La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2005 | FRANCE | N°01BX02225

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4eme chambre (formation a 3), 14 avril 2005, 01BX02225


Vu la requête, enregistrée le 10 septembre 2001, présentée pour la COMMUNE DE SALAZIE, représentée par son maire, par la SCP Belot-Akhoun-Creguet-Hameroux ; la COMMUNE DE SALAZIE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000149 du 23 mai 2001 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion l'a condamnée à verser les sommes de 11 281,71 F (1 719,89 €) à M. X, 15 000 F (2 286,74 €) à Mme Z et 368 190,75 F (56 130,32 €) au Fonds de garantie des victimes d'infractions en réparation des conséquences dommageables du décès de Mme ;

2°)

de rejeter les demandes de M. Daniel X, M. Daniel Y et Mme Evelyne Z et du Fonds de...

Vu la requête, enregistrée le 10 septembre 2001, présentée pour la COMMUNE DE SALAZIE, représentée par son maire, par la SCP Belot-Akhoun-Creguet-Hameroux ; la COMMUNE DE SALAZIE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000149 du 23 mai 2001 par lequel le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion l'a condamnée à verser les sommes de 11 281,71 F (1 719,89 €) à M. X, 15 000 F (2 286,74 €) à Mme Z et 368 190,75 F (56 130,32 €) au Fonds de garantie des victimes d'infractions en réparation des conséquences dommageables du décès de Mme ;

2°) de rejeter les demandes de M. Daniel X, M. Daniel Y et Mme Evelyne Z et du Fonds de garantie des victimes d'infractions devant le Tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2005 :

- le rapport de M. Laborde, rapporteur ;

- les observations de Me Prince, pour M. X, M. Y et Mme Z, et de Me Gibaud, pour le Fonds de garantie des victimes d'infraction ;

- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la COMMUNE DE SALAZIE :

Considérant qu'il ressort des pièces d'état civil produites au dossier que M. Daniel X, M. Daniel Y et Mme Z, respectivement mari, fils et belle-fille de la victime, Mme , avaient qualité pour saisir la juridiction administrative d'une demande tendant à la condamnation de la COMMUNE DE SALAZIE à réparer les préjudices qu'ils ont subis à la suite du décès accidentel de Mme ;

Sur l'exception de prescription quadriennale :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 modifiée relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : La prescription est interrompue par... tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance... Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ;

Considérant que le fait générateur de la créance dont M. X, M. Y et Mme Z se prévalent à l'encontre de la COMMUNE DE SALAZIE est constitué par le décès de Mme survenu le 9 août 1993 ; que les ayants droit de Mme se sont constitués partie civile devant la juridiction judiciaire en vue de la condamnation de M. Maillot, en sa qualité de maire de la COMMUNE DE SALAZIE dans l'exercice de ses fonctions, dans le délai de la prescription quadriennale ; que ce recours juridictionnel ayant trait au même fait générateur, le décès de Mme Mariti, il a eu pour effet d'interrompre la prescription des créances détenues par les intéressés, alors même qu'une loi pénale permet au juge judiciaire de condamner directement une collectivité territoriale ; que l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion rendu le 14 octobre 1999 et passé en force de chose jugée a fait courir un nouveau délai de quatre ans à compter du 1er janvier 2000 ; que M. Nieutin, M. Derieux et Mme Brucelle ayant saisi la COMMUNE DE SALAZIE d'une demande d'indemnisation des conséquences dommageables du décès de Mme Mariti le 3 mars 2000, l'exception de prescription quadriennale doit être écartée ;

Considérant, d'autre part, que l'article 706-11 du code de procédure pénale dispose : Le Fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenus à un titre quelconque d'en assurer la réparation... ; que le Fonds de garantie des victimes d'infractions, qui a indemnisé M. Nieutin, M. Derieux et Mme Brucelle des conséquences dommageables du décès de Mme Mariti, s'est trouvé subrogé dans leurs droits à réparation ; que le Fonds, qui agit à l'encontre de la COMMUNE DE SALAZIE en vertu de la subrogation légale créée par l'article 706-11 du code de procédure pénale précité, peut se prévaloir à ce titre des effets attachés aux actions de M. Nieutin, M. Derieux et Mme Brucelle ; que la demande présentée par le Fonds à la COMMUNE DE SALAZIE le 18 août 2000, comme celle formulée devant le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, qui toutes deux avaient pour objet le remboursement des sommes versées aux ayants droit de Mme Mariti, n'étaient donc pas atteintes par la prescription ;

