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01/03/2024 | FRANCE | N°470865

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 01 mars 2024, 470865


Vu la procédure suivante :





La société Shopper Union France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, d'une part, d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la commission mixte paritaire des publications et agences de Presse (CPPAP) a refusé de renouveler l'inscription de " francesoir.fr " en qualité de service de presse en ligne dans ses registres, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette

décision et d'autre part, d'enjoindre à la CPPAP de renouveler cette inscriptio...

Vu la procédure suivante :

La société Shopper Union France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, d'une part, d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la commission mixte paritaire des publications et agences de Presse (CPPAP) a refusé de renouveler l'inscription de " francesoir.fr " en qualité de service de presse en ligne dans ses registres, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision et d'autre part, d'enjoindre à la CPPAP de renouveler cette inscription, de façon rétroactive à compter du 30 novembre 2022, sous astreinte de 20 000 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir. Par une ordonnance n° 2226512/5 du 13 janvier 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a, après avoir admis les interventions, en premier lieu, transmis au Conseil d'Etat la question de la conformité à la Constitution des alinéas 2 et 3 de l'article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, en deuxième lieu, suspendu l'exécution de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la CPPAP a refusé le renouvellement de l'inscription du site francesoir.fr en qualité de service de presse en ligne dans ses registres et, en troisième lieu, enjoint à la CPPAP de rétablir le régime d'aide dont bénéficiait le titre de presse préalablement à la décision refusant le renouvellement de son agrément, à compter de la date du 30 novembre 2022.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 janvier et 13 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de la culture demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er à 5 de cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter les conclusions de la société Shopper Union France.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code général des impôts ;

- le code des postes et communications électroniques ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 ;

- la loi n° 86-897 du 1er août 1986 ;

- la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 ;

- le décret n° 97-1065 du 20 novembre 1997 ;

- le décret n° 2009-1340 du 29 octobre 2009 ;

- la décision du 7 avril 2023 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Shopper Union France ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de la société Shopper Union France ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par une décision du 5 décembre 2022, la commission mixte paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) a refusé de renouveler la reconnaissance de " francesoir.fr ", édité par la société Shopper Union France, en qualité de service de presse en ligne. La société Shopper Union France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de cette décision et d'ordonner à la CPPAP de procéder à ce renouvellement avec effet rétroactif au 30 novembre 2022. Par une ordonnance du 13 janvier 2023 contre laquelle la ministre de la culture se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a transmis une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat, prononcé la suspension demandée et enjoint à la CPPAP de rétablir, à compter du 30 novembre 2022, le régime d'aide dont bénéficiait précédemment " francesoir.fr " et rejeté la demande d'astreinte. Par une décision n°s 469186, 470660 du 7 avril 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Shopper Union France.

Sur le cadre juridique :

2. D'une part, aux termes de l'article 1er de la loi du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse dispose : " On entend par service de presse en ligne tout service de communication au public en ligne édité à titre professionnel par une personne physique ou morale qui a la maîtrise éditoriale de son contenu, consistant en la production et la mise à disposition du public d'un contenu original, d'intérêt général, renouvelé régulièrement, composé d'informations présentant un lien avec l'actualité et ayant fait l'objet d'un traitement à caractère journalistique, qui ne constitue pas un outil de promotion ou un accessoire d'une activité industrielle ou commerciale ". L'article 1er du décret du 20 novembre 1997 relatif à la commission paritaire des publications et agences de presse prévoit que : " La commission paritaire des publications et agences de presse est (...) chargée de la reconnaissance des services de presse en ligne, au sens de l'article 1er de la loi n° 86-897 du 1eraoût 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, en vue notamment de bénéficier des allégements fiscaux ". En vertu de l'article 2 du même décret, la commission est composée en nombre égal de représentants de l'Etat et, selon les domaines dans lesquels elle intervient, de représentants des entreprises de presse ou des agences de presse. L'article 9 du même décret prévoit que son secrétariat est assuré par la direction générale des médias et des industries culturelles, sous le contrôle d'un secrétaire général nommé par le ministre chargé de la communication. Selon l'article 1er du décret du 29 octobre 2009 pris pour l'application de l'article 1er de la loi du 1er août 1986 : " Sont reconnus par la commission paritaire des publications et agences de presse, prévue à l'article 1er du décret du 20 novembre 1997 susvisé, les services de presse en ligne, au sens de l'article 1er de la loi du 1er août 1986 susvisée, répondant aux conditions suivantes :/ (...) 6° Le contenu publié par l'éditeur du service de presse en ligne présente un caractère d'intérêt général quant à la diffusion de la pensée : instruction, éducation, information, récréation du public (...) ". Il résulte enfin des dispositions combinées des articles 8-2 et 15 du décret du 20 novembre 1997 que la commission procède à la révision des inscriptions sur la liste des services de presse en ligne reconnus en application de l'article 1er de la loi n° 86-197 du 1er août 1986 à l'issue d'un délai qu'elle fixe et qui ne peut excéder cinq ans à compter de sa précédente décision d'inscription ou de maintien sur cette liste des services concernés et que les certificats d'inscription dont la durée de validité n'a pas été limitée par la commission paritaire des publications et agences de presse cessent de produire effet au terme d'un délai de cinq années.

