La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/08/2017 | FRANCE | N°399315

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 10 août 2017, 399315


Vu la procédure suivante :

La société Batipro Logements Intermédiaires (BLI) a demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties restant en litige auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 à 2011 pour les locaux d'habitation de la résidence Presqu'île au Port (La Réunion). Par un jugement n° 1301441 du 28 janvier 2016, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 avril et 29 juillet 2016 au secrétar

iat du contentieux du Conseil d'Etat, la société BLI demande au Conseil d'Etat :

...

Vu la procédure suivante :

La société Batipro Logements Intermédiaires (BLI) a demandé au tribunal administratif de La Réunion de prononcer la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties restant en litige auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 à 2011 pour les locaux d'habitation de la résidence Presqu'île au Port (La Réunion). Par un jugement n° 1301441 du 28 janvier 2016, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 avril et 29 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société BLI demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision n° 2015-525 QPC du Conseil constitutionnel du 2 mars 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Uher, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lévis, avocat de la société Batipro Logements Intermédiaires.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société BLI est propriétaire des appartements de la résidence Presqu'île dans la commune du Port (La Réunion). Au titre des années 2008 à 2011, elle a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour ces biens sur la base d'une valeur locative cadastrale déterminée selon la méthode par comparaison prévue à 1'article 1496 du code général des impôts. Elle a contesté ces impositions par deux réclamations contentieuses en date des 26 octobre et 30 décembre 2011, auxquelles l'administration a fait partiellement droit. La société BLI se pourvoit en cassation contre un jugement du 28 janvier 2016, par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions restant à sa charge.

2. Aux termes de l'article 1496 précité : " La valeur locative des locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice soit d'une activité salariée à domicile, soit d'une activité professionnelle non commerciale au sens du 1 de l'article 92 est déterminée par comparaison avec celle de locaux de référence choisis, dans la commune, pour chaque nature et catégorie de locaux. / II. La valeur locative des locaux de référence est déterminée d'après un tarif fixé, par commune ou secteur de commune, pour chaque nature et catégorie de locaux, en fonction du loyer des locaux loués librement à des conditions de prix normales et de manière à assurer l'homogénéité des évaluations dans la commune et de commune à commune. / Le tarif est appliqué à la surface pondérée du local de référence, déterminée en affectant la surface réelle de correctifs fixés par décret et destinés à tenir compte de la nature des différentes parties du local, ainsi que de sa situation, de son importance, de son état et de son équipement (...) ".

3. Pour faire application de cette méthode en l'espèce, l'administration a pris en compte le local de référence n° 31 inscrit au procès-verbal de la commune du Port en 1976. Pour écarter le moyen tiré de ce que ce local, sur la base duquel avait été déterminée la valeur locative des appartements de la résidence Presqu'île, ne pouvait constituer une référence valide du fait de la substantielle modification dont il avait fait l'objet en 2004, le tribunal administratif de La Réunion s'est fondé sur les dispositions du paragraphe III de l'article 32 de la loi du 29 décembre 2014 aux termes desquelles : " Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, pour la détermination de la valeur locative des locaux mentionnés à l'article 1496 du code général des impôts et de ceux évalués en application du 2° de l'article 1498 du même code, sont validées les évaluations réalisées avant le 1er janvier 2015 en tant que leur légalité serait contestée au motif que, selon le cas, le local de référence ou le local-type ayant servi de terme de comparaison, soit directement, soit indirectement, a été détruit ou a changé de consistance, d'affectation ou de caractéristiques physiques ".

4. Toutefois, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution ces dispositions dans sa décision n° 2015-525 QPC en date du 2 mars 2016, dont le point 12 précise que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la date de la publication de la décision et qu'elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites à cette date et non jugées définitivement. Doivent être entendues comme de telles instances, pour l'application des décisions du Conseil constitutionnel qui déterminent les modalités d'application dans le temps des déclarations d'inconstitutionnalité qu'il prononce, celles qui n'ont pas donné lieu à des décisions devenus irrévocables. Il s'ensuit que la société requérante peut se prévaloir, dans la présence instance, y compris devant le Conseil d'Etat, juge de cassation, de la déclaration d'inconstitutionnalité prononcée par la décision du Conseil constitutionnel du 2 mars 2016.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que la société BLI est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société BLI de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 28 janvier 2016 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de La Réunion.

Article 3 : L'Etat versera à la société BLI une somme de 1 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société BLI et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 399315
Date de la décision : 10/08/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 10 aoû. 2017, n° 399315
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Uher
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:399315.20170810
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award