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20/03/2024 | FRANCE | N°472750

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 20 mars 2024, 472750


Vu les procédures suivantes :



1° Sous le n°472750, M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7,72 euros et la somme de 14,15 euros par mois à compter d'avril 2017, assortie des intérêts capitalisés, correspondant à la redevance qu'il a versée respectivement pour l'accès aux chaînes de télévision gratuites en tant que propriétaire de son poste de télévision en février et mars 2017 puis pour la location de son téléviseur et l'abonnement aux chaînes payantes à compter d'avril 2017

, à la maison centrale d'Ensisheim.



Par un jugement n° 1706403 du...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n°472750, M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7,72 euros et la somme de 14,15 euros par mois à compter d'avril 2017, assortie des intérêts capitalisés, correspondant à la redevance qu'il a versée respectivement pour l'accès aux chaînes de télévision gratuites en tant que propriétaire de son poste de télévision en février et mars 2017 puis pour la location de son téléviseur et l'abonnement aux chaînes payantes à compter d'avril 2017, à la maison centrale d'Ensisheim.

Par un jugement n° 1706403 du 23 août 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20NC00390 du 2 février 2023, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur appel de M. E..., annulé ce jugement, condamné l'Etat à lui verser la somme de 7,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2017 capitalisés, et rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi sommaire enregistré le 4 avril 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. E....

2° Sous le n° 473671, M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3,86 euros par mois à compter de juillet 2019, assortie des intérêts capitalisés, correspondant à la redevance qu'il a versée pour l'accès aux chaînes de télévision gratuites à la maison centrale d'Ensisheim.

Par un jugement n° 2000503 du 30 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, rejeté sa demande, d'autre part, prononcé le retrait du bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Par un arrêt n° 20NC02711 du 28 février 2023, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur appel de M. D..., annulé ce jugement et condamné l'Etat à lui verser la somme de 3,86 euros par mois à compter du 2 juillet 2019 jusqu'à la date de cet arrêt ou celle à laquelle auraient cessé d'être mis indûment à sa charge les frais d'accès au service de télévision numérique terrestre, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 2019, capitalisés.

Par un pourvoi sommaire, enregistré le 28 avril 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. D....

....................................................................................

3° Sous le n° 473672, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Etat à lui verser une somme de 283 euros, correspondant à 20 mois de location d'un poste de télévision, ainsi qu'une somme de 3,86 euros par mois à compter d'octobre 2017, assortie des intérêts capitalisés, correspondant à la redevance qu'il a versée pour l'accès du poste dont il était propriétaire aux chaînes de télévision gratuites, à la maison centrale d'Ensisheim.

Par un jugement n° 1907403 du 30 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et prononcé le retrait du bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Par un arrêt n° 20NC02710 du 28 février 2023, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement et condamné l'Etat à lui verser la somme de 3,86 euros par mois à compter du 1er octobre 2017 jusqu'à la date à laquelle ont cessé d'être mis indûment à sa charge les frais d'accès au service de télévision numérique terrestre, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2019, capitalisés.

Par un pourvoi sommaire enregistré le 28 avril 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. B....

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code pénitentiaire ;

- le code de procédure pénale ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nathalie Destais, conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Maïlys Lange, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. E... et à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. D... ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 19 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires, annexé à l'article R. 57-6-18 du code de procédure pénale, devenu article R. 112-22 du code pénitentiaire : " La personne détenue peut se procurer par l'intermédiaire de l'administration et selon les modalités que celle-ci détermine une radio et un téléviseur individuels (...) ". Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, par une note du 1er février 2016 relative à la tarification de la prestation de télévision en détention, et afin de mettre un terme à la grande disparité des pratiques tarifaires constatées pour l'accès des détenus aux services de télévision, la directrice de l'administration pénitentiaire a informé les directeurs interrégionaux des services pénitentiaires de la mise en place d'un marché national regroupant l'ensemble des établissements pénitentiaires et de tarifs unifiés pour la location par les détenus d'un téléviseur et pour l'accès aux chaînes payantes. Cette note a fixé à 14,15 euros le tarif mensuel applicable dans l'ensemble des établissements pénitentiaires pour la location d'un poste de télévision et la souscription au bouquet de chaînes payantes, dont 6,42 euros au titre du matériel et 7,73 euros au titre du bouquet de chaînes. Par une note du 23 décembre 2016 relative au marché national des prestations de télévision dans les établissements pénitentiaires, le directeur de l'administration pénitentiaire a rappelé ces règles et prévu, en outre, à compter du 1er février 2017, un tarif unique harmonisé de 3,86 euros par mois pour l'accès par les personnes détenues propriétaires de leur poste de télévision au réseau pénitentiaire. Ce tarif, calculé à partir du montant des dépenses de maintenance des infrastructures correspondantes, s'applique à l'ensemble des établissements pénitentiaires sur le territoire métropolitain, quel que soit leur mode de gestion. Par une note du 27 janvier 2017, le directeur de la maison centrale d'Ensisheim a informé les personnes détenues dans cet établissement de l'application, à compter du 1er février 2017, de ce nouveau forfait mensuel résultant de la note du 23 décembre 2016.

2. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que MM. D... et B..., incarcérés à la maison centrale d'Ensisheim (Haut-Rhin), et propriétaires d'un poste de télévision, ont bénéficié du service d'accès au réseau et aux chaînes gratuites de la télévision numérique terrestre (TNT), qui leur a été facturé 3,86 euros par mois, respectivement depuis le 2 juillet 2019 et depuis le 1er octobre 2017. M. E..., détenu dans le même établissement, a, pour sa part, disposé, d'un téléviseur dont il était propriétaire en février et mars 2017, et s'est vu facturer l'accès au réseau au même tarif mensuel pour ces deux mois, puis a souscrit, à compter d'avril 2017, à un service de location d'un téléviseur et d'accès à un bouquet de chaînes payantes proposé par l'établissement, pour lequel il a acquitté une somme de 14,15 euros par mois. Par trois jugements, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes de ces trois détenus tendant à ce que l'Etat leur rembourse les sommes qu'ils avaient ainsi acquittées. Par trois arrêts, la cour administrative d'appel de Nancy a fait droit à leurs appels dirigés contre ces jugements et a condamné l'Etat à leur reverser les montants correspondant au forfait mensuel acquitté au titre de l'accès au réseau de la TNT et aux chaînes gratuites, ces sommes portant intérêts capitalisés. Le garde des sceaux, ministre de la justice se pourvoit en cassation contre ces arrêts. M. E..., par la voie du pourvoi incident, conteste l'arrêt qui le concerne en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat lui reverse la somme de 14,15 euros par mois mise à sa charge à compter d'avril 2017 au titre de sa location d'un poste de télévision et de son abonnement au bouquet de chaînes payantes proposé par l'établissement.

3. Les pourvois du ministre présentent à juger des questions communes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur le pourvoi incident de M. E... :

4. En estimant, par adoption des motifs du jugement du tribunal administratif de Strasbourg, que la circonstance que le tarif de location du poste de télévision et d'abonnement qui lui avait été appliqué avait augmenté de 44 % par rapport au tarif précédemment applicable ne suffisait pas à établir que le nouveau tarif serait excessif et dépourvu de fondement objectif et rationnel, et que le requérant n'apportait aucune précision sur le prix du service rendu au regard notamment d'éléments de comparaison pour un service comparable acquis en dehors d'un établissement pénitentiaire, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit. Par suite, le pourvoi incident de M. E... doit être rejeté.

Sur les pourvois du garde des sceaux, ministre de la justice :

5. Aux termes de l'article R. 821-1 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai de recours en cassation est de deux mois ". Sous le n° 472750, le pourvoi du garde des sceaux, ministre de la justice, a été formé dans le délai franc prévu par ces dispositions, à compter de la notification de l'arrêt litigieux dont il a accusé réception le 3 février 2023. Dès lors, la fin de non-recevoir de M. E... tirée de la tardiveté du pourvoi ne peut qu'être écartée.

6. Il ressort des motifs des arrêts critiqués que la cour a retenu que le tarif mensuel de 3,86 euros appliqué, à compter de février 2017, au sein de la maison centrale d'Ensisheim pour l'accès des détenus propriétaires de leur téléviseur au réseau et aux chaînes gratuites de la télévision numérique terrestre avait été instauré par le directeur de cet établissement et n'était pas exigé des détenus se trouvant dans des établissements en gestion publique. Il résulte toutefois des pièces du dossier qui lui était soumis, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, que ce tarif a été édicté par la note du directeur de l'administration pénitentiaire du 23 décembre 2016 et est applicable, conformément au nouveau marché national mis en place, à l'ensemble des établissements pénitentiaires métropolitains, qu'ils soient en gestion déléguée ou en gestion publique. Il suit de là que le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Nancy a entaché son appréciation des pièces des dossiers de dénaturation.