3. D'autre part, aux termes du 1 de l'article 200 du code général des impôts : " 1. Ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % de leur montant les sommes prises dans la limite de 20 % du revenu imposable qui correspondent à des dons et versements, y compris l'abandon exprès de revenus ou produits, effectués par les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B, au profit :/ (...) f bis) D'associations d'intérêt général exerçant des actions concrètes en faveur du pluralisme de la presse, par la prise de participations minoritaires, l'octroi de subventions ou encore de prêts bonifiés à des entreprises de presse, au sens du 1 de l'article 39 bis A./ Les donateurs peuvent affecter leurs dons au financement d'une entreprise de presse ou d'un service de presse en ligne en particulier, à condition qu'il n'existe aucun lien économique et financier, direct ou indirect, entre le donateur et le bénéficiaire (...) ".

Sur le pourvoi :

4. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) "

En ce qui concerne la fin de non-recevoir soulevée par la société Shopper Union France :

5. Eu égard à la nature et aux conditions de fonctionnement de la CPPAP, qui n'entre pas dans le champ de la loi du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, le ministre de la culture est compétent pour défendre devant le juge administratif les décisions prises par cet organisme. Par suite, et contrairement à ce que soutient la société Shopper Union France, le pourvoi présenté par la ministre de la culture, partie à l'instance devant le tribunal administratif, est recevable.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

6. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, et en particulier de la contribution, publiée sur le site internet " elysee.fr ", de la présidente de la CPPAP aux travaux de la commission sur la société de l'information à l'ère du numérique, dite " commission Bronner ", dont le rapport a été remis au Président de la République le 11 janvier 2022, que c'est en réponse à la question de savoir " comment éviter que des médias proposant de manière répétée des contenus provoquant à la haine et/ou susceptibles de troubler l'ordre public ne soient immatriculés à la CPPAP et bénéficient ainsi de facilités fiscales et postales, et donc d'un financement public indirect ' " que la présidente de la CPPAP a indiqué que " S'agissant en particulier du cas de FranceSoir, le seul levier dont dispose la commission serait de considérer que le site présente un " défaut d'intérêt général " en raison notamment d'allégations susceptibles de porter atteinte à la protection de la santé publique ", ajoutant qu'il " faudrait sur ce point que la commission dispose d'une expertise professionnelle sur la potentielle dangerosité des propos diffusés ". En estimant qu'était propre à créer un doute sérieux, en l'état de l'instruction, sur la décision attaquée le moyen tiré de ce que la commission n'aurait, pour ce motif, pas statué avec toute l'impartialité requise lors de sa délibération du 30 novembre 2022, alors que la présidente de la commission, dans sa réponse à la question qui lui avait été posée, s'était bornée à rappeler le critère posé par l'article 1er de la loi du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse cité au point 2, sans prendre parti sur la question de savoir si ce critère était rempli en l'espèce, et alors au surplus que cette délibération a été adoptée à l'unanimité sans qu'il soit besoin que sa présidente prenne part au vote, le juge des référés a entaché son ordonnance d'une dénaturation des faits et des pièces du dossier.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que la ministre de la culture est fondée à demander l'annulation des articles 1er et 3 à 6 de l'ordonnance qu'elle attaque.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par la société Shopper Union France, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

Sur la demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par la société Shopper Union :

En ce qui concerne les interventions volontaires :

9. Est recevable à former une intervention, devant le juge du fond comme devant le juge de cassation, toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige.

