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10/05/2017 | FRANCE | N°397502

France | France, Conseil d'État, 1ère - 6ème chambres réunies, 10 mai 2017, 397502


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 21 novembre 2014 par laquelle le directeur de l'agence Pôle emploi de Saint-Pierre a refusé de lui verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Par un jugement n° 1500746 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de La Réunion a annulé cette décision et enjoint à Pôle emploi Réunion de lui verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er septembre 2014, dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement.

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une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire rectificatif, e...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 21 novembre 2014 par laquelle le directeur de l'agence Pôle emploi de Saint-Pierre a refusé de lui verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Par un jugement n° 1500746 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de La Réunion a annulé cette décision et enjoint à Pôle emploi Réunion de lui verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er septembre 2014, dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement.

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire rectificatif, enregistrés les 29 février, 30 mai et 1er juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Pôle emploi demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 18 décembre 2015 ;

2°) de mettre à la charge de Mme B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code du travail applicable à Mayotte ;

- l'arrêté du 31 décembre 2012 portant agrément de l'accord national interprofessionnel du 26 octobre 2012 et de ses accords d'application numérotés 3, 5, 12, 14, 15 et 17 du 26 octobre 2012 relatifs à l'indemnisation du chômage à Mayotte ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Pacoud, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boullez, avocat de Pôle Emploi, et à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de MmeB....

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, aux termes de l'article R. 351-5-1 du code de justice administrative : " Lorsque le Conseil d'Etat est saisi de conclusions se rapportant à un litige qui ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, il est compétent, nonobstant les règles relatives aux voies de recours et à la répartition des compétences entre les juridictions administratives, pour se prononcer sur ces conclusions et décliner la compétence de la juridiction administrative ".

2. D'autre part, il résulte de l'article L. 5312-12 du code du travail que les litiges relatifs aux prestations dont le service est assuré par Pôle emploi pour le compte de l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce, de l'Etat ou du fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24 " sont soumis au régime contentieux qui leur était applicable antérieurement à la création de cette institution ". Avant la création de Pôle emploi, désormais chargé des missions jusque là dévolues aux associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Assédic), la juridiction judiciaire était seule compétente pour connaître des actions relatives aux prestations servies par les Assédic au titre du régime d'assurance chômage, hormis le cas où ce service était assuré aux termes d'une convention de gestion conclue avec un employeur public qui n'avait pas adhéré au régime d'assurance chômage et assurait lui-même la charge de ces prestations.

3. Il ressort des pièces du dossier que MmeB..., qui a été employée en qualité d'infirmière par le centre hospitalier de Mayotte en vertu de deux contrats à durée déterminée dont le second a pris fin le 31 août 2014, a quitté Mayotte en septembre 2014 afin de s'installer à La Réunion, où son époux avait été nommé en qualité de professeur des écoles. Inscrite sur la liste des demandeurs d'emploi à La Réunion dès le 1er septembre 2014, elle a sollicité le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi, qui lui a été successivement refusé par l'agence Pôle emploi de Saint-Pierre puis par le centre hospitalier de Mayotte. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision du directeur de l'agence Pôle emploi de Saint-Pierre du 21 novembre 2014 lui refusant le bénéfice de cette allocation.

4. Il résulte des dispositions des articles L. 327-36 et L. 327-37 du code du travail applicable à Mayotte qu'il appartient aux employeurs qui assurent la charge et la gestion de l'assurance chômage de servir les allocations d'assurance chômage auxquelles leurs agents ont droit en raison de l'activité qu'ils ont exercée auprès d'eux. En l'absence de toute disposition organisant, en cas d'inscription sur la liste des demandeurs d'emploi en dehors de Mayotte, le transfert des droits à indemnisation que les agents tiennent de la loi, les conditions de résidence et d'inscription comme demandeurs d'emploi à Mayotte, posées par l'article R. 327-1 du même code, ne leur sont pas légalement applicables.

5. Toutefois, l'action exercée par Mme B...à l'encontre de Pôle emploi ne pouvait porter, en l'absence de toute convention de gestion entre le centre hospitalier de Mayotte et Pôle emploi, que sur les droits qu'elle estimait détenir, en raison de son départ de Mayotte et de son installation à La Réunion, à l'égard de Pôle emploi. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 qu'un tel litige relève de la compétence de la juridiction judiciaire.