7. Si M. D... fait valoir, en défense, que devrait être substitué au motif erroné retenu par l'arrêt attaqué celui tiré de ce que le tarif mensuel de 3,86 euros résultant de la note du directeur de l'administration pénitentiaire du 23 décembre 2016 instituerait une inégalité de traitement injustifiée entre détenus propriétaires d'un téléviseur selon qu'ils ont ou non souscrit au bouquet de chaînes payantes, un tel motif comporte, en l'espèce, l'appréciation de circonstances de fait et ne peut par suite, être substitué par le juge de cassation au motif erroné retenu par la cour administrative d'appel pour justifier le dispositif de son arrêt sur ce point.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à demander l'annulation des arrêts qu'il attaque, dans la mesure où ils lui sont défavorables.

Sur le règlement des litiges :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler les affaires au fond, dans la mesure de la cassation prononcée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

S'agissant du tarif d'accès au réseau pénitentiaire appliqué aux détenus propriétaires de leur téléviseur :

10. Ainsi qu'il a été indiqué au point 1, le forfait mensuel de 3,86 euros facturé, à compter de février 2017, aux personnes détenues propriétaires de leur téléviseur au titre de l'accès au réseau et aux chaînes gratuites de la TNT en vertu de la note du 23 décembre 2016 du directeur de l'administration pénitentiaire est applicable à l'ensemble des établissements pénitentiaires de métropole et vise à remédier aux disparités tarifaires préexistantes, notamment entre établissements en gestion publique et établissements en gestion déléguée. Il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ce tarif serait constitutif d'une différence de traitement injustifiée entre détenus selon le mode de gestion de leur établissement de détention ni, en tout état de cause, qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention.

11. Par ailleurs, il ne ressort pas de la note du 27 janvier 2017 du directeur de la maison centrale d'Ensisheim citée au point 1 que le forfait mensuel devant être acquitté à partir du 1er février 2017 par les détenus propriétaires de leur matériel et utilisant le réseau de cet établissement ne serait facturé qu'aux détenus ayant renoncé au bouquet de chaînes payantes. Dès lors, le moyen tiré de ce que le tarif ainsi appliqué procèderait d'une discrimination entre détenus propriétaires de leur poste selon qu'ils souscrivent ou non au bouquet de chaînes payantes doit, en tout état de cause, être écarté.

12. Pour être légalement établie, une redevance pour service rendu doit essentiellement trouver une contrepartie directe dans la prestation fournie par le service ou, le cas échéant, dans l'utilisation d'un ouvrage public et, par conséquent, doit correspondre à la valeur de la prestation ou du service ; si l'objet du paiement que l'administration peut réclamer à ce titre est en principe de couvrir les charges du service public, il n'en résulte pas nécessairement que le montant de la redevance ne puisse excéder le coût de la prestation fournie. Le respect de la règle d'équivalence entre le tarif d'une redevance pour service rendu et la valeur de la prestation ou du service peut être assuré non seulement en retenant le prix de revient de ce dernier, mais aussi, en fonction des caractéristiques du service, en tenant compte de la valeur économique de la prestation pour son bénéficiaire. Dans tous les cas, le tarif doit être établi selon des critères objectifs et rationnels, dans le respect du principe d'égalité entre les usagers du service public et des règles de la concurrence.

13. Si MM. E..., D... et B... soutiennent que le forfait mensuel de 3,86 euros établi dans les conditions rappelées au point 1 serait surévalué au regard du coût de revient du service fourni et ne serait pas fondé sur des critères rationnels et objectifs, il ressort des pièces des dossier que l'administration pénitentiaire fait valoir les conditions particulières de maintenance des infrastructures et du réseau de télévision dans les établissements pénitentiaires, qui entraînent des coûts spécifiques. MM. E..., D... et B... n'apportent pas d'éléments susceptibles d'établir que le forfait mensuel de 3,86 euros serait manifestement disproportionné par rapport à ces coûts spécifiques supportés par l'administration pénitentiaire. Il en résulte que le moyen tiré de ce que ce tarif aurait été illégalement établi doit être écarté.

