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27/02/2024 | FRANCE | N°459519

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 27 février 2024, 459519


Vu la procédure suivante :



La société Bruno Bâtiments a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 mars 2017 par lequel le maire de Sainte-Cécile-les-Vignes (Vaucluse) a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la réalisation d'un ensemble commercial d'une surface de vente de 971 m², ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement n° 1702365 du 21 mai 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.



Par un arrêt n° 19M

A03307 du 14 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel fo...

Vu la procédure suivante :

La société Bruno Bâtiments a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 mars 2017 par lequel le maire de Sainte-Cécile-les-Vignes (Vaucluse) a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la réalisation d'un ensemble commercial d'une surface de vente de 971 m², ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement n° 1702365 du 21 mai 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 19MA03307 du 14 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par la société Bruno Bâtiments contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 15 décembre 2021 et les 15 mars et 26 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Bruno Bâtiments demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la société Bruno Bâtiments et à la Sarl Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat de la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le 1er juillet 2016, la société Bruno Bâtiments a déposé une demande de permis de construire pour l'édification d'un projet de zone d'activités sur le territoire de la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes, ce projet comportant un bâtiment commercial, des boutiques et services, des bureaux, une station-service et une station de lavage, pour une surface de plancher de 4 073 m². Saisie par la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes, la commission départementale d'aménagement commercial de Vaucluse a émis un avis défavorable à ce projet le 22 novembre 2016. Sur recours de la société Bruno Bâtiments, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis défavorable au projet le 26 janvier 2017. La société Bruno Bâtiments a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 20 mars 2017 par lequel le maire de Sainte-Cécile-les-Vignes a refusé de lui délivrer le permis de construire pour le projet litigieux ainsi que la décision implicite par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux. Par un jugement du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. La société Bruno Bâtiments se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 octobre 2021 par lequel la cour administrative de Marseille a rejeté son appel contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 752-4 du code de commerce, dans sa rédaction application au litige : " Dans les communes de moins de 20 000 habitants, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme peut, lorsqu'il est saisi d'une demande de permis de construire un équipement commercial dont la surface est comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés, proposer au conseil municipal ou à l'organe délibérant de cet établissement de saisir la commission départementale d'aménagement commercial afin qu'elle statue sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6. / Dans ces communes, lorsque le maire ou le président de l'établissement public compétent en matière d'urbanisme est saisi d'une demande de permis de construire un équipement commercial visé à l'alinéa précédent, il notifie cette demande dans les huit jours au président de l'établissement public prévu à l'article L. 143-16 du code de l'urbanisme sur le territoire duquel est projetée l'implantation. Celui-ci peut proposer à l'organe délibérant de saisir la commission départementale d'aménagement commercial afin qu'elle statue sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6. / La délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale est motivée. Elle est transmise au pétitionnaire sous un délai de trois jours et affichée pendant un mois à la porte de la mairie de la commune d'implantation. / En cas d'avis défavorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial, le permis de construire ne peut être délivré. / La commission départementale d'aménagement commercial se prononce dans un délai d'un mois. / En cas d'avis négatif, le promoteur peut saisir la Commission nationale d'aménagement commercial qui se prononce dans un délai d'un mois. Le silence de la commission nationale vaut confirmation de l'avis de la commission départementale. " Aux termes de l'article R. 752-24 du code de commerce : " Dès réception de la demande d'avis, le secrétariat de la commission fait connaître au demandeur du permis de construire la date et le numéro d'enregistrement de son dossier et le délai imparti à la commission pour statuer. Le demandeur est en outre informé que, si aucune décision ne lui a été notifiée dans le délai d'un mois, l'avis est réputé favorable. / Le secrétariat de la commission invite le pétitionnaire à transmettre sans délai à la commission toutes pièces susceptibles de permettre à la commission d'apprécier les effets du projet au regard des critères fixés à l'article L. 752-6. / Le délai d'instruction court à compter de la réception par le secrétariat de la commission de la demande d'avis. "

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si l'article 4 de la convention signée le 1er avril 2015 en application de l'article L. 5211-4-1 du code général des collectivités territoriales permet à la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes de recourir à l'assistance du service créé par la communauté de communes Aygues-Ouvèze-en-Provence pour l'instruction des demandes de permis de construire, ce service n'a pas pour mission de procéder aux consultations autres que celles prévues par le code de l'urbanisme. Par suite, en jugeant que la commune de Sainte-Cécile-les Vignes était compétente pour saisir pour avis, en application de l'article L. 752-4 du code de commerce, la commission départementale d'aménagement commercial de Vaucluse du projet litigieux, la cour administrative de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit.

4. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêt attaqué qu'après avoir relevé que la délibération du conseil municipal de Sainte-Cécile-les-Vignes décidant de saisir pour avis la commission départementale d'aménagement commercial de Vaucluse du projet litigieux n'avait pas été communiquée au pétitionnaire dans les trois jours suivant son adoption, alors qu'une telle formalité est requise par l'article L. 752-4 du code de commerce, la cour a estimé que ce vice procédural n'avait pas, en l'espèce, exercé une influence sur le sens de la décision attaquée, ni privé le pétitionnaire d'une garantie, dès lors que ce dernier était présent lors de la séance du conseil municipal où a été adoptée la délibération litigieuse. En statuant ainsi, la cour administrative d'appel a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine qui est exempte de dénaturation.

5. En troisième lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué, qui est suffisamment motivé sur ce point, que la cour a retenu que si la commission départementale avait été saisie par la commune dès le 28 juillet 2016, alors d'ailleurs que le dossier du pétitionnaire n'était pas encore complet, cette saisine avait alors été effectuée en application, non de l'article L. 752-4 du code de commerce, mais de l'article R. 423-13-2 du code de l'urbanisme applicable aux demandes portant sur un projet soumis à permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. Par suite, en jugeant que le pétitionnaire n'était pas fondé à soutenir qu'un avis favorable tacite était intervenu en application de l'article L. 752-4 du code de commerce, du fait du silence gardé par la commission départementale plus d'un mois après sa saisine par la commune le 28 juillet 2016, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

6. En dernier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, la requérante n'est pas fondée à soutenir que, compte tenu de ce qu'elle était titulaire d'un avis tacite favorable, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit en ne se prononçant pas sur le bien-fondé des moyens qu'elle avait présentés à l'encontre de la décision attaquée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société Bruno Bâtiments doit être rejeté.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par la société Bruno Bâtiments. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société le versement à la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes d'une somme de 3 000 euros au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société Bruno Bâtiments est rejeté.

Article 2 : La société Bruno Bâtiments versera une somme de 3 000 euros à la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Bruno Bâtiments et à la commune de Sainte-Cécile-les-Vignes.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 janvier 2024 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; M. Alban de Nervaux, conseiller d'Etat et Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 27 février 2024.

La présidente :

Signé : Mme Maud Vialettes

La rapporteure :

Signé : Mme Françoise Tomé

La secrétaire :

Signé : Mme Romy Raquil


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 459519
Date de la décision : 27/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 fév. 2024, n° 459519
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Françoise Tomé
Rapporteur public ?: M. Jean-François de Montgolfier
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:459519.20240227
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