6. En conséquence, Pôle emploi est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de La Réunion qu'il attaque et la demande de Mme B...tendant à l'annulation de la décision de Pôle emploi Réunion du 21 novembre 2014 ne peut qu'être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Pôle emploi au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Pôle emploi, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 18 décembre 2015 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de La Réunion est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Les conclusions de Pôle emploi et de Mme B...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Pôle emploi et à Mme A...B....

Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.


Synthèse
Formation : 1ère - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 397502
Date de la décision : 10/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE - RÉGIME SOCIAL - MAYOTTE - EMPLOYEURS PUBLICS EN RÉGIME D'AUTO-ASSURANCE - OBLIGATION LÉGISLATIVE DE SERVIR DES ALLOCATIONS D'ASSURANCE CHÔMAGE AUX AGENTS AYANT EXERCÉ AUPRÈS D'EUX - EXISTENCE - TRANSFERT DES DROITS À INDEMNISATION EN CAS D'INSCRIPTION SUR LA LISTE DES DEMANDEURS D'EMPLOI EN DEHORS DE MAYOTTE - ABSENCE - CONSÉQUENCE - CONDITIONS RÉGLEMENTAIRES DE RÉSIDENCE ET D'INSCRIPTION COMME DEMANDEURS D'EMPLOI À MAYOTTE - CONDITIONS NON APPLICABLES.

46-01-05 Il résulte des dispositions des articles L. 327-36 et L. 327-37 du code du travail applicable à Mayotte qu'il appartient aux employeurs qui assurent la charge et la gestion de l'assurance chômage de servir les allocations d'assurance chômage auxquelles leurs agents ont droit en raison de l'activité qu'ils ont exercée auprès d'eux. En l'absence de toute disposition organisant, en cas d'inscription sur la liste des demandeurs d'emploi en dehors de Mayotte, le transfert des droits à indemnisation que les agents tiennent de la loi, les conditions de résidence et d'inscription comme demandeurs d'emploi à Mayotte, posées par l'article R. 327-1 du même code, ne leur sont pas légalement applicables.

TRAVAIL ET EMPLOI - POLITIQUES DE L'EMPLOI - INDEMNISATION DES TRAVAILLEURS PRIVÉS D'EMPLOI - MAYOTTE - EMPLOYEURS PUBLICS EN RÉGIME D'AUTO-ASSURANCE - OBLIGATION LÉGISLATIVE DE SERVIR DES ALLOCATIONS D'ASSURANCE CHÔMAGE AUX AGENTS AYANT EXERCÉ AUPRÈS D'EUX - EXISTENCE - TRANSFERT DES DROITS À INDEMNISATION EN CAS D'INSCRIPTION SUR LA LISTE DES DEMANDEURS D'EMPLOI EN DEHORS DE MAYOTTE - ABSENCE - CONSÉQUENCE - CONDITIONS RÉGLEMENTAIRES DE RÉSIDENCE ET D'INSCRIPTION COMME DEMANDEURS D'EMPLOI À MAYOTTE - CONDITIONS NON APPLICABLES.

66-10-02 Il résulte des dispositions des articles L. 327-36 et L. 327-37 du code du travail applicable à Mayotte qu'il appartient aux employeurs qui assurent la charge et la gestion de l'assurance chômage de servir les allocations d'assurance chômage auxquelles leurs agents ont droit en raison de l'activité qu'ils ont exercée auprès d'eux. En l'absence de toute disposition organisant, en cas d'inscription sur la liste des demandeurs d'emploi en dehors de Mayotte, le transfert des droits à indemnisation que les agents tiennent de la loi, les conditions de résidence et d'inscription comme demandeurs d'emploi à Mayotte, posées par l'article R. 327-1 du même code, ne leur sont pas légalement applicables.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 mai. 2017, n° 397502
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Pacoud
Rapporteur public ?: M. Rémi Decout-Paolini
Avocat(s) : SCP BOULLEZ ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:397502.20170510
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