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15/12/2023 | FRANCE | N°23DA00862

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 15 décembre 2023, 23DA00862


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2300110 du 16 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 12 mai 2023, Mme C..., représentée par Me Emmanuelle Pereira, demande à la Cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2022 par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2300110 du 16 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mai 2023, Mme C..., représentée par Me Emmanuelle Pereira, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation en la munissant d'une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne tenant pas compte des considérations humanitaires justifiant la régularisation de sa situation sur le fondement de l'article L. 435-1 du même code ;

- l'arrêté est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2023, le préfet de l'Aisne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 mai 2023.

Mme C... ayant accepté de lever le secret médical par lettre du 16 juin 2023, son dossier médical a été produit par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) le 22 juin 2023 et l'OFII a présenté des observations le 30 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B..., premier-conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., ressortissante de la République du Congo, née le 9 novembre 1958, est entrée en France le 10 novembre 2021 à l'âge de 63 ans. Elle a sollicité le 14 juin 2022, la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. Par arrêté du 13 décembre 2022, le préfet de l'Aisne a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 16 mars 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis du collège médical de l'OFII, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. En l'espèce, le collège de médecins de l'OFII a estimé, par son avis 2 décembre 2022, que si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

5. Il ressort du dossier médical et des observations produits par l'OFII que si Mme C... ressent des douleurs en raison d'une arthrose lombaire et cervicale et d'un syndrome du canal carpien modéré, son état de santé nécessite seulement une surveillance et la prise de médicaments anti-douleurs. Il en est de même pour sa pathologie oculaire, l'intéressée ayant été opérée d'une cataracte bilatérale au début de l'année 2022. Si l'intéressée précise souffrir de l'épaule à la suite d'une chute ayant nécessité un examen par IRM le 1er février 2023, cette pathologie est postérieure à la date de l'arrêté attaqué. Dès lors, et en toute hypothèse, Mme C... n'établit pas que le défaut de prise en charge de son état de santé pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Aisne aurait commis une erreur droit et méconnu les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est célibataire, vit en France depuis une année à la date de l'arrêté attaqué et n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où vivent ses parents ainsi qu'une partie de sa fratrie et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 63 ans. Si les trois enfants de l'intéressée vivent en France en situation régulière, elle n'établit pas que son état de santé nécessiterait leur présence à ses côtés pour l'assister au quotidien, compte tenu de ce qui a été dit au point 5. Dans ces conditions, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Aisne aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

9. Mme C... n'établit ni même ne soutient avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au surplus, compte tenu de ce qui vient d'être dit aux points 5 et 7, son admission au séjour ne peut être regardée comme répondant à des considérations humanitaires ou se justifiant par des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions doit être écarté, en toute hypothèse.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Emmanuelle Pereira.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aisne.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Thierry Sorin, président de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2023.

Le rapporteur,

Signé : G. B...Le président de chambre,

Signé : T. Sorin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

Anne-Sophie VILLETTE

2

N°23DA00862


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA00862
Date de la décision : 15/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : SCP CARON-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-15;23da00862 ?
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