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20/03/2024 | FRANCE | N°465471

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 20 mars 2024, 465471


Vu la procédure suivante :



Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national CGT des chancelleries et services judiciaires demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, et de la ministre de la transformation et de la fonction publiques du 25 avril 2022 portant création des comités sociaux d'administration relevant du ministère de la justice ;



2°) de mettre à

la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice a...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national CGT des chancelleries et services judiciaires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, et de la ministre de la transformation et de la fonction publiques du 25 avril 2022 portant création des comités sociaux d'administration relevant du ministère de la justice ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le syndicat soutient que l'arrêté qu'il attaque est entaché d'erreurs manifestes d'appréciation, d'une part, en ce qu'il rend le comité social d'administration placé auprès du secrétaire général du ministère de la justice compétent pour l'Ecole nationale des greffes, d'autre part, en ce que le nombre de représentants titulaires au sein des comités sociaux de l'administration des services judiciaires ne tient pas compte de la très importante augmentation du corps électoral, du fait de l'inclusion des magistrats.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au ministre de la transformation et de la fonction publiques, qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ;

- le décret n° 2020-1427 du 20 novembre 2020 ;

- le décret n° 2022-283 du 28 février 2022 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Maïlys Lange, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat national CGT des chancelleries et services judiciaires demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, et de la ministre de la transformation et de la fonction publiques du 25 avril 2022 portant création des comités sociaux d'administration relevant du ministère de la justice.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 251-1 du code général de la fonction publique : " Les comités sociaux sont chargés de l'examen des questions collectives de travail ainsi que des conditions de travail dans les administrations, les collectivités territoriales et les établissements publics au sein desquels ils sont institués ". Aux termes de l'article L. 251-2 du même code : " Un ou plusieurs comités sociaux d'administration sont mis en place dans toutes les administrations de l'État et tous les établissements publics de l'État ne présentant pas un caractère industriel ou commercial ". L'article 2 du décret du 20 novembre 2020 relatif aux comités sociaux d'administration dans les administrations et les établissements publics de l'Etat prévoit la création dans chaque département ministériel d'un comité social d'administration ministériel placé auprès du ministre. Son article 3 prévoit que, pour chaque administration centrale, il est créé un comité social d'administration de proximité, dénommé comité social d'administration centrale, placé auprès du secrétaire général ou du directeur des ressources humaines, compétent pour les services d'administration centrale et pour les services à compétence nationale. Aux termes de l'article 4 du même décret, il peut être créé, auprès d'un directeur général, " un comité social d'administration de réseau compétent pour les services centraux, les services déconcentrés ou les services à compétence nationale relevant de cette direction (...) / Dans ce cas, le comité social d'administration de proximité des personnels affectés dans les services centraux de ce réseau est soit le comité social d'administration centrale, soit un comité social d'administration de proximité, créé pour ces seuls personnels, par arrêté du ministre, dénommé comité social d'administration de service central de réseau. / De même, le comité social d'administration de proximité des personnels affectés dans un service à compétence nationale relevant du réseau est soit le comité social d'administration centrale, soit un comité social d'administration de proximité, créé pour ces seuls personnels, par arrêté du ministre, dénommé comité social d'administration de service à compétence nationale. (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " I. - Au niveau déconcentré, en fonction de l'organisation territoriale du département ministériel concerné, est créé, par arrêté du ministre, au moins un comité social d'administration de proximité dénommé comité social d'administration de service déconcentré auprès du chef de service déconcentré concerné. (...) ". L'article 8 de ce décret permet la création de comités sociaux d'administration spéciaux dans les services selon les modalités suivantes : " 1° Concernant des services autres que des services déconcentrés : / a) Auprès d'un chef de service à compétence nationale par arrêté du ministre ; (...) / 2° Concernant des services déconcentrés : (...) c) Auprès d'un chef de service déconcentré pour l'ensemble des services placés sous son autorité lorsqu'aucun comité social d'administration de proximité n'a été créé auprès de lui en application de l'article 5, par arrêté du ministre ; (...) ". En vertu de l'article 14 de ce décret, le nombre de représentants du personnel est égal à quinze pour le comité social d'administration ministériel et à onze pour le comité social d'administration centrale et pour le comité social d'administration de réseau ; pour les comités sociaux d'administration des services déconcentrés, le nombre de représentants du personnel titulaires est égal à : : " 1° Dix au plus lorsque les effectifs des services sont supérieurs à sept cents agents ; / 2° Huit au plus lorsque les effectifs des services sont supérieurs à cinq cents agents et inférieurs ou égaux à sept cents agents ; / 3° Sept au plus lorsque les effectifs des services sont supérieurs à deux cents agents et inférieurs ou égaux à cinq cents agents ; / 4° Six au plus lorsque les effectifs des services sont inférieurs ou égaux à deux cents agents en l'absence d'une formation spécialisée au sein du comité social d'administration ; / 5° Cinq au plus lorsque les effectifs des services sont inférieurs ou égaux à deux cents agents s'il existe une formation spécialisée au sein du comité social d'administration. / Pour les autres comités sociaux d'administration, le nombre des représentants du personnel titulaires est égal à dix au plus ".

