La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/12/2021 | FRANCE | N°451110

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 30 décembre 2021, 451110


Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a saisi le tribunal administratif de Toulon, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 14 décembre 2020 rejetant le compte de campagne de Mme C... A..., candidate tête de liste aux élections municipales des 15 mars et 28 juin 2020 dans la commune de Sainte-Maxime (Var). Par un jugement n° 2003597 du 26 février 2021, le tribunal administratif de Toulon a décidé que la CNCCFP avait rejeté à bon droit le compte de campagne de Mme A..

., déclaré celle-ci inéligible pour une durée de six mois et démi...

Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a saisi le tribunal administratif de Toulon, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 14 décembre 2020 rejetant le compte de campagne de Mme C... A..., candidate tête de liste aux élections municipales des 15 mars et 28 juin 2020 dans la commune de Sainte-Maxime (Var). Par un jugement n° 2003597 du 26 février 2021, le tribunal administratif de Toulon a décidé que la CNCCFP avait rejeté à bon droit le compte de campagne de Mme A..., déclaré celle-ci inéligible pour une durée de six mois et démissionnaire d'office de ses mandats de conseillère municipale et communautaire, enfin proclamé en remplacement de celle-ci, Mme B... G... élue au conseil municipal de Sainte-Maxime et Mme I... élue au conseil communautaire de la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez.

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 mars et 26 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de la CNCCFP la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Barbat, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A... était candidate tête de liste aux élections municipales et communautaires des 15 mars et 28 juin 2020 derniers dans la commune de Sainte-Maxime (Var). Elle a été élue conseillère municipale de cette commune et conseillère communautaire de la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez. Par une décision du 14 décembre 2020, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a rejeté son compte de campagne au motif qu'elle avait dépassé le plafond des dépenses autorisées pour cette élection tel qu'il résultait des dispositions de l'article L. 52-11 du code électoral et a saisi le tribunal administratif de Toulon de cette décision, en application de l'article L. 52-15 du même code. Mme A... fait appel du jugement du 26 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulon a décidé que la CNCCFP avait rejeté à bon droit son compte de campagne, l'a déclarée inéligible pour une durée de six mois et démissionnaire d'office de ses mandats de conseillère municipale et communautaire et a proclamé élues à sa place Mme B... G... au conseil municipal de Sainte-Maxime et Mme I... au conseil communautaire de la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez.

2. Aux termes de l'article L. 52-11 du code électoral : " Pour les élections auxquelles l'article L. 52-4 est applicable, il est institué un plafond des dépenses électorales, autres que les dépenses de propagande directement prises en charge par l'Etat, exposées par chaque candidat ou chaque liste de candidats, ou pour leur compte, au cours de la période mentionnée au même article. (...) ". Aux termes de l'article L. 52-15 du même code : " La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. (...) / Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection ". Aux termes de l'article L. 118-3 du même code : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : (...) / 2° Le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales ; (...) / (...) L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. (...) ".

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. D'une part, il résulte de l'instruction que la minute du jugement attaqué comporte les signatures prévues à l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Dès lors, le moyen tiré de ce que ce jugement serait irrégulier faute de comporter ces signatures doit être écarté.

4. D'autre part, pour déclarer Mme A... inéligible sur le fondement des dispositions de l'article L. 118-3 du code électoral citées ci-dessus, le tribunal administratif de Toulon, qui n'a imputé à celle-ci aucune volonté de fraude, a constaté dans les motifs de son jugement l'importance du dépassement du plafond des dépenses de campagne commis par Mme A..., relevé qu'en raison de l'accessibilité au public du montant du plafond des dépenses, présent sur le site internet de la préfecture du Var, Mme A... ne pouvait ignorer cette information et retenu que Mme A... avait méconnu, de ce fait, la règle fixée par l'article L. 52-11 du code électoral sans que sa bonne foi puisse être reconnue, et qu'en raison de l'ampleur du dépassement du plafond fixé, cette méconnaissance constituait un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales au sens de l'article L. 118-3 du code électoral. En statuant ainsi, le tribunal a suffisamment motivé son jugement.