S'agissant du tarif appliqué pour la location d'un poste de télévision et l'abonnement au bouquet de chaînes payantes :

14. Comme il a été rappelé au point 1, le tarif unifié de 14,15 euros par mois a été appliqué, à compter du 1er février 2016, à l'ensemble des établissements pénitentiaires, quel que soit leur mode de gestion, pour la location par les détenus d'un téléviseur et pour l'accès aux chaînes payantes. Dès lors, le moyen tiré de ce que ce tarif méconnaîtrait le principe d'égalité des usagers du service public, l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou l'article 1er du protocole additionnel à cette convention ne peut qu'être écarté.

15. Il résulte par ailleurs des pièces des dossiers que l'administration pénitentiaire a souligné, notamment dans les notes du 1er février et 23 décembre 2016 citées au point 1, que ce forfait correspond au tarif d'équilibre du nouveau marché national conclu pour cette prestation, fixé sur la base des coûts moyens facturés à l'administration, et permet de remédier, à la fois, à la faible couverture des coûts dans les établissements en gestion publique et aux tarifs élevés pratiqués jusqu'alors dans les établissements en gestion déléguée. La circonstance que ce nouveau tarif conduirait à une augmentation sensible par rapport à celui pratiqué, entre 2011 et 2017, dans les établissements en gestion publique, n'est pas, par elle-même, de nature à démontrer sa surévaluation au regard de la valeur économique du service ainsi rendu au sein de la maison centrale d'Ensisheim. Par suite, le moyen tiré de ce que ce tarif aurait été illégalement établi doit être écarté.

16. Par suite, MM. E..., D... et B... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Strasbourg, par les trois jugements contestés, a rejeté leurs demandes tendant au remboursement des sommes dont ils se sont acquittés au titre de l'accès au service de télévision au sein de la maison centrale d'Ensisheim.

Sur le retrait du bénéfice de l'aide juridictionnelle prononcé en première instance à l'encontre de M. D... :

17. Aux termes de l'article 50 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, dans sa rédaction alors applicable : " Sans préjudice des sanctions pénales éventuellement encourues, le bénéfice de l'aide juridictionnelle (...) est retiré, en tout ou partie, dans les cas suivants : (...) / 3° lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle a été jugée dilatoire ou abusive ". L'article 51 de cette même loi précise que : " Le retrait de l'aide juridictionnelle peut être demandé par tout intéressé. Il peut également intervenir d'office. (...). Lorsque la procédure engagée par le demandeur bénéficiant de l'aide juridictionnelle a été jugée dilatoire ou abusive, la juridiction saisie prononce le retrait total de l'aide juridictionnelle ". Il ressort de ce qui précède que la demande de M. D... devant les premiers juges n'avait pas un caractère abusif au sens de ces dispositions. Par suite, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n° 2000503, le tribunal administratif de Strasbourg lui a retiré le bénéfice de l'aide juridictionnelle au motif que son recours aurait été abusif.

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

18. Les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les arrêts de la cour administrative d'appel de Nancy n°s 20NC02711 et 20NC02710 du 28 février 2023 sont annulés dans la mesure où ils sont contestés par les pourvois du garde des sceaux, ministre de la justice.

Article 2 : Les articles 1 et 2 de l'arrêt n° 20NC00390 du 2 février 2023 sont annulés.

Article 3 : Le pourvoi incident de M. E..., dirigé contre l'article 3 de l'arrêt n° 20NC00390 du 2 février 2023, est rejeté.

Article 4 : L'article 2 du jugement n° 2000503 du 30 juillet 2020 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé. Le surplus des conclusions d'appel de M. D... est rejeté.

Article 5 : Les requêtes d'appel présentées par MM. B... et E... sont rejetées.

Article 6 : Les conclusions présentées par MM. D... et E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 7 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, ainsi qu'à MM. C... E..., F... D... et A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 15 février 2024 où siégeaient : M. Cyril Roger-Lacan, assesseur, présidant ; M. Stéphane Hoynck, conseiller d'Etat et Mme Nathalie Destais, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 20 mars 2024.

Le président :

Signé : M. Cyril Roger-Lacan

La rapporteure :

Signé : Mme Nathalie Destais

La secrétaire :

Signé : Mme Marie-Adeline Allain


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 472750
Date de la décision : 20/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 mar. 2024, n° 472750
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nathalie Destais
Rapporteur public ?: Mme Maïlys Lange
Avocat(s) : SCP LE GUERER, BOUNIOL-BROCHIER

Origine de la décision
Date de l'import : 24/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:472750.20240320
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