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12/05/2017 | FRANCE | N°398300

France | France, Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 12 mai 2017, 398300


Vu la procédure suivante :

Le 29 avril 2010, M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999 à 2002 ainsi que des majorations correspondantes. Par un jugement n° 1002202 du 30 décembre 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14NC01106 du 26 novembre 2015, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire compl

émentaire, enregistrés les 29 mars et 29 juin 2016 au secrétariat du contentieux d...

Vu la procédure suivante :

Le 29 avril 2010, M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1999 à 2002 ainsi que des majorations correspondantes. Par un jugement n° 1002202 du 30 décembre 2013, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14NC01106 du 26 novembre 2015, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 29 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- la décision n° 2010-70 QPC du Conseil constitutionnel du 26 novembre 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Christophe Pourreau, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de M. B...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... B..., qui exerce l'activité d'agent commercial, et son épouse sont les uniques salariés et détiennent chacun 25% des parts de la société Recherche Médicale et Distribution (RMD), établie au Luxembourg. Les 15 novembre 1998 et 1er janvier 2000, la société RMD et la société Guidant, établie en France, ont conclu des contrats par lesquels la seconde accordait à la première un mandat exclusif de commercialisation de matériels médicaux, essentiellement sur le territoire français. A la suite de l'exercice de son droit de communication et d'un contrôle sur pièces, l'administration a estimé que les sommes facturées par la société RMD à la société Guidant en rémunération des prestations d'agent commercial rendues en France par M. B... avaient le caractère de traitements et salaires, imposables en France sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts, et rectifié en conséquence les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. B... au titre des années 1999 à 2002. Par un arrêt du 26 novembre 2015, contre lequel M. B... se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'il a formé contre le jugement du 30 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande de décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti ainsi que des pénalités correspondantes.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 155 A du code général des impôts : " I. Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de Franceen rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : / - soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; / - soit, lorsqu'elles n'établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; / - soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie hors de Franceoù elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l'article 238 A. / II. Les règles prévues au I ci-dessus sont également applicables aux personnes domiciliées hors de France pour les services rendus en France (...) ".

3. Les prestations dont la rémunération est susceptible d'être imposée, en application de l'article 155 A du code général des impôts, entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de Francene trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte. La circonstance que la personne qui a facturé la prestation a en France un établissement stable et aurait pu être, elle-même, imposée à raison de la rémunération en cause, sur le fondement des règles de droit commun de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, ne fait pas obstacle à ce que l'administration choisisse, de manière alternative, d'imposer la personne qui a, pour l'essentiel, rendu le service. Dans ce cas, la personne qui a un établissement stable en France et qui a facturé la prestation ne saurait être imposée au titre de la rémunération qu'elle a perçue sur le fondement des règles de droit commun de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.

4. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait commis une erreur de droit en jugeant que les sommes facturées par la société RMD à la société Guidant en rémunération des services rendus par M. B... étaient imposables entre les mains de ce dernier sur le fondement de l'article 155 A du code général des impôts, sans rechercher au préalable si ces sommes auraient pu être imposées entre les mains de la société RMD selon les règles fiscales de droit commun doit être écarté.

5. En deuxième lieu, en jugeant que M. B... était à la fois cofondateur, actionnaire, administrateur délégué et, avec son épouse, le seul salarié de la société RMD et qu'il engageait la société par sa seule signature, pour en déduire qu'il devait être regardé comme contrôlant la société RMD, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits qui n'est pas entachée de dénaturation et a suffisamment motivé son arrêt.

6. En troisième lieu, en jugeant que les contrats signés entre les sociétés RMD et Guidant fixaient le périmètre d'intervention de la société RMD, les hôpitaux et cliniques à démarcher, la liste des matériels médicaux à proposer et les modalités de calcul et de paiement des commissions et comportaient des clauses de non concurrence, pour en déduire que M. B... se trouvait dans un lien de subordination vis-à-vis de la société Guidant et que les sommes en litige étaient imposables dans la catégorie des traitements et salaires, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits qui n'est pas entachée de dénaturation.

