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30/12/2005 | FRANCE | N°02BX01644

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3eme chambre (formation a 3), 30 décembre 2005, 02BX01644


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 7 août 2002, présentée pour la SOCIETE CHANTIERS MODERNES ayant son siège ... par Me Z... ;

Elle demande à la cour :

- à titre principal, d'annuler le jugement en date du 13 juin 2002 par lequel le tribunal administratif de Pau l'a condamnée à verser aux Mutuelles du Mans assurances une indemnité de 50 938,43 euros à la suite de l'effondrement, le 2 mars 1997, d'une passerelle à Biarritz ;

- à titre subsidiaire, de réformer ce jugement en tant qu'il a retenu son entière responsabilité dans l'effondrement

de cette passerelle et de condamner les Mutuelles du Mans, venant aux droits de l...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 7 août 2002, présentée pour la SOCIETE CHANTIERS MODERNES ayant son siège ... par Me Z... ;

Elle demande à la cour :

- à titre principal, d'annuler le jugement en date du 13 juin 2002 par lequel le tribunal administratif de Pau l'a condamnée à verser aux Mutuelles du Mans assurances une indemnité de 50 938,43 euros à la suite de l'effondrement, le 2 mars 1997, d'une passerelle à Biarritz ;

- à titre subsidiaire, de réformer ce jugement en tant qu'il a retenu son entière responsabilité dans l'effondrement de cette passerelle et de condamner les Mutuelles du Mans, venant aux droits de la ville de Biarritz, le district Biarritz-Anglet-Bayonne, la société Saunier Techna et la société Socotec à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre ;

- de condamner les Mutuelles du Mans, venant aux droits de la ville de Biarritz, le district Biarritz-Anglet-Bayonne, la société Saunier Techna et la société Socotec à lui verser une somme de 4 573,47 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

………………………………………………………………………………………………

Vu l'ensemble des pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement convoquées à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2005 ;

- le rapport de Mme Fabien, premier conseiller ;

- les observations de Me Y... pour la SOCIETE CHANTIERS MODERNES, de Me A... pour la Mutelle du Mans, de Me B... pour la société Adour Travaux Conseils, de Me X... pour le district Biarritz-Anglet-Bayonne,

- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, le 2 mars 1997, une trentaine de personnes ont été blessées par l'effondrement d'une passerelle située en surplomb de la grande plage de Biarritz, alors qu'elles assistaient au défilé du carnaval organisé dans cette ville ; que l'assureur de la commune de Biarritz, les Mutuelles du Mans Assurances, a, dans le cadre d'une procédure amiable, indemnisé les victimes de ce dommage de travaux publics ; qu'en se prévalant de sa double qualité de subrogée aux droits de son assurée et aux droits des victimes, elle a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner solidairement le district Bayonne-Anglet-Biarritz, la SOCIETE CHANTIERS MODERNES, la société Saunier Techna, le bureau d'études SEAMP, la société Socotec et la société Adour Travaux Conseils à lui rembourser les sommes ainsi versées ; que par le jugement attaqué du 13 juin 2002, le tribunal administratif les a mis hors de cause à l'exception de la SOCIETE CHANTIERS MODERNES qu'il a condamnée à rembourser l'intégralité de l'indemnité sollicitée ; que la SOCIETE CHANTIERS MODERNES fait appel de ce jugement en soutenant que la responsabilité de la commune de Biarritz serait engagée ;

Sur le partage de responsabilité :

Considérant que la SOCIETE CHANTIERS MODERNES a été chargée par le district Bayonne-Anglet-Biarritz, par convention conclue en 1996, de réaliser les travaux de construction de dessableurs ; que le rétrécissement de l'avenue Charles de Gaulle occasionné par ces travaux a nécessité la mise en place d'une passerelle aux fins d'accueillir provisoirement la circulation piétonnière ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que la SOCIETE CHANTIERS MODERNES n'a pas réalisé cette passerelle conformément au plan initial qu'elle avait transmis au bureau d'études SEAMP en vue de l'élaboration d'une note de calcul permettant de préciser le type de fixation et l'espacement des consoles, note ayant elle-même été soumise à la société de contrôle technique Socotec qui avait recommandé un certain type de fixation ; qu'elle a ainsi réalisé le platelage transversalement et non longitudinalement ce qui impliquait une largeur supplémentaire de 0,50 mètre et qu'elle a procédé à une surélévation de 18 centimètres ce qui ne permettait pas de respecter l'alignement avec le couronnement du mur et les fixations prévus ; que ces modifications ont eu pour effet de nuire à la stabilité de l'ouvrage et d'en diminuer la capacité porteuse ; que la SOCIETE CHANTIERS MODERNES n'a pas porté ces modifications à la connaissance du district Bayonne-Anglet-Biarritz, maître de l'ouvrage, de la commune de Biarritz, assurant, en vertu d'une convention conclue le 7 janvier 1980, une mission générale de maîtrise d'oeuvre et de conduite d'opération pour le compte du district, ni encore à celle de la société Saunier Techna assurant, en vertu d'une convention conclue avec le district en 1996, la maîtrise d'oeuvre des travaux de construction des dessableurs à l'exclusion du suivi des travaux ;

