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08/12/2022 | FRANCE | N°22DA00200

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 08 décembre 2022, 22DA00200


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays d'éloignement et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant un an.



Par un jugement n°2106882 du 25 janvier 2022, le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté e

t enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et f...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 15 février 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays d'éloignement et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant un an.

Par un jugement n°2106882 du 25 janvier 2022, le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté et enjoint au préfet du Nord de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 février 2022, le préfet du Nord demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée en première instance par M. C....

Il soutient que :

- l'intéressé ne justifie pas du caractère réel et sérieux de ses études et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ;

- les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 23 mai 2022, l'instruction a été close le 10 juin 2022.

La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Stéphane Eustache, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant albanais, a demandé le 23 janvier 2020 un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 février 2021, le préfet du Nord a rejeté sa demande. Saisi par M. C..., le tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté par un jugement du 25 janvier 2022, dont le préfet du Nord relève appel.

Sur le moyen accueilli par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré en France le 1er septembre 2017 à l'âge de 15 ans et a été placé auprès des services de l'aide sociale à l'enfance du département du Nord à compter du 28 septembre 2017 et jusqu'au 10 octobre 2019. Dans sa " note sociale ", l'association de formation et d'éducation pour la jeunesse (AFEJ), qui a pris en charge l'intéressé, relève que " A... est un jeune poli mais il peut devenir irrespectueux à cause de sa nonchalance. Mais lorsqu'on le reprend, il s'excuse et reconnaît ses erreurs. Nous regrettons cependant son manque d'investissement et d'intérêt pour son accompagnement éducatif ", avant de conclure que " M. C... est un jeune homme intelligent mais immature. Il ne s'investit pas dans son accompagnement éducatif pour devenir un adulte autonome. Il vit au jour le jour et n'arrive pas à se projeter. Cependant, il s'implique dans sa scolarité en première année CAP cuisine ".

4. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. C..., scolarisé au lycée professionnel des Monts-de-Flandre à Hazebrouck, a obtenu au troisième trimestre de l'année 2018/2019 une moyenne générale de 9,9 sur 20. Le bulletin scolaire de ce trimestre indique qu'il a été absent de manière injustifiée pendant 40 demi-journées et porte l'appréciation globale suivante : " bilan très alarmant, A... n'est pas assidu en cours et a une attitude passive quand il est présent (...) il faut absolument vous remettre en cause pour ne pas mettre votre formation en péril ! ".

5. Scolarisé au sein de l'établissement régional d'enseignement adapté Nelson Mandela à Lomme à compter de l'année scolaire 2019/2020, M. C... a obtenu au premier trimestre une moyenne générale de 11,23 sur 20, le bulletin scolaire de ce trimestre portant l'appréciation globale suivante : " Des absences à noter et des efforts à accentuer à l'oral. Plus actif en classe, A... sera donc moins distrait " avec la mention " mise en garde absences ". Au cours du deuxième trimestre de la même année, M. C... a obtenu une moyenne générale de 8,62 sur 20, le bulletin scolaire relevant qu'il a été " absent ce trimestre hors période de PFMP ". Au cours du troisième trimestre de cette même année, aucune note n'a été attribuée à M. C... et le bulletin scolaire indique que " A... a été absent ce trimestre : aucun contact téléphonique ou écrit ".

6. Au cours du premier trimestre de l'année 2020/2021, M. C... a obtenu une moyenne générale de 11,8 sur 20 mais son bulletin scolaire indique qu'il a été absent de manière injustifiée pendant 9 demi-journées et comporte l'appréciation globale suivante : " Vous avez des capacités mais l'absentéisme ne permet pas l'acquisition et l'évaluation des compétences requises. Attention, l'obtention du CAP est compromise ".

7. Dans ces conditions, même si M. C... a bénéficié du dispositif d'aide dénommé " contrat d'entrée dans la vie adulte " en 2020 et 2021, le préfet du Nord a pu estimer à bon droit qu'il ne justifiait pas du caractère réel et sérieux de ses études.

8. Enfin, si M. C... soutient ne plus avoir de contact avec son père, il est constant qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère, ses frères et sœurs.

9. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler la décision attaquée.

10. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Lille.

Sur les autres moyens soulevés contre le refus d'un titre de séjour :

11. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par Mme D..., cheffe du bureau du contentieux et du droit des étrangers, laquelle bénéficiait, en vertu d'un arrêté du 22 décembre 2020 du préfet du Nord, régulièrement publié le même jour au recueil spécial n° 333 des actes administratifs de la préfecture, d'une délégation de signature à l'effet de signer les décisions relevant des attributions de son bureau. Par suite, le moyen tiré d'un vice d'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté.

12. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur les moyens soulevés contre l'obligation de quitter le territoire français :

13. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de la décision attaquée, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

14. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 15 février 2021.

15. Il s'ensuit que ce jugement doit être annulé et que la demande d'annulation de cet arrêté présentée par M. C... devant le tribunal administratif doit être rejetée.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'injonction présentées par M. C... devant le tribunal administratif doivent être rejetées.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

17. Les demandes présentées devant le tribunal administratif par M. C..., partie perdante, et Me Gommeaux, son avocat, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 25 janvier 2022 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. C... et par Me Gommeaux devant le tribunal administratif de Lille sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Nord, à M. A... C... et à Me Gommeaux.

Délibéré après l'audience publique du 24 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente,

- M. Stéphane Eustache, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 décembre 2022.

Le rapporteur,

Signé:

S. Eustache

Le président de la 1ère chambre,

Signé:

M. B...

La greffière,

Signé:

C. Sire

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Christine Sire

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00200
Date de la décision : 08/12/2022
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Stéphane Eustache
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : GOMMEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2022-12-08;22da00200 ?
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