7. En quatrième lieu, en jugeant que M. B... n'établissait pas, par les documents qu'il produit, avoir été effectivement imposé au Luxembourg au titre des sommes perçues par la société RMD en rémunération des services rendus à la société Guidant, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits qui n'est pas entachée de dénaturation et a suffisamment répondu au moyen tiré de ce qu'il aurait été doublement imposé, en France et au Luxembourg, sur les revenus perçus par la société RMD.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. Par suite, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B...et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 3ème - 8ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 398300
Date de la décision : 12/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - TEXTES FISCAUX - TEXTE APPLICABLE (DANS LE TEMPS ET DANS L'ESPACE) - PRESTATION CORRESPONDANT À UN SERVICE RENDU POUR L'ESSENTIEL PAR UNE PERSONNE ÉTABLIE EN FRANCE ET NE TROUVANT AUCUNE CONTREPARTIE RÉELLE DANS UNE INTERVENTION PROPRE D'UNE PERSONNE DOMICILIÉE OU ÉTABLIE HORS DE FRANCE - CAS OÙ LA PERSONNE AYANT FACTURÉ LA PRESTATION A EN FRANCE UN ÉTABLISSEMENT STABLE - FACULTÉ POUR L'ADMINISTRATION DE CHOISIR ENTRE L'IMPOSITION - SUR LE FONDEMENT DES RÈGLES DE DROIT COMMUN DE L'IR OU DE L'IS - DE LA PERSONNE AYANT FACTURÉ LA PRESTATION ET L'IMPOSITION - SUR LE FONDEMENT DE L'ART - 155 A DU CGI - DE LA PERSONNE AYANT POUR L'ESSENTIEL RENDU LE SERVICE - EXISTENCE.

19-01-01-02 Les prestations dont la rémunération est susceptible d'être imposée, en application de l'article 155 A du code général des impôts (CGI), entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.... ,,La circonstance que la personne qui a facturé la prestation a en France un établissement stable et aurait pu être, elle-même, imposée à raison de la rémunération en cause, sur le fondement des règles de droit commun de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, ne fait pas obstacle à ce que l'administration choisisse, de manière alternative, d'imposer la personne qui a, pour l'essentiel, rendu le service. Dans ce cas, la personne qui a un établissement stable en France et qui a facturé la prestation ne saurait être imposée au titre de la rémunération qu'elle a perçue sur le fondement des règles de droit commun de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - QUESTIONS COMMUNES - PERSONNES IMPOSABLES - TERRITORIALITÉ - SOMMES PERÇUES PAR UNE PERSONNE DOMICILIÉE OU ÉTABLIE HORS DE FRANCE EN RÉMUNÉRATION DE SERVICES RENDUS PAR UNE OU PLUSIEURS PERSONNES DOMICILIÉES OU ÉTABLIES EN FRANCE - IMPOSITION AU NOM DES PERSONNES DOMICILIÉES OU ÉTABLIES EN FRANCE EN VERTU DE L'ARTICLE 155 A DU CGI - 1) PRESTATIONS CONCERNÉES - PRESTATIONS CORRESPONDANT À UN SERVICE RENDU POUR L'ESSENTIEL PAR LA PERSONNE ÉTABLIE EN FRANCE ET POUR LEQUEL LA FACTURATION PAR UNE PERSONNE DOMICILIÉE OU ÉTABLIE HORS DE FRANCE NE TROUVE AUCUNE CONTREPARTIE RÉELLE DANS UNE INTERVENTION PROPRE DE CETTE DERNIÈRE [RJ1] - 2) CAS OÙ LA PERSONNE AYANT FACTURÉ LA PRESTATION A EN FRANCE UN ÉTABLISSEMENT STABLE - FACULTÉ POUR L'ADMINISTRATION DE CHOISIR ENTRE L'IMPOSITION DE LA PERSONNE AYANT FACTURÉ LA PRESTATION ET L'IMPOSITION DE LA PERSONNE AYANT POUR L'ESSENTIEL RENDU LE SERVICE - EXISTENCE.

19-04-01-01-02 1) Les prestations dont la rémunération est susceptible d'être imposée, en application de l'article 155 A du code général des impôts (CGI), entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l'essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée ou établie hors de France ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.... ,,2) La circonstance que la personne qui a facturé la prestation a en France un établissement stable et aurait pu être, elle-même, imposée à raison de la rémunération en cause, sur le fondement des règles de droit commun de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, ne fait pas obstacle à ce que l'administration choisisse, de manière alternative, d'imposer la personne qui a, pour l'essentiel, rendu le service. Dans ce cas, la personne qui a un établissement stable en France et qui a facturé la prestation ne saurait être imposée au titre de la rémunération qu'elle a perçue sur le fondement des règles de droit commun de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 20 mars 2013, M. et Mme,, n° 346642, T. pp. 485-527-546-556 ;

CE, 4 décembre 2013, M.,, n° 348136, T. pp. 488-527-578.


Publications
Proposition de citation : CE, 12 mai. 2017, n° 398300
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Christophe Pourreau
Rapporteur public ?: M. Vincent Daumas
Avocat(s) : SCP CELICE, SOLTNER, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:398300.20170512
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