Sur l'inéligibilité de Mme A... :

5. Pour déclarer Mme A... inéligible pour une durée de six mois, le tribunal administratif a, contrairement à ce que soutient Mme A..., recherché, premièrement, si le dépassement du plafond des dépenses de campagne constituait une fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales et, deuxièmement, si ce dépassement, qui ne relevait d'aucune fraude, constituait ou non, eu égard à son importance, un tel manquement. Ainsi, son jugement n'est entaché d'aucune erreur de droit.

6. Il résulte de l'instruction que le plafond des dépenses de campagne pour les listes présentes au premier tour de l'élection municipale de Sainte Maxime du 15 mars 2020 était fixé à 20 961 euros. Les dépenses effectuées par Mme A... s'élèvent pour ce premier tour à 23 536 euros, soit un dépassement de 2 575 euros représentant plus de 10 % du plafond. Ainsi, le compte de campagne de Mme A... fait apparaître un important dépassement du plafond des dépenses de campagne dans le cadre de l'élection à laquelle elle se présentait. Si, pour justifier le manquement à cette règle, Mme A... affirme avoir ignoré le montant de ce plafond, elle ne saurait se prévaloir de cette ignorance s'agissant d'un montant qui figurait notamment sur le site internet de la préfecture. Dans ces conditions, le manquement aux règles de financement des campagnes électorales commis par Mme A... était, comme l'a jugé le tribunal administratif, d'une particulière gravité au sens des dispositions de l'article L. 118-3 du code électoral.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon, par l'article 1er du jugement attaqué, a jugé que son compte de campagne avait été rejeté à bon droit par la CNCCFP, par son article 2, l'a déclarée inéligible aux fonctions de conseillère municipale et communautaire pour une durée de six mois et, par l'article 3, l'a déclarée démissionnaire d'office de ses mandats de conseillère municipale et communautaire.

Sur la proclamation de l'élection de Mme G... au conseil municipal de Sainte-Maxime en remplacement de Mme A... :

8. D'une part, aux termes de l'article L. 270 du code électoral : " Le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller municipal élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit. La constatation, par la juridiction administrative, de l'inéligibilité d'un ou plusieurs candidats n'entraîne l'annulation de l'élection que du ou des élus inéligibles. La juridiction saisie proclame en conséquence l'élection du ou des suivants de liste. (...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 2121-4 du code général des collectivités territoriales : " Les démissions des membres du conseil municipal sont adressées au maire. / La démission est définitive dès sa réception par le maire, qui en informe immédiatement le représentant de l'Etat dans le département " ;

9. Mme A... demande l'annulation du jugement, en tant qu'à l'article 4 de ce jugement le tribunal administratif, après l'avoir déclarée démissionnaire d'office du conseil municipal de Sainte-Maxime, a déclaré Mme B... G... élue à sa place, alors que cette dernière, par un courrier du 13 août 2020 adressé au maire de Sainte-Maxime, a indiqué ne pas vouloir siéger au conseil municipal. Il résulte en effet de l'instruction que Mme G... devant être regardée comme démissionnaire, c'est Mme D... E... qui doit être proclamée élue à sa place au conseil municipal de Sainte-Maxime.

10 Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle, en tout état de cause, à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la CNCCFP qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les conclusions de la requête de Mme A... dirigées contre les articles 1er, 2 et 3 du jugement du 26 février 2021 du tribunal administratif de Toulon sont rejetées.

Article 2 : L'article 4 de ce jugement est annulé en tant qu'il proclame Mme G... élue au conseil municipal de Sainte-Maxime. Mme D... E... est proclamée élue à sa place.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par Mme A... est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme C... A..., à Mme B... G..., à Mme D... E..., à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et au ministre de l'intérieur.

Délibéré à l'issue de la séance du 2 décembre 2021 où siégeaient : M. Guillaume Goulard, président de chambre, présidant ; M. Christian Fournier, conseiller d'Etat et M. Philippe Barbat, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 30 décembre 2021.

Le Président :

Signé : M. Guillaume Goulard

Le rapporteur :

Signé : M. Philippe Barbat

La secrétaire :

Signé : Mme F... H...


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 451110
Date de la décision : 30/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2021, n° 451110
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Barbat
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : CABINET ROUSSEAU ET TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:451110.20211230
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award