Quant à l'intervention de l'association de la presse libre :

10. L'association de la presse libre a notamment pour objet statutaire de " développer les activités d'intérêt général en faveur de la liberté de la presse ", " en développant toutes activités à caractère culturel et artistique ou concourant à la mise en valeur ou à la diffusion de la culture et de la langue française (...) " et " en exerçant toutes actions concrètes en faveur du pluralisme de la presse (...) ". A ce titre, elle collecte des dons au bénéfice de France Soir et établit les reçus fiscaux correspondants. Son intervention présentée au soutien de la requête formée par la société Shopper Union France est, par suite, recevable.

Quant à l'intervention de Mme B... :

11. Mme B... est directrice adjointe de la rédaction de " francesoir.fr ". A ce titre, elle justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir à au soutien de la requête formée par la société Shopper Union France. Son intervention est, par suite, recevable.

Quant à l'intervention conjointe de Mmes C..., épouse A... et G..., épouse D... :

12. Mmes C... et D... sont donatrices de " francesoir.fr ". Eu égard à la nature et l'objet des questions soulevées par le litige, elles justifient d'un intérêt suffisant pour intervenir dans la présente instance, au soutien de la requête de la société Shopper Union France. Leur intervention, qui, contrairement à ce que soutient la ministre de la culture, a été formée par mémoire distinct, est, par suite, recevable.

En ce qui concerne les conclusions tendant à la suspension de la décision de la CPPAP :

Quant à la condition d'urgence :

13. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi de conclusions tendant à la suspension d'un acte administratif, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.

14. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de la note établie par l'expert-comptable de la société Shopper Union France que " francesoir.fr " fournit un service gratuit, majoritairement financé par le versement de dons, lesquels représentent 92% des produits d'exploitation. 69% de ces dons, soit 63 % des produits d'exploitation, ouvrent droit à une réduction d'impôts en application du f bis du 1 de l'article 200 du code général des impôts, cité au point 3. Dès lors que la perte de la qualité de service de presse en ligne ne permet plus à ses donateurs de bénéficier de cet avantage fiscal, la décision dont la suspension est demandée est de nature à compromettre, à brève échéance, la viabilité du modèle économique de cette publication. La condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit donc être regardée comme satisfaite, sans qu'y fasse obstacle, contrairement à ce que soutient la ministre de la culture, la circonstance que la situation financière de la société s'était déjà dégradée avant même le non-renouvellement de son inscription sur la liste des services de presse en ligne.

Quant à l'existence d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée :

15. Lorsque la CPPAP envisage de prendre une décision de non-renouvellement de la reconnaissance d'un service de presse en ligne en se fondant sur la circonstance que le service ne satisfait plus aux conditions fixées par l'article 1er du décret du 29 octobre 2009 pris pour l'application de l'article 1er de la loi du 1er août 1986, et en particulier à la condition que son contenu présente un caractère d'intérêt général quant à la diffusion de la pensée prévue par le 6° de cet article 1er, une telle décision, eu égard à sa nature et à ses effets, ne peut régulièrement intervenir, alors même qu'elle est prise sur la demande de l'éditeur du service, sans qu'aient été communiqués au préalable à celui-ci, lorsqu'ils ne résultent pas du dossier de demande de renouvellement lui-même, les éléments sur lesquels entend se fonder la CPPAP.

16. Il résulte de l'instruction, et en particulier des visas de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la CPPAP a refusé de renouveler la reconnaissance de " francesoir.fr " en qualité de service de presse en ligne, que la commission, pour estimer que le service ne satisfaisait plus à la condition du caractère d'intérêt général quant à la diffusion de la pensée, s'est fondée sur un avis de la direction générale de la santé du ministère de la Santé et de la Prévention, qu'elle a sollicité, et qui n'a pas été communiqué préalablement à la société Shopper Union France, dont il résultait que la publication présentait un danger pour la santé publique. Il s'ensuit que le moyen soulevé par la société Shopper Union France à l'appui de sa demande de suspension, tiré de ce que la décision litigieuse a été prise au terme d'une procédure irrégulière, en méconnaissance du principe du contradictoire, est de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée.

17. En revanche, aucun des autres moyens soulevés par la société Shopper Union n'est de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée.

18. Il résulte de ce qui précède que la société Shopper Union France est fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la CPPAP a refusé de renouveler la reconnaissance de " francesoir.fr ", en qualité de service de presse en ligne (SPEL).

Sur les conclusions à fin d'injonction :

19. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".

