La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2023 | FRANCE | N°23NT01010

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 15 décembre 2023, 23NT01010


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du directeur de l'établissement public de santé mentale (EPSM) Etienne Gourmelen du 28 mai 2018 lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle, ainsi que la décision de rejet implicite de son recours gracieux.



Par un jugement n° 1803662 du 3 février 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :


<

br> Par une requête enregistrée le 6 avril 2023, M. A... B..., représenté par Me Hillion, demande à la cour :



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du directeur de l'établissement public de santé mentale (EPSM) Etienne Gourmelen du 28 mai 2018 lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle, ainsi que la décision de rejet implicite de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1803662 du 3 février 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 avril 2023, M. A... B..., représenté par Me Hillion, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 février 2023 ;

2°) d'annuler la décision du directeur de l'établissement public de santé mentale (EPSM) Etienne Gourmelen du 28 mai 2018 lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au directeur de l'EPSM de prendre une décision lui accordant le bénéfice de la protection fonctionnelle, dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'EPSM la somme de 2 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation en tant qu'il n'explique pas en quoi la violation du secret médical et du secret professionnel n'entrerait pas dans le champ de la protection fonctionnelle ;

- c'est au terme d'une erreur de droit ou d'appréciation que les premiers juges ont considéré que la violation des secrets médical et professionnel dont s'est rendu coupable l'EPSM n'était pas constitutive d'un fait relevant de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 couvrant pourtant les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, parmi lesquelles les atteintes à la vie privée ;

- la transmission de son dossier médical à la Caisse des dépôts et consignations est constitutive d'une violation du secret médical justifiant que lui soit octroyée la protection fonctionnelle afin qu'il puisse faire valoir ses droits, ce qu'il a été contraint de faire seul, au détriment de sa santé ;

- l'EPSM l'a particulièrement exposé, alors qu'il était tenu de préserver la santé de son agent ;

- l'absence de mise en œuvre de la protection fonctionnelle cause à M. B... un préjudice tant médical, compte tenu des répercussions de cette décision sur sa santé psychique, que matériel, compte tenu du fait qu'il est seul pour mettre en œuvre les actions nécessaires pour faire valoir ses droits ;

- il renvoie pour le surplus à ses écritures de première instance et à l'ensemble des moyens et pièces visés.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 septembre 2023, l'établissement public de santé mentale (EPSM) Etienne Gourmelen conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés dès lors, d'une part, que l'appelant ne démontre pas en quoi les faits qu'il a subis auraient été commis en raison de sa qualité de fonctionnaire, et, d'autre part, que les faits en cause, à supposer qu'ils puissent être qualifiés de violation du secret médical, ne sont pas au nombre de ceux permettant de bénéficier de la protection fonctionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Clairay, représentant l'EPSM Etienne Gourmelen.

Une note en délibéré, enregistrée le 12 décembre 2023 a été présentée pour M B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., agent de la fonction publique hospitalière, exerçant des fonctions d'infirmier au sein de l'établissement public de santé mentale (EPSM) Etienne Gourmelen de Quimper, relève appel du jugement du 3 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 28 mai 2018 lui refusant le bénéfice de la protection fonctionnelle et de la décision de rejet implicite de son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Rennes a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par le requérant. Il a ainsi, par une motivation suffisante, exposé que les faits, évoqués de manière suffisamment précise, pour lesquels M. B... sollicitait le bénéfice de la protection fonctionnelle, n'étaient pas au nombre de ceux visés par les dispositions, qu'il a citées, de l'article 11 de la loi du

13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires obligeant l'autorité administrative à accorder cette protection. Il a également écarté le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, ainsi que trois autres moyens qu'il a considérés comme inopérants. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur la légalité des décisions contestées :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " I. - A raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, le fonctionnaire ou, le cas échéant, l'ancien fonctionnaire bénéficie, dans les conditions prévues au présent article, d'une protection organisée par la collectivité publique qui l'emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire. (...) / IV. La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ".

4. M. B... a saisi l'EPSM Etienne Gourmelen d'une demande de protection fonctionnelle en raison de la transmission sans son accord par cet employeur à la Caisse des dépôts et consignations, en vue de l'attribution d'une allocation temporaire d'invalidité, de l'entier rapport d'une expertise médicale réalisée en octobre 2010 par un médecin psychiatre, dans le cadre de l'instruction de sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 30 juin 2010, transmission qu'il estime avoir été effectuée illégalement, en violation du secret médical et du secret professionnel. Toutefois, cette transmission, bien qu'illégale, ainsi que l'a reconnu le tribunal administratif, et bien que ressentie par l'intéressé comme une atteinte à sa vie personnelle, ne peut être regardée comme constituant une " atteinte volontaire à l'intégrité de la personne " de cet agent, au sens du IV de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, ni comme une atteinte subie par celui-ci à raison de ses fonctions au sens du I de cet article, contre laquelle l'hôpital aurait été tenu de lui accorder sa protection. Il suit de là que l'autorité compétente n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires en refusant au requérant la protection fonctionnelle qu'il sollicitait.

5. En deuxième lieu, M. B..., pour démontrer l'illégalité des décisions qu'il conteste, ne peut utilement faire valoir que le refus de la protection fonctionnelle lui cause un préjudice tant médical, compte tenu des répercussions de cette décision sur sa santé psychique, que matériel, compte tenu du fait qu'il est laissé seul pour mettre en œuvre les actions nécessaires pour faire valoir ses droits, ni que l'EPSM l'a " particulièrement exposé ", alors qu'il était tenu, en tant qu'employeur, de préserver sa santé.

6. En troisième lieu, si M. B... invite la cour, en conclusion de sa requête d'appel, à procéder, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, à l'" examen des moyens contenus dans la requête introductive d'instance et les écritures qui ont suivi devant les premiers juges ", et " renvoie à ses écritures de première instance et à l'ensemble des moyens et pièces visées ", il ne fournit pas les précisions indispensables à l'appréciation de leur bien-fondé ni ne joint à sa requête une copie de ses écritures de première instance contenant ces précisions.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction de la requête de M. B... ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EPSM Etienne Gourmelen, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que réclame M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'EPSM fondées sur les mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... et les conclusions de l'EPSM Etienne Gourmelen présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'établissement public de santé mentale Etienne Gourmelen.

Délibéré après l'audience du 30 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2023.

Le rapporteur,

G.-V. VERGNE

La présidente,

C. BRISSON

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au préfet de la Manche, en ce qui le concerne, et à tous mandataires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT01010


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01010
Date de la décision : 15/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SELARL VALADOU JOSSELIN & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-15;23nt01010 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award