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24/04/2003 | FRANCE | N°99BX01477

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ere chambre, 24 avril 2003, 99BX01477


Vu la requête, enregistrée le 18 juin 1999 au greffe de la cour, présentée pour la SA EURODECOR, ayant son siège ..., par Me Y..., avocat ;

la SA EURODECOR demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 23 avril 1999 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 77.109,86 F (11.755,32 euros), assortie des intérêts au taux légal correspondant aux travaux qu'elle a réalisés en qualité de sous-traitant des établissements Dupin ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer l

a dite somme majorée des intérêts à compter du 27 janvier 1993 et la capitalisation ...

Vu la requête, enregistrée le 18 juin 1999 au greffe de la cour, présentée pour la SA EURODECOR, ayant son siège ..., par Me Y..., avocat ;

la SA EURODECOR demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 23 avril 1999 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 77.109,86 F (11.755,32 euros), assortie des intérêts au taux légal correspondant aux travaux qu'elle a réalisés en qualité de sous-traitant des établissements Dupin ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer la dite somme majorée des intérêts à compter du 27 janvier 1993 et la capitalisation des intérêts le 24 mars 1999 ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 5.000 F au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Classement CNIJ : 39-05-01-01-03 C

17-03-02-10

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ;

Vu l'article L. 143-6 du code du travail ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2003 :

- le rapport de M. X... ;

- et les conclusions de M. Bec, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SA EURODECOR, qui est intervenue dans les travaux de construction de la trésorerie générale du Lot sans être liée au maître d'ouvrage par contrat et sans avoir été agréée par lui en qualité de sous-traitante, a présenté le 27/01/1993 une opposition au règlement du décompte définitif à la société Dupin, titulaire du lot menuiseries extérieures ; que l'Etat ayant néanmoins payé la société Dupin, la SA EURODECOR, qui n'a pu obtenir le règlement de ses prestations par cette société, mise peu de temps après en liquidation judiciaire, a demandé devant le tribunal administratif de Toulouse la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi d'une part sur le fondement du droit au paiement direct du sous-traitant, d'autre part sur la base de la faute qu'auraient commise les services de l' Etat en ne la faisant pas bénéficier du privilège prévu à l'article L 146-3 du code du travail ; que devant la Cour, la société requérante abandonne expressément ses conclusions relatives au droit au paiement direct du sous-traitant et ne demande plus la condamnation de l'Etat que sur le terrain de la faute ayant consisté pour le maître de l'ouvrage à payer la société Dupin alors qu'il était saisi d'une opposition de la SA EURODECOR, laquelle étant faite sur le terrain du privilège prévu à l'article L 146-3 du code du travail, ne nécessitait selon elle aucune formalité particulière pour être recevable ; que dans le dernier état de ses conclusions, elle demande toutefois que la cour se déclare incompétente au profit des juridictions de l'ordre judiciaire ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant que l'article L. 143-6 du code du travail, dont l'origine remonte au décret du 26 pluviôse an Il modifié par la loi du 25 juillet 1891, dispose, dans son premier alinéa, que les sommes dues aux entrepreneurs de tous travaux ayant le caractère de travaux publics ne peuvent être frappées de saisie-arrêt ni d'opposition au préjudice soit des ouvriers auxquels des salaires sont dûs, soit des fournisseurs qui sont créanciers, à raison de fournitures de matériaux et d'autres objets servant à la construction des ouvrages ; que le second alinéa du même article spécifie que les sommes dues aux ouvriers sont payées de préférence à celles dues aux fournisseurs ;

Considérant que ces dispositions ont pour effet de conférer, notamment aux fournisseurs des entreprises titulaires d'un marché de travaux publics, un droit de paiement préférentiel, à raison des créances qu'ils détiennent sur ces dernières au titre des fournitures et matériaux qu'ils apportent pour l'exécution du marché ; que la revendication du privilège par le fournisseur d'une entreprise titulaire d'un tel marché tend ainsi à obtenir de la personne publique maître de l'ouvrage, le paiement, en lieu et place du titulaire du marché défaillant, de la créance que détient le fournisseur sur celui-ci, par prélèvement sur les sommes dues au titulaire au titre de l'exécution du marché ;

Considérant que les litiges nés de l'exécution d'un marché de travaux publics et opposant des participants à l'exécution de ces travaux ressortissent, en principe, à la compétence de la juridiction administrative en vertu des dispositions de l'article 4 du titre 2 de la loi du 28 pluviôse an VIII ; qu'il n'en va autrement que lorsque les parties en cause sont unies par un contrat de droit privé ou lorsque s'élève une contestation sur l'étendue d'un privilège ; que si tel est le cas s'agissant du privilège régi par l'article L. 143-6 du code du travail, nonobstant la circonstance que le fournisseur réclame le montant de la créance qu'il détient sur l'entrepreneur de travaux publics à la personne publique maître de l'ouvrage, il ressort de l'instruction que la SA EURODECOR, qui a fabriqué et posé les menuiseries en aluminium prévues au marché pour le compte de la société des établissements Dupin, titulaire du marché, n'a pas saisi le maître de l'ouvrage, par son courrier du 27 janvier 1993, d'une demande d'opposition sur le terrain du privilège du fournisseur mais sur le fondement de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, en réclamant expressément la mise en place du paiement direct prévu par les dispositions de l'article 6 de cette loi alors que les dispositions de l'article L. 146-3 du code du travail ne confèrent quant à elles aucun droit à un paiement direct des travaux effectués par voie de sous-traitance ; que le litige ne portant dès lors pas sur l'étendue de ce privilège, la juridiction administrative est seule compétente pour se prononcer sur une action en responsabilité fondée sur la faute qu'aurait commise l'Etat en ne procédant pas au blocage des fonds dûs à l'entrepreneur principal alors qu'il était saisi d'une opposition de la SA EURODECOR ;

Au fond :

Considérant que l'opposition de la SA EURODECOR était fondée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, non sur le privilège du fournisseur mais sur le droit à paiement direct du sous-traitant ; qu'il est constant que la SA EURODECOR n'avait pas été agréée par le maître de l'ouvrage et ne pouvait d'ailleurs plus l'être dans la mesure où elle a présenté sa demande d'agrément après réception des travaux ; que les services de l'Etat n'ont dès lors commis aucune faute en ne donnant pas suite à sa demande d'opposition à paiement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA EURODECOR n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 77.109,86 F (11.755,32 euros) ;

Sur l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la SA EURODECOR une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DE C I D E :

ARTICLE 1er : la requête de la SA EURODECOR est rejetée.

2

99BX01477


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 99BX01477
Date de la décision : 24/04/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CHOISSELET
Rapporteur ?: M. DESRAMÉ
Rapporteur public ?: M. BEC
Avocat(s) : MONROZIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2003-04-24;99bx01477 ?
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