20. L'exécution de la présente décision implique non pas, comme le soutient la société, qu'elle soit rétroactivement réinscrite sur la liste des services de presse en ligne, mais que la CPPAP examine de nouveau sa demande. Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, sans toutefois que cette injonction soit assortie d'une astreinte.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice :

21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que la société Shopper Union France demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 1er et 3 à 6 de l'ordonnance du 13 janvier 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Paris sont annulés.

Article 2 : Les interventions devant le tribunal administratif de Paris de l'association de la presse libre, de Mme B... et de Mmes C... et D... sont admises.

Article 3 : L'exécution de la décision du 5 décembre 2022 par laquelle la commission paritaire des publications et agences de presse a rejeté sa demande de renouvellement de l'inscription de " francesoir.fr " dans ses registres en qualité de service de presse en ligne est suspendue jusqu'à l'intervention du jugement au fond.

Article 4 : Il est enjoint à la commission paritaire des publications et agences de presse de se prononcer à nouveau sur la demande de renouvellement de l'agrément de francesoir.fr " en qualité de service de presse en ligne dans un délai de deux mois à compter de la présente décision.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la société Shopper Union France est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la ministre de la culture, à la société Shopper Union France, à l'association de la presse libre, à Mme B... et à Mme E..., F... C..., épouse A..., première dénommée des intervenantes.

Délibéré à l'issue de la séance du 16 février 2024 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre ; M. Jean de L'Hermite, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Jérôme Goldenberg, conseillers d'Etat et Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 1er mars 2024

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

La rapporteure :

Signé : Mme Isabelle Lemesle

La secrétaire :

Signé : Mme Claudine Ramalahanoharana


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 470865
Date de la décision : 01/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - PROCÉDURE CONTRADICTOIRE - CARACTÈRE OBLIGATOIRE - DÉCISION DE NON-RENOUVELLEMENT DE LA RECONNAISSANCE D’UN SERVICE DE PRESSE EN LIGNE PAR LA CPPAP - FONDÉE SUR DES ÉLÉMENTS QUI NE RÉSULTENT PAS DU DOSSIER DE DEMANDE [RJ1].

01-03-03-01 Lorsque la commission mixte paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) envisage de prendre une décision de non-renouvellement de la reconnaissance d’un service de presse en ligne en se fondant sur la circonstance que le service ne satisfait plus aux conditions fixées par l’article 1er du décret n° 2009-1340 du 29 octobre 2009 pris pour l’application de l'article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986, et en particulier à la condition que son contenu présente un caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée prévue par le 6° de cet article 1er, une telle décision, eu égard à sa nature et à ses effets, ne peut régulièrement intervenir, alors même qu’elle est prise sur la demande de l’éditeur du service, sans qu’aient été communiqués au préalable à celui-ci, lorsqu’ils ne résultent pas du dossier de demande de renouvellement lui-même, les éléments sur lesquels entend se fonder la CPPAP.

PRESSE - FONCTIONNEMENT DES ENTREPRISES DE PRESSE - MESURES D'ALLÉGEMENTS FISCAUX ET POSTAUX - CPPAP – RECONNAISSANCE D’UN SERVICE DE PRESSE EN LIGNE – DÉCISION DE NON-RENOUVELLEMENT FONDÉE SUR DES ÉLÉMENTS QUI NE RÉSULTENT PAS DU DOSSIER DE DEMANDE – EXIGENCE D’UNE PROCÉDURE CONTRADICTOIRE PRÉALABLE – EXISTENCE [RJ1].

53-04-01 Lorsque la commission mixte paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) envisage de prendre une décision de non-renouvellement de la reconnaissance d’un service de presse en ligne en se fondant sur la circonstance que le service ne satisfait plus aux conditions fixées par l’article 1er du décret n° 2009-1340 du 29 octobre 2009 pris pour l’application de l'article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986, et en particulier à la condition que son contenu présente un caractère d’intérêt général quant à la diffusion de la pensée prévue par le 6° de cet article 1er, une telle décision, eu égard à sa nature et à ses effets, ne peut régulièrement intervenir, alors même qu’elle est prise sur la demande de l’éditeur du service, sans qu’aient été communiqués au préalable à celui-ci, lorsqu’ils ne résultent pas du dossier de demande de renouvellement lui-même, les éléments sur lesquels entend se fonder la CPPAP.


Publications
Proposition de citation : CE, 01 mar. 2024, n° 470865
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle Lemesle
Rapporteur public ?: M. Laurent Domingo
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD, LOISEAU, MASSIGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:470865.20240301
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