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27/12/2023 | FRANCE | N°23NC00878

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 27 décembre 2023, 23NC00878


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 31 mai 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite.



Par un jugement n° 2205433 du 7 novembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 mars 2023 et le 12 mai 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 31 mai 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite.

Par un jugement n° 2205433 du 7 novembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 mars 2023 et le 12 mai 2023, Mme C... B..., représentée par Me Burkatzki, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 novembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 31 mai 2022 ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une irrégularité tenant à son absence de signature et à une motivation insuffisante ;

- la compétence du signataire de l'arrêté n'est pas établie ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 27 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante albanaise, est entrée irrégulièrement en France le 7 avril 2017 avec ses parents, son frère et ses sœurs. En 2021, elle a sollicité un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 31 mai 2022, la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Mme B... fait appel du jugement du 7 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il résulte de l'instruction que la minute du jugement a été signée par le rapporteur, par le président et par le greffier, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées manque en fait et doit être écarté.

3. En second lieu, il ressort des motifs mêmes du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments développés par la requérante dans sa demande, ont répondu de manière suffisamment précise aux moyens que celle-ci avait développés à l'encontre de l'arrêté en litige. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 4 août 2022, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, la préfète du Bas-Rhin a donné délégation à M. A... D..., directeur des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté manque en fait.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Mme B... fait valoir qu'elle est entrée à l'âge de quatorze ans en France, où elle a poursuivi une scolarité exemplaire grâce notamment à sa maîtrise de la langue française, et qu'elle n'a plus aucune attache familiale en Albanie où elle n'est pas retournée depuis cinq ans. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée s'est maintenue en France de manière irrégulière durant l'année qui a suivi sa majorité sans chercher à régulariser sa situation. Elle est célibataire et sans enfant. Si elle se prévaut de la délivrance à sa mère d'un récépissé de demande de titre de séjour que la préfète du Bas-Rhin lui a délivré en exécution d'un jugement du 13 avril 2023 rendu par le tribunal administratif de Strasbourg, cette circonstance n'est pas de nature à lui conférer un droit à demeurer en France alors qu'elle a vocation à constituer sa propre cellule familiale. En outre, le parcours scolaire de l'intéressée, qui a suivi une scolarité en lycée professionnel à l'issue de laquelle elle a obtenu un baccalauréat professionnel dans la spécialité " services de proximité et vie locale " ainsi qu'un certificat d'aptitude professionnelle d'" agent de prévention et médiation " n'est pas de nature à lui conférer un droit à un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées. Dans ces conditions, en dépit de ses efforts d'intégration, notamment par l'apprentissage du français et son investissement au sein d'une association caritative, la préfète du Bas-Rhin n'a pas, en prenant la décision contestée, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de ce que la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.

7. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

8. Au regard des éléments exposés au point 6, Mme B... ne justifie pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu ces dispositions doit, par suite, être écarté.

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré de ce que la préfète du Bas-Rhin aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté sur la situation de la requérante doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, la requête de l'intéressée doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Barteaux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 décembre 2023

Le rapporteur,

Signé : S. BARTEAUX

Le président,

Signé : Ch. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 23NC00878 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00878
Date de la décision : 27/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : BERARD JEMOLI SANTELLI BURKATZKI BIZZARRI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-27;23nc00878 ?
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