Considérant que l'absence de réalisation de la passerelle conformément au plan initial ayant fait l'objet des avis techniques constitue un manquement aux règles de l'art constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité de la SOCIETE LES CHANTIERS MODERNES ;

Considérant, cependant, qu'il résulte également de l'instruction que la passerelle, mise en place deux mois auparavant, a servi le 2 mars 1997, au cours du passage du carnaval, de tribune à des spectateurs qui y ont été refoulés en masse compte tenu du rétrécissement de l'avenue Charles de Gaulle ; que l'expert a estimé que les contraintes ainsi subies par la passerelle étaient bien supérieures à celles pour lesquelles elle avait en tout état de cause été conçue et, en particulier, qu'il s'agissait d'une charge statique mal répartie, et non d'une charge dynamique, excédant la charge maximale au mètre carré prévue ;

Considérant que la ville de Biarritz ne pouvait ignorer ni l'affluence générée traditionnellement par le carnaval, ni le rétrécissement de l'avenue Charles de Gaulle et la mise en place provisoire d'une passerelle piétonnière en surplomb de la plage ; qu'il appartenait au maire de Biarritz de prendre, dans le cadre de ses pouvoirs de police générale, les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des personnes participant ou assistant à cette manifestation, nonobstant la circonstance qu'elle était organisée par une association ; qu'alors même que la commune n'aurait été informée ni de la charge maximale de la passerelle, ni des modifications apportées lors de sa réalisation, il lui appartenait de faire vérifier l'aptitude de l'ouvrage à supporter une charge exceptionnelle, mais néanmoins prévisible et de prendre les mesures appropriées, au besoin, en modifiant l'itinéraire de la cavalcade ; qu'en s'abstenant de prendre toute mesure en ce sens, le maire de Biarritz a, ainsi que le soutient la SOCIETE LES CHANTIERS MODERNES, commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune et à atténuer sa propre responsabilité ; que cette faute est opposable aux Mutuelles du Mans Assurances, subrogée dans les droits de la commune ;

Considérant qu'à supposer que la SOCIETE CHANTIERS MODERNES ait entendu soutenir que la responsabilité du district de Bayonne-Anglet-Biarritz, de la société Saunier Techna, de la société Adour Conseil, de la société Socotec, du bureau d'études SEAMP serait également engagée, elle se borne à se référer aux conclusions de l'expert sans apporter le moindre élément de démonstration en ce sens ; qu'en conséquence, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif, d'écarter la responsabilité des autres intervenants à l'opération de travaux publics ;

Considérant qu'il sera fait une exacte appréciation des responsabilités respectives de la commune de Biarritz et de la SOCIETE CHANTIERS MODERNES en condamnant cette dernière à rembourser aux Mutuelles du Mans Assurances une somme limitée à 50 % des indemnités versées aux victimes de l'accident du 2 mai 1997, soit 25 469,22 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CHANTIERS MODERNES est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Pau l'a condamnée à verser aux Mutuelles du Mans Assurances une somme de 50 938,43 euros ; qu'il y a lieu en conséquence de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a de contraire au présent arrêt ;

Sur les appels en garantie formés par la SOCIETE LES CHANTIERS MODERNES :

Considérant que si la SOCIETE LES CHANTIERS MODERNES soutient qu'elle n'a pu faire valoir ses observations en première instance pour des raisons indépendantes de sa volonté, il ressort des pièces du dossier qu'elle a été destinataire de la requête des Mutuelles du Mans Assurances et qu'elle a, d'ailleurs, été mise en demeure par le tribunal administratif de Pau de produire ses observations en défense par un courrier dont elle a accusé réception le 10 janvier 2001 ; que ses conclusions tendant à ce que la société Saunier Techna, le bureau d'études SEAMP et la société Socotec la garantissent des condamnations prononcées à son encontre, qui n'ont pas été présentées devant le premier juge, sont irrecevables ;

Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SOCIETE LES CHANTIERS MODERNES, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser aux Mutuelles du Mans Assurances la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu, d'une part, de condamner Les Mutuelles du Mans Assurances à verser à ce titre une somme de 1 300 euros à la SOCIETE LES CHANTIERS MODERNES et, d'autre part, de rejeter les conclusions présentées au même titre par la communauté d'agglomération Bayonne-Anglet-Biarritz, la société Saunier Techna, la société Ingerop et la société Socotec ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 50 938,43 euros que la SOCIETE CHANTIERS MODERNES a été condamnée à verser aux Mutuelles du Mans Assurances par le jugement du tribunal administratif de Pau du 13 juin 2002 est ramenée à 25 469,22 euros .

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 13 juin 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt .

Article 3 : Les Mutuelles du Mans Assurances verseront à la SOCIETE CHANTIERS MODERNES une somme de 1 300 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative présentées par la communauté d'agglomération Bayonne-Anglet-Biarritz, la société Saunier Techna, la société Ingerop et la société Socotec sont rejetées.

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N° 02BX01644


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 02BX01644
Date de la décision : 30/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MARROU
Rapporteur ?: Mme Mathilde FABIEN
Rapporteur public ?: Mme JAYAT
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS L.G.H. ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-12-30;02bx01644 ?
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