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21/12/2023 | FRANCE | N°22LY03323

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 21 décembre 2023, 22LY03323


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2021 par lequel le préfet de la Savoie lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire.



Par un jugement n° 2202940 du 19 juillet 2022, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour

Par une requête enregistrée le 17 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Mathis, dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2021 par lequel le préfet de la Savoie lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire.

Par un jugement n° 2202940 du 19 juillet 2022, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Mathis, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du 20 décembre 2021 ;

2°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet a commis une erreur manifeste dans l'application des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il justifie de son état civil ; le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire enregistré le 23 novembre 2023, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant camerounais, déclare être né en août 2000 et être entré irrégulièrement en France le 8 avril 2017. Il relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 juillet 2022 qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 20 décembre 2021 du préfet de la Savoie lui refusant un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.

2. Pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Savoie s'est fondé, d'une part, sur la circonstance que M. A... n'entrait pas dans le champ de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que son placement à l'aide sociale à l'enfance a été levé à la suite de la remise en cause de la présomption de minorité dont il bénéficiait, qu'il ne justifie pas du caractère réel et sérieux de la formation suivie, que la structure d'accueil n'a pas émis d'avis sur son insertion sociale et qu'il a des attaches dans son pays d'origine et, d'autre part, qu'en méconnaissance de l'article R. 431-10 du code civil, ayant produit des actes d'état-civil frauduleux, il ne justifiait pas de son état civil.

3. En premier lieu, l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers prévoit, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dernières dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

4. Pour écarter les actes d'état-civil produits par M. A..., le préfet s'est fondé sur l'analyse documentaire d'un acte de naissance produit par l'intéressé numéroté 1131/R33/2000, réalisée en avril 2018 par le service de police aux frontières de Chambéry, qui a émis un avis défavorable s'agissant de l'authenticité de cet acte au motif que le sceau de l'autorité de délivrance est contrefait. Il s'est également fondé sur l'analyse documentaire réalisée en mai 2017 d'un autre acte de naissance produit par l'intéressé, numéroté 42/105/60, qui conclut également à une contrefaçon en raison notamment de sceaux de très mauvaise qualité. Par ailleurs, par une ordonnance du 5 juin 2018, le tribunal de grande instance de Chambéry a ordonné la mainlevée du placement de M. A... au motif que la présomption de minorité n'était, au vu de ces avis, plus acquise. Si M. A... a produit devant le tribunal de nouveau une copie de l'acte de naissance numéroté 1131/R33/2000, sur lequel a été apposé un tampon du vice-consul le 12 janvier 2022 selon lequel il s'agit d'une " copie certifiée conforme à l'original ", sans que l'on sache si l'original n'est pas justement le document qui a été jugé contrefait, ce nouveau document ne remet pas utilement en cause ces constatations. Au vu de ces éléments, il est établi que cet acte de naissance n'est pas authentique et ne permet donc pas d'établir de manière certaine l'identité de l'intéressé et en particulier son âge. Par ailleurs, le passeport que M. A... produit, qui lui a été délivré par les autorités camerounaises le 14 octobre 2019, a pu être établi sur la base d'un acte de naissance apocryphe et ne constitue pas un acte d'état civil mais un document de voyage pour lequel la présomption de validité résultant des dispositions de l'article 47 du code civil ne s'applique pas. Cette pièce ne permet donc pas davantage d'établir la réalité de son état civil. Par suite, le moyen tiré de ce que M. A... justifie de son état civil ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. (...) ".

6. Compte tenu de ce qui vient d'être indiqué sur l'état civil de M. A..., le préfet a pu refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions au motif, notamment, que son placement à l'aide sociale à l'enfance avait été levé à la suite de doutes sur sa minorité. Dans ces conditions, et alors au demeurant que M. A... ne conteste pas les autres motifs que le préfet lui a opposés pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

7. Pour le surplus, à l'appui de ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour, M. A... soulève les mêmes moyens que ceux déjà soulevés en première instance, tirés de ce que la décision en litige méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

8. Il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et que la décision fixant le pays de renvoi n'est pas illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Ces moyens ne peuvent donc qu'être écartés.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée dans toutes ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Duguit-Larcher, présidente de la formation de jugement ;

M. Chassagne, premier conseiller ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.

La rapporteure,

C. DjebiriLa présidente de la formation de jugement,

A. Duguit-Larcher

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY03323

ar


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03323
Date de la décision : 21/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme DUGUIT-LARCHER
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : MATHIS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-21;22ly03323 ?
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