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19/03/2018 | FRANCE | N°402414

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 19 mars 2018, 402414


Vu la procédure suivante :

La société anonyme (SA) Le Renouveau a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1408556 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA02102 du 15 juin 2016, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Le Renouveau contre ce jugement.

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ar un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 12 août et le 8 novemb...

Vu la procédure suivante :

La société anonyme (SA) Le Renouveau a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1408556 du 17 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15PA02102 du 15 juin 2016, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Le Renouveau contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 12 août et le 8 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Le Renouveau demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Monteagle, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la société Le Renouveau ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par trois actes de vente du 27 avril 2007, la société anonyme Le Renouveau a acquis auprès de trois cédants non assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée un terrain à bâtir situé à Montargis qu'elle a revendu, par un acte de vente du 6 juin 2009, à la SCI Les Jardins de Montargis. A l'issue d'une vérification de comptabilité, un rappel de taxe sur la valeur ajoutée a été mis à sa charge, à raison de l'opération de revente, pour un montant de 127 907 euros correspondant à la différence entre la taxe collectée, figurant dans l'acte et calculée sur la totalité du prix de vente, et la taxe déclarée, calculée par la société sur la marge en application des dispositions combinées des articles 257, 6° et 268 du code général des impôts. Elle a demandé la décharge, entre autres, de ce rappel de taxe au tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande par un jugement en date du 17 mars 2015. Elle a relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Paris qui a rejeté sa requête par un arrêt du 15 juin 2016 contre lequel elle se pourvoit en cassation. Eu égard au moyens qu'elle invoque, la société doit être regardée comme ne demandant l'annulation de l'arrêt qu'en tant qu'il s'est prononcé sur le rappel précité.

2. D'une part, aux termes des dispositions de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) / 6° Sous réserve du 7° : a) Les opérations qui portent sur des immeubles (...) et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux ; (...) / 7° Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles. / Ces opérations sont imposables même lorsqu'elles revêtent un caractère civil. / 1. Sont notamment visés : / a) Les ventes (...) de terrains à bâtir (...) ; / Ces dispositions ne sont pas applicables aux terrains acquis par des personnes physiques en vue de la construction d'immeubles que ces personnes affectent à un usage d'habitation. (...) ". Aux termes de l'article 268 du même code dans sa rédaction applicable au présent litige : " En ce qui concerne les opérations visées au 6° de l'article 257, la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par la différence entre : a. D'une part, le prix exprimé et les charges qui viennent s'y ajouter, ou la valeur vénale du bien si elle est supérieure au prix majoré des charges ; b. D'autre par (...) les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du bien ; (...) ". Aux termes du 3° de l'article 285 : " Pour les opérations visées au 7° de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est due : / ... 3° Par l'acquéreur, la société bénéficiaire de l'apport, ou le débiteur de l'indemnité, lorsque la mutation ou l'apport porte sur un immeuble qui, antérieurement à ladite mutation ou audit apport, n'était pas placé dans le champ d'application du 7° de l'article 257 ".

3. D'autre part, aux termes du 2 de la directive du 28 novembre 2006 susvisée : " 1. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les opérations suivantes : a) les livraisons de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d'un Etat membre par un assujetti en tant que tel (...) ". Aux termes du 1 de son article 9 : " Est considéré comme "assujetti" quiconque exerce, d'une façon indépendante et quel qu'en soit le lieu, une activité économique, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité. ... Est en particulier considérée comme activité économique, l'exploitation d'un bien corporel ou incorporel en vue d'en tirer des recettes ayant un caractère de permanence". Aux termes de son article 12 : " 1. Les Etats membres peuvent considérer comme assujetti quiconque effectue, à titre occasionnel, une opération relevant des activités visées à l'article 9, paragraphe 1, deuxième alinéa, et notamment une seule des opérations suivantes : (...) b) la livraison d'un terrain à bâtir. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en appel, la société requérante avait soutenu, à l'appui de son argumentation tirée du 3° de l'article 285 du code général des impôts et selon laquelle c'est l'acquéreur du terrain qu'elle a revendu en 2009 qui aurait dû s'acquitter de la taxe litigieuse puisque l'acquisition de 2007 n'aurait pas dû être placée dans le champ du 7° de l'article 257, d'une part, que le législateur n'avait pas intégré en droit interne la possibilité offerte par l'article 12 de la directive 2006/112/CE de considérer comme assujetti quiconque effectue, à titre occasionnel, la livraison d'un terrain à bâtir et, d'autre part, qu'à supposer que tel ait été le cas, il ne saurait avoir assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée une vente de terrain à bâtir ne constituant pas une opération commerciale. En s'abstenant de répondre à ces moyens, qui n'étaient pas inopérants, la cour a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Le Renouveau est fondée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur ses autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il s'est prononcé sur la taxe sur la valeur ajoutée immobilière. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 15 juin 2016 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur la taxe sur la valeur ajoutée immobilière.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la société Le Renouveau au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Le Renouveau et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 402414
Date de la décision : 19/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 mar. 2018, n° 402414
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Monteagle
Rapporteur public ?: Mme Emmanuelle Cortot-Boucher
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:402414.20180319
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