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27/06/2016 | FRANCE | N°387590

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 27 juin 2016, 387590


Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de mettre à la charge de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) la somme globale de 1 170 796,40 euros en réparation des préjudices ayant résulté d'un accident médical dont elle a été victime. Par un jugement n°1002836 du 22 janvier 2013, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'ONIAM à lui verser la somme de 261 811,60 euros.

Par un arrêt n° 13MA01186 du 4 décembre 2014, la cou

r administrative d'appel de Marseille a, sur appel de l'ONIAM, annulé ce juge...

Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de mettre à la charge de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) la somme globale de 1 170 796,40 euros en réparation des préjudices ayant résulté d'un accident médical dont elle a été victime. Par un jugement n°1002836 du 22 janvier 2013, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'ONIAM à lui verser la somme de 261 811,60 euros.

Par un arrêt n° 13MA01186 du 4 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de l'ONIAM, annulé ce jugement et rejeté la demande de MmeA....

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 février et 4 mai 2015 et le 9 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de l'ONIAM ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Bobo, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de MmeA..., à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Montpellier ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... a subi quatre opérations neurochirurgicales réalisées entre le 22 septembre et le 1er novembre 2004 au centre hospitalier universitaire de Montpellier ; qu'elle s'est plainte dès le mois d'octobre 2004 d'une chute de sa perception visuelle et est désormais atteinte d'une cécité totale ; qu'un expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a indiqué que l'étiologie exacte de cette cécité, d'origine corticale, n'avait pu être déterminée mais a néanmoins conclu, après avoir écarté toutes les autres hypothèses, qu'elle avait été causée par l'une des interventions ; que, par un jugement du 22 janvier 2013, le tribunal administratif a estimé que Mme A...avait été victime d'un accident médical, dont il a mis la réparation à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de la solidarité nationale ; que Mme A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 décembre 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et rejeté sa demande indemnitaire ;

2. Considérant qu'aux termes du II de l'article L 1142-1 du code de la santé publique : "Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire (...) " ;

3. Considérant qu'en l'absence de certitudes médicales permettant d'affirmer ou d'exclure qu'un dommage corporel survenu au cours ou dans les suites d'un acte de soins est imputable à cet acte, il appartient au juge, saisi d'une demande indemnitaire sur le fondement des dispositions citées ci-dessus, de se fonder sur l'ensemble des éléments pertinents résultant de l'instruction pour déterminer si, dans les circonstances de l'affaire, cette imputabilité peut être retenue ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les troubles visuels de Mme A...sont apparus quelques jours après l'une des interventions de neurochirurgie qu'elle a subies de septembre à novembre 2004 ; que si l'expert n'a pu déterminer l'étiologie exacte de la cécité dont la patiente est demeurée atteinte, il a estimé qu'elle était imputable aux interventions en relevant son origine corticale, le bref délai entre les soins et l'apparition des troubles ainsi que l'absence d'antécédents, et en écartant les autres causes possibles ; qu'en jugeant, en dépit de ce faisceau d'indices concordants, que l'imputabilité de la cécité à un acte de soins ne pouvait être regardée comme établie, la cour administrative d'appel de Marseille a entaché son arrêt de dénaturation ; que, par suite, Mme A...est fondée à demander que cet arrêt soit annulé en tant qu'il annule le jugement du tribunal administratif de Montpellier et rejette ses conclusions indemnitaires ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros à verser à MmeA..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt du 4 décembre 2014 de la cour administrative d'appel de Marseille sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans la limite de la cassation ainsi prononcée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : L'ONIAM versera une somme de 3 000 euros à Mme B...A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par l'ONIAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Copie en sera adressée au centre hospitalier universitaire de Montpellier et à la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 387590
Date de la décision : 27/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2016, n° 387590
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Bobo
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP BORE, SALVE DE BRUNETON ; LE PRADO ; SCP SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:387590.20160627
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