3. D'autre part, l'article 4 de la loi du 6 août 2019 a ajouté à la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat un article 15 ter, désormais codifié à l'article L. 252-7 du code général de la fonction publique, qui prévoit que, pour la désignation des représentants du personnel siégeant aux comités sociaux d'administration du ministère de la justice : " 1° Sont électeurs les agents publics et les magistrats de l'ordre judiciaire ; / 2° Sont éligibles, outre les représentants des organisations syndicales mentionnées à l'article 9 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, les représentants des organisations syndicales mentionnées à l'article 10-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ". Aux termes de l'article 21-1 du décret du 20 novembre 2020, issu du décret du 28 février 2022 relatif à la participation des magistrats judiciaires et de leurs organisations syndicales aux comités sociaux du ministère de la justice : " Pour le calcul des effectifs des comités sociaux d'administration du ministère de la justice, sont également pris en compte les magistrats de l'ordre judiciaire exerçant leurs fonctions dans le périmètre du service pour lequel le comité social d'administration est institué ou placés en position de congé parental ou de congé rémunéré ". Enfin, l'article 7 du décret du 28 février 2022 prévoit que ses dispositions sont applicables en vue du prochain renouvellement général des instances dans la fonction publique.

4. En premier lieu, l'article 1er de l'arrêté attaqué a institué, conformément aux dispositions de l'article 2 du décret du 20 novembre 2020, un comité social d'administration centrale, compétent pour l'ensemble des directions et services d'administration centrale ainsi que pour l'ensemble des services à compétence nationale du ministère de la justice, placé auprès du secrétaire général, ainsi que, en application du a) du 1° de l'article 8 du même décret, un comité social d'administration spécial pour chaque service à compétence nationale du ministère de la justice mentionné à l'annexe 1 de cet arrêté, placé auprès du chef de service concerné. Il ressort de cette annexe 1 qu'un comité social d'administration spécial a ainsi été créé pour l'Ecole nationale des greffes, qui constitue un service à compétence nationale rattaché au directeur des services judiciaires en vertu d'un arrêté du 5 mars 2001 du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

5. Le syndicat requérant, qui se borne à relever que l'Ecole nationale des greffes est un service à compétence nationale placé sous l'autorité du directeur des services judiciaires, n'est pas fondé à en déduire que l'article 1er de l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il institue un comité social d'administration centrale compétent pour l'ensemble des services à compétence nationale du ministère de la justice, placé auprès de la secrétaire générale de ce ministère.

6. En second lieu, il résulte de l'annexe 2 de l'arrêté attaqué, qui fixe la composition des comités sociaux d'administration de proximité relevant de la direction des services judiciaires et de leurs formations spécialisées, que le nombre de représentants du personnel titulaires est identique, pour le comité social d'administration de chaque cour d'appel, à celui qui avait été fixé par un arrêté du 7 juin 2011 relatif à la création d'un comité technique de service déconcentré placé auprès de chaque premier président de cour d'appel, modifié en dernier lieu par un arrêté du 4 juin 2018. Il ressort des pièces du dossier, et il n'est pas contesté, qu'en application des articles L. 252-7 du code général de la fonction publique, 21-1 du décret du 20 novembre 2020 et 7 du décret du 28 février 2022, cités au point 3, l'inclusion des magistrats judiciaires dans le corps électoral pour les élections professionnelles organisées en décembre 2022 pour l'élection des représentants du personnel siégeant aux comités sociaux d'administration du ministère de la justice a eu pour effet d'augmenter les effectifs des personnels des cours d'appel par rapport à ceux qui avaient été pris en compte pour la fixation de la composition des comités techniques des services déconcentrés lors des élections professionnelles organisées en décembre 2018.

7. Toutefois, le pouvoir réglementaire, qui dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour déterminer le nombre de représentants du personnel titulaires et suppléants, dans les limites fixées par les dispositions de l'article 14 du décret du 20 novembre 2020, qui, au demeurant, ne prévoient pas un nombre minimal de représentants des personnels dans les comités sociaux d'administration des services déconcentrés, n'a pas entaché l'annexe 2 de l'arrêté attaqué d'une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant d'augmenter le nombre de représentants du personnel dans les comités sociaux d'administration des cours d'appel proportionnellement à l'augmentation de leur corps électoral.

8. Il résulte de ce qui précède que le syndicat national CGT des chancelleries et services judiciaires n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté qu'il attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du syndicat national CGT des chancelleries et services judiciaires est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat national CGT des chancelleries et services judiciaires, au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de la transformation et de la fonction publiques.

Délibéré à l'issue de la séance du 15 février 2024 où siégeaient : M. Cyril Roger-Lacan, assesseur, présidant ; M. Stéphane Hoynck, conseiller d'Etat et M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 20 mars 2024.

Le président :

Signé : M. Cyril Roger-Lacan

Le rapporteur :

Signé : M. Bruno Bachini

La secrétaire :

Signé : Mme Marie-Adeline Allain


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 465471
Date de la décision : 20/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 mar. 2024, n° 465471
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: Mme Maïlys Lange

Origine de la décision
Date de l'import : 24/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:465471.20240320
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