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29/12/2023 | FRANCE | N°22TL22185

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 29 décembre 2023, 22TL22185


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2021 du préfet de l'Hérault portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2203214 du 4 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête du 3 novembre 2022 et un mémoire en com

munication de pièces du 13 juin 2023, M. A... C..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :



1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2021 du préfet de l'Hérault portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 2203214 du 4 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête du 3 novembre 2022 et un mémoire en communication de pièces du 13 juin 2023, M. A... C..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 octobre 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2021 du préfet de l'Hérault portant refus de certificat de résidence et obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) subsidiairement d'ordonner au préfet de l'Hérault le réexamen de sa situation dans un délai de deux mois et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'État, au bénéfice de son conseil, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de refus de certificat de résidence est entachée d'un vice de procédure pour absence de saisine de la commission du titre de séjour alors qu'il séjourne sur le territoire français depuis plus de dix ans et que l'article 6-1 de l'accord franco-algérien prévoit la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans à un ressortissant algérien qui habite en France depuis plus de dix ans ; contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, le préfet a pris en considération cet article en estimant qu'il ne justifiait pas d'élément probant de nature à justifier une présence habituelle et continue en France depuis plus de dix ans ;

- le préfet de l'Hérault a méconnu l'article 6-7 de l'accord franco-algérien et le 3° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de ce que son état de santé ne permet pas sa prise en charge en Algérie ; en effet, il est soigné depuis de nombreuses années sur le plan cardiaque et hépatique ; de plus, il est traité depuis le 3 octobre 2018, par radiothérapie, pour un cancer ; il souffre de différentes affections pour lesquelles il ne peut bénéficier d'une prise en charge effective dans son pays d'origine ;

- le préfet a méconnu les articles 6-1 et 6-5 de l'accord franco-algérien et commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui renouveler son certificat de résidence alors qu'il justifie être entré en France en 2007 et y avoir résidé entre 2007 et 2016, jusqu'à sa régularisation à cette date ; il réside en France, aux côtés de sa fille, titulaire d'une carte de résident, et qui le prend en charge ; il n'a plus d'attache dans son pays d'origine étant séparé depuis l'année 2000, alors que, par ailleurs, son fils est résident en Suisse.

Par une décision du 11 janvier 2023, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a accordé à M. A... C... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par un mémoire en défense du 30 novembre 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête de M.A... C....

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours a été entendu au cours de l'audience publique :

-le rapport de M. Bentolila, président-assesseur,

-et les observations de Me Ruffel, représentant M. A... C....

Considérant ce qui suit :

1.M. A... C..., né le 4 octobre 1949 et de nationalité algérienne, qui serait entré en France en 2007, a obtenu le 4 octobre 2016 son admission au séjour en qualité " d'étranger malade " par un premier certificat de résidence valable du 5 septembre 2016 au 4 septembre 2017, puis a obtenu un deuxième certificat de résidence en cette qualité valable du 12 avril 2019 au 11 avril 2020. Il a demandé, le 29 mars 2021 le renouvellement de son certificat de résidence en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 8 décembre 2021 le préfet de l'Hérault a refusé de lui renouveler ce certificat de résidence et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

2. M. A... C... relève appel du jugement du 4 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 8 décembre 2021.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1° au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ". Aux termes de l'article L. 423-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 432-13 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative : / 1° lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance (...) / 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1 ". Ces dispositions s'appliquent aux ressortissants algériens lorsqu'ils se trouvent dans une situation entrant à la fois dans les prévisions de l'accord franco-algérien et dans celles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comme c'est le cas en l'espèce.

4. Il ne ressort pas de sa demande de certificat de résidence que M. A... se serait prévalu des stipulations précitées du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par ailleurs, le préfet de la Haute-Garonne pour refuser la délivrance d'un certificat de résidence à l'intéressé ne s'est pas fondé sur ces stipulations. Dans ces conditions, le moyen invoqué tiré de l'absence de consultation de la commission du titre de séjour doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ". Aux termes de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui comporte des dispositions de procédure relatives à la délivrance de titres de séjour aux étrangers malades qui sont applicables aux ressortissants algériens : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Enfin aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

6. Pour refuser le renouvellement du certificat de résidence " étranger malade " de M. A... C..., le préfet de l'Hérault s'est référé à l'avis émis le 1er juin 2021 par le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration selon lequel, si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont M. A... C... est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et voyager sans risque et a estimé qu'il n'avait produit aucun document susceptible de contredire cet avis.

7. La partie qui justifie de l'avis d'un collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié et effectivement accessible dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

8. M. A... C... expose être porteur de plusieurs pathologies lourdes dont la prise en charge effective est rendue impossible dans son pays d'origine. Toutefois, à cet égard, il ne produit, pas plus en appel qu'en première instance, de justificatifs médicaux selon lesquels il ne pourrait pas bénéficier d'une prise en charge effective des pathologies dont il souffre en Algérie, ni quant au fait qu'il ne pourrait pas y voyager sans risque. Les moyens invoqués par l'appelant tirés de la violation du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent donc être écartés.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ".

10. Tout d'abord, et comme il a été dit précédemment, M. A... C... n'a pas présenté de demande de certificat de résidence sur le fondement des stipulations précitées du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et le préfet ne s'est pas fondé sur ces stipulations pour lui refuser un certificat de résidence. En tout état de cause, l'appelant ne justifie pas, par les pièces versées, une présence ininterrompue en France de dix ans, à la date du refus de certificat de résidence.

11. Par ailleurs, si l'intéressé se prévaut de la présence en France de sa fille, en situation régulière, il ne justifie ni de la réalité, ni, à fortiori, de l'intensité des liens qui l'uniraient à celle-ci, alors qu'il ne conteste pas l'existence d'attaches familiales fortes en Algérie, où se trouvent deux de ses enfants.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami , première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22TL22185

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22185
Date de la décision : 29/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-29;22tl22185 ?
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