Sur la responsabilité de la COMMUNE DE SALAZIE :

Considérant que le 9 août 1993, Mme Mariti a été victime d'une chute mortelle alors qu'elle empruntait une passerelle surplombant la rivière Fleurs jaunes , dont les planches ont cédé lors de son passage ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 161-3 du code rural : Tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé. ; que la passerelle à l'origine de l'accident, située sur le territoire de la COMMUNE DE SALAZIE, était affectée à l'usage du public ; qu'elle ne saurait être regardée comme un accessoire nécessaire de la route départementale 52, quand bien même elle constituerait un passage de substitution quand cette route est impraticable ; que la circonstance que le département de la Réunion a procédé à des travaux de réfection de la passerelle dans le courant de l'année 1981 ne permet ni d'affirmer que cette collectivité avait la charge de l'entretien de l'ouvrage, ni d'inverser la présomption d'appartenance de la passerelle à la COMMUNE DE SALAZIE ; qu'ainsi l'ouvrage en cause doit être regardé comme la propriété de la COMMUNE DE SALAZIE, laquelle était chargée de son entretien ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que l'accident dont a été victime Mme Mariti a eu pour cause directe l'état de dégradation de la passerelle ; que l'apposition par la COMMUNE DE SALAZIE d'un panneau signalant le danger, à la supposer établie, était en tout état de cause insuffisante au regard de la gravité des risques encourus ; que l'absence de mesure adéquate pour pallier le danger est constitutive d'un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public de nature à engager la responsabilité de la COMMUNE DE SALAZIE à l'égard des usagers de cet ouvrage, alors même que la commune aurait été dans l'ignorance de son obligation d'entretien et n'aurait pas été avertie de l'état de la passerelle ;

Sur la réparation :

Considérant, d'une part, que ni la COMMUNE DE SALAZIE, ni M. Nieutin n'établissent que le tribunal administratif aurait fait une appréciation inexacte du préjudice économique subi par ce dernier en retenant le montant de 138 190,75 F (21 067,04 €) fixé par la commission d'indemnisation des victimes d'infractions pénales qui a tenu compte pour son évaluation du prix du franc de rente viagère applicable à la perte annuelle des revenus que Mme Mariti consacrait à l'entretien du ménage ; que le tribunal administratif a fait une juste appréciation du préjudice moral subi en le fixant à 100 000 F (15 244,90 €) pour M. Nieutin, à la même somme pour M. Derieux, à 15 000 F (2 286,74 €) pour Mme Brucelle et à la même somme pour chaque petite-fille de la victime ; qu'enfin M. Nieutin a justifié devant le tribunal d'un préjudice matériel consécutif aux frais funéraires engagés par lui pour un montant de 11 281,71 F (1 719,89 €) ;

Considérant, d'autre part, que le Fonds de garantie des victimes d'infractions est, dans la limite de la somme de 368 190,75 F (56 130,32 €) qu'il a versée aux ayants droit de Mme Mariti, subrogé dans leurs droits à être indemnisés ; qu'il était ainsi fondé à demander la condamnation de la COMMUNE DE SALAZIE à lui rembourser ladite somme ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE SALAZIE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion l'a déclarée responsable du décès de Mme Mariti et l'a condamnée à verser les sommes de 11 281,71 F (1 719,89 €) à M. Nieutin au titre de son préjudice matériel, 15 000 F (2 286,74 €) à Mme Brucelle au titre de son préjudice moral et 368 190,75 F (56 130,32 €) au Fonds de garantie des victimes d'infractions subrogé dans les droits des victimes pour les autres indemnisations ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner la COMMUNE DE SALAZIE à payer à M. Nieutin, M. Derieux et Mme Brucelle une somme globale de 1 300 € au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens et au Fonds de garantie des victimes d'infractions une somme de 1 300 € au même titre ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SALAZIE et les conclusions incidentes présentées par M. Nieutin, M. Derieux et Mme Brucelle sont rejetées.

Article 2 : La COMMUNE DE SALAZIE versera à M. Nieutin, M. Derieux et Mme Brucelle la somme de 1 300 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La COMMUNE DE SALAZIE versera au Fonds de garantie des victimes d'infraction la somme de 1 300 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

4

01BX02225


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 01BX02225
Date de la décision : 14/04/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ERSTEIN
Rapporteur ?: M. Jean-Louis LABORDE
Rapporteur public ?: M. CHEMIN
Avocat(s) : SCP BELOT-AKHOUN-CREGUT-HAMEROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-04-14;01bx02225 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award