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21/12/2023 | FRANCE | N°21BX01850

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 21 décembre 2023, 21BX01850


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 25 juin 2018 par lequel la rectrice de l'académie de Bordeaux l'a affectée au ... à ... à compter du 1er septembre 2018, ensemble la décision par laquelle le ministre de l'éducation nationale a implicitement rejeté son recours hiérarchique formé contre cet arrêté.



Par un jugement n° 1802914 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
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Procédure devant la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 25 juin 2018 par lequel la rectrice de l'académie de Bordeaux l'a affectée au ... à ... à compter du 1er septembre 2018, ensemble la décision par laquelle le ministre de l'éducation nationale a implicitement rejeté son recours hiérarchique formé contre cet arrêté.

Par un jugement n° 1802914 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 mai 2021 et le 18 novembre 2022, ainsi qu'un mémoire récapitulatif non communiqué enregistré le 30 novembre 2023, Mme D..., représentée par Me Mandile, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 23 février 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté de la rectrice de l'académie de Bordeaux en date du 25 juin 2018, ensemble la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale de réexaminer le dossier d'affectation de Mme D... en tenant compte de son état de santé et de sa vie familiale ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas démontré que onze autres candidats présentaient un degré de priorité supérieur au sien ;

- la décision méconnaît le droit de mener une vie privée et familiale normale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle a pour effet de l'affecter à plus de 100 kilomètres de son domicile conjugal ;

- elle méconnaît l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires en ce qu'elle ne prend pas suffisamment en compte la gravité de son état de santé ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle au regard de son état de santé.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 novembre 2023, la rectrice de l'académie de Bordeaux conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 30 novembre 2023 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'éducation ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès,

- et les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... est professeur certifié d'anglais. Par une décision du 1er septembre 2017, elle a été affectée en tant que remplaçante dans la zone des Hautes-Pyrénées. Après avoir participé aux opérations de mutation des professeurs du second degré pour la rentrée scolaire 2018-2019, Mme D... a été affectée, par un arrêté de la rectrice de l'académie de Bordeaux en date du 25 juin 2018, au ... à ... dans les Landes à compter du 1er septembre 2018. Mme D... relève appel du jugement du 23 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2018, ensemble la décision implicite rejet de son recours hiérarchique.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. L'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 dans sa version applicable au litige dispose que : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. (...) / Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, (...), aux fonctionnaires handicapés relevant de l'une des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail (...) ". Aux termes des deux premiers alinéas de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " La liberté d'opinion est garantie aux fonctionnaires. Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille ou de grossesse, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. ". L'alinéa 3 de ce même article dispose : " Toutefois des distinctions peuvent être faites afin de tenir compte d'éventuelles inaptitudes physiques à exercer certaines fonctions. " Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. En premier lieu, en se bornant à relever " l'absence de précisions afférentes au prétendu degré de priorité de onze enseignants ", Mme D..., qui ne conteste pas le montant du barème de 606,2 points qu'elle a obtenu prenant en compte le rapprochement de conjoint et les années de séparation, n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'elle justifiait d'un nombre de points supérieurs à certains des collègues ayant obtenu leur mutation sur les postes convoités.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'affectation au sein du collège de Saint Pierre du Mont, situé dans le département des Landes, est conforme au treizième vœu formulé par Mme D... pour le mouvement intra-académique de 2018 correspondant à une affectation dans tout établissement du département des Landes. En outre, sa situation familiale a été prise en compte, dès lors qu'elle a obtenu à l'occasion de l'examen de sa situation, sans que cela ne soit contesté, une bonification de ses points, attribués en fonction du barème académique utilisé pour classer les demandes, au titre du rapprochement de conjoint avec enfant et de deux années de séparation. Si Mme D... fait valoir que sa résidence familiale est établie à ... et qu'elle est la mère d'un enfant né en 2012, cette circonstance ne saurait suffire à faire regarder la décision contestée comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme D... souffre d'endométriose depuis 2011 ce qui l'a contrainte à être placée en arrêt-maladie à de nombreuses reprises et à subir une hystérectomie le 26 mars 2018. S'il ressort des éléments médicaux des 13 et 30 août 2018 et du rapport d'expertise médical établi par le docteur E... B... en date du 25 septembre 2020, que la pathologie de Mme D... est incompatible avec les longs trajets en voiture et nécessite sa mutation au plus près de son domicile afin de limiter les temps de trajet, cette circonstance ne crée pas à elle-seule une obligation pour l'administration de faire droit à une demande d'affectation déterminée de l'agent concerné. Par ailleurs, à la date de l'arrêté de mutation contesté, aucune bonification médicale n'avait été attribuée à Mme D... à raison de son état de santé et le certificat médical du docteur C... établi le 30 août 2018 permettait de considérer que l'état de santé de Mme D... n'était que temporairement incompatible avec la réalisation de longs trajets en voiture. Par suite, les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué méconnaitrait les dispositions de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 en ce qu'il ne prend pas suffisamment en compte la gravité de son état de santé et serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté 25 juin 2018. Sa requête doit par suite être rejetée, y compris les conclusions présentées à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Bordeaux.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 décembre 2023.

La présidente-assesseur,

Christelle Brouard-Lucas

Le président-rapporteur,

Jean-Claude PauzièsLa greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX01850 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01850
Date de la décision : 21/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : MANDILE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-21;21bx01850 ?
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