La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/02/2022 | FRANCE | N°449399

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 11 février 2022, 449399


Vu la procédure suivante :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, en premier lieu d'annuler, d'une part, la décision du 14 septembre 2017 par laquelle la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais a mis à sa charge un indu de revenu de solidarité active et de prime exceptionnelle de fin d'année pour un montant total de 10 240,42 euros pour la période du 1er mai 2014 au 29 février 2016 et la décision implicite rejetant son recours gracieux, d'autre part, la décision du 29 juin 2016 par laquelle la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais a mis

fin à ses droits au revenu de solidarité active et, en second l...

Vu la procédure suivante :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, en premier lieu d'annuler, d'une part, la décision du 14 septembre 2017 par laquelle la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais a mis à sa charge un indu de revenu de solidarité active et de prime exceptionnelle de fin d'année pour un montant total de 10 240,42 euros pour la période du 1er mai 2014 au 29 février 2016 et la décision implicite rejetant son recours gracieux, d'autre part, la décision du 29 juin 2016 par laquelle la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais a mis fin à ses droits au revenu de solidarité active et, en second lieu, d'enjoindre à la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais, à l'Etat et au département du Pas-de-Calais, d'une part, de lui rembourser les sommes retenues dans le cadre du recouvrement de cet indu, d'autre part, de lui ouvrir rétroactivement et de liquider ses droits au revenu de solidarité active et à la prime exceptionnelle de fin d'année, dans un délai de deux mois. Par un jugement n° 1804716 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 14 septembre 2017 en tant qu'elle notifiait à M. C... un indu de prime exceptionnelle de fin d'année au titre des années 2014 et 2015, enjoint à la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais de restituer les sommes retenues sur le fondement de la décision annulée si l'administration ne prenait pas, dans un délai de deux mois à compter de la notification de son jugement une nouvelle décision de récupération d'indu et rejeté le surplus des conclusion de sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février et 27 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande de première instance ;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à au surplus des conclusions de sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge du département du Pas-de-Calais, de la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais et de l'Etat la somme de 3 000 euros, à verser à la SCP Delamarre, Jéhannin, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Damien Pons, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. C... et à la SARL Le Prado, Gilbert, avocat du département du Pas-de-Calais;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la caisse d'allocations familiales du Pas-de-Calais a mis fin aux droits de M. C... au revenu de solidarité active par une décision du 29 juin 2016 et qu'à la suite d'un contrôle administratif de sa situation ayant révélé l'existence de revenus non déclarés, issus de placements financiers, elle a mis à sa charge, par une décision du 14 septembre 2017, un indu de revenu de solidarité active et de prime exceptionnelle de fin d'année d'un montant de 10 240,42 euros au titre de la période allant du 1er mai 2014 au 29 février 2016. M. C... a demandé au tribunal administratif de Lille de le rétablir dans ses droits au revenu de solidarité active et à la prime exceptionnelle de fin d'année et d'annuler ces indus. Par un jugement du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a seulement fait droit à sa demande d'annulation de l'indu mis à sa charge au titre de la prime exceptionnelle de fin d'année. M. C... se pourvoit en cassation contre ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit au surplus des conclusions de sa demande de première instance.

2. Aux termes de l'article L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles : "(...) L'ensemble des ressources du foyer, y compris celles qui sont mentionnées à l'article L. 132-1, est pris en compte pour le calcul du revenu de solidarité active, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine notamment : (...) 2° Les modalités d'évaluation des ressources (...) ". L'article L. 132-1 de ce code dispose que : " Il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources des postulants à l'aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. (...) ". L'article R. 132-1 du même code prévoit, enfin, que : " Pour l'appréciation des ressources des postulants prévue à l'article L. 132-1, les biens non productifs de revenu, à l'exclusion de ceux constituant l'habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s'il s'agit d'immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s'il s'agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux ".

3. Il résulte de ces dispositions que seules peuvent être évaluées sur la base forfaitaire prévue par les articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de l'action sociale et des familles les ressources que l'allocataire est supposé pouvoir retirer de biens non productifs de revenu. Par suite, si les capitaux dont il dispose ont fait l'objet de placements productifs de revenus, seuls ces derniers peuvent être pris en compte, quand bien même le taux d'intérêt de ces placements serait inférieur au taux de 3 % prévu par l'article R. 132-1. La circonstance que l'allocataire n'aurait pas spontanément déclaré ces revenus est sans incidence sur l'application de ces dispositions.

4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Lille que M. C... faisait valoir, au soutien de sa contestation de l'indu mis à sa charge, que ses ressources avaient été calculées de façon erronée en ce que les revenus que lui procuraient certains comptes et livrets d'épargne avaient été appréciés en appliquant au montant des capitaux le taux forfaitaire de 3 %, au lieu que soient retenus les intérêts réellement produits par ces placements, productifs de revenus. Il résulte des termes de son jugement que le tribunal administratif de de Lille n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant. Il suit de là que M. C... est fondé, pour ce motif et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, qui viennent tous au soutien de sa contestation du jugement en tant qu'il statue sur l'indu, à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'indu de revenu de solidarité active mis à sa charge.

5. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge du département du Pas-de Calais une somme de 1 500 euros à verser à cette société au titre de ces dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 22 septembre 2020 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. C... relatives à l'indu de revenu de solidarité active mis à sa charge.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Lille dans cette mesure.

Article 3 : Le département du Pas-de-Calais versera à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. C..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. C... est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. D... C... et au département du Pas-de-Calais.

Copie en sera adressée au ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré à l'issue de la séance du 14 janvier 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et M. Damien Pons, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 11 février 2022.

La présidente:

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

Le rapporteur

Signé : M. Damien Pons

La secrétaire:

Signé : Mme A... B...


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 449399
Date de la décision : 11/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 fév. 2022, n° 449399
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Damien Pons
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP DELAMARRE, JEHANNIN ; SARL LE PRADO – GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:449399.20220211
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award