la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Manon Perrière, auditeur,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat des consorts B...et F...et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Montélimar ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MaëlysB..., alors âgée de 21 mois, a été admise au service des urgences du centre hospitalier de Montélimar le 17 décembre 2006 vers 4 heures 30 du matin en raison de vomissements et d'une hyperthermie, puis renvoyée chez elle après avoir été examinée par un interne qui a posé un diagnostic de gastro-entérite ; que, le même jour, après une perte de connaissance de plusieurs minutes, l'enfant a été amenée dans le même hôpital par le SAMU vers 14 heures et admise au service de pédiatrie avec une tension très basse, une fièvre toujours très forte et des taches sur le thorax ; que le pédiatre de garde, contacté par téléphone, a prescrit des examens par téléphone et n'a examiné l'enfant que vers 15 heures 50 ; qu'il a alors notamment prescrit la réalisation d'une ponction lombaire ; que l'enfant est décédée d'un arrêt cardiaque vers 17 heures au cours des soins qui lui ont été prodigués ; que les examens pratiqués et l'autopsie ont révélé que le décès était imputable à un purpura fulminans consécutif à une méningite ; que le tribunal administratif de Grenoble, saisi par les parents et grands-parents de la victime, a, par un jugement du 25 janvier 2013, retenu l'existence d'un retard fautif de diagnostic de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier, jugé que cette faute avait entraîné une perte de chance de 75 % d'éviter le décès et condamné le centre hospitalier à verser aux parents de la victime 45 569 euros et à chacun des grands-parents 3 750 euros ; que, saisie d'un appel du centre hospitalier et d'un appel incident des consorts B...etF..., la cour administrative d'appel de Lyon a également retenu un retard fautif de diagnostic ; qu'elle a toutefois estimé que ce retard était à l'origine d'une perte de chance de 50 % seulement et a ramené en conséquence les sommes dues par le centre hospitalier à 25 379,65 euros pour les parents de la victime et à 2 500 euros pour chacun des grands-parents ; que les consorts B...et F...se pourvoient en cassation contre cet arrêt ;

2. Considérant qu'en jugeant, d'une part, que les souffrances subies par Maëlys B...étaient imputables à l'infection dont elle était atteinte et ne pouvaient être regardées comme la conséquence du retard de diagnostic et, d'autre part, qu'il n'était pas établi, compte tenu de son très jeune âge et de la rapidité avec laquelle son état de santé s'était dégradé, que l'enfant ait éprouvé une douleur morale du fait de la conscience d'une espérance de vie réduite, la cour administrative d'appel a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ;

3. Mais considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les consorts B...et F...ne se bornaient pas à invoquer, à l'appui de leur action indemnitaire contre le centre hospitalier, un retard fautif de diagnostic ; que, tant en appel qu'en première instance, ils critiquaient en outre la réalisation d'une ponction lombaire en faisant valoir que cet examen était formellement contre-indiqué compte tenu de la pathologie de l'enfant et qu'il avait contribué à son décès ; que la circonstance que la cour retenait un retard fautif de diagnostic ne la dispensait pas de répondre à ce moyen en déterminant si la réalisation d'une ponction lombaire revêtait le caractère d'une faute distincte et de nature à aggraver les conséquences de la première erreur de diagnostic commise ; qu'ainsi, son arrêt est entaché d'une insuffisance de motivation qui justifie qu'il soit annulé en tant qu'il fixe le taux de perte de chance imputable aux fautes du centre hospitalier et le montant des indemnités allouées aux consorts B...etF... ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Montélimar la somme de 3 500 euros à verser aux consorts B...et F...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 10 juillet 2014 est annulé en tant qu'il fixe le taux de perte de chance imputable aux fautes du centre hospitalier et le montant des indemnités allouées aux consorts B...etF....

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Article 3 : Le centre hospitalier de Montélimar versera aux consorts B...et F...la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B..., à Mme C...B..., à M. H... B..., à Mme G...B..., à M. D...F..., à Mme E...F...et au centre hospitalier de Montélimar.

Copie en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 384385
Date de la décision : 15/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 2016, n° 384385
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Manon Perrière
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : LE PRADO ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:384385.20160415
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