Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 30 mai 2003, présentée pour M. Raymond X, demeurant ..., par Me Olivier Coudray, avocat au barreau de Paris ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 27 février 2003, par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation des décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a refusé de lui verser l'indemnité d'éloignement et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser ladite indemnité ;
2°) à l'annulation des décisions attaquées ;
3°) à la condamnation de l'Etat à lui verser l'indemnité d'éloignement à laquelle il peut prétendre, augmentée des intérêts au taux légal à compter, à titre principal, du 5 mars 1981 et, à titre subsidiaire, du 15 décembre 1999, outre la capitalisation des intérêts ;
4°) à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 971,80 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
Vu le décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2006 :
- le rapport de M. Dronneau ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par sa demande formée devant le tribunal administratif de Basse-Terre le 25 septembre 2001, M. X a sollicité la condamnation de l'Etat à le « dédommager pour non-paiement de l'indemnité d'éloignement et des intérêts pour préjudice subi » ; qu'ainsi, le requérant a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'une demande de plein contentieux qui ne concernait que le refus de versement de ladite indemnité au titre de sa mutation en Guadeloupe à compter du 1er avril 1990, et non pas, également, contrairement à ce qu'il soutient devant la cour, celle à laquelle il aurait pu, le cas échéant, prétendre au titre de son affectation au centre d'apprentissage des polices urbaines de Vincennes le 1er octobre 1978 ; que, dès lors, M. X n'est pas recevable à demander pour la première fois en appel l'annulation de la décision du 18 mai 1981, par laquelle le préfet de police de Paris a rejeté sa demande d'indemnité d'éloignement au titre de son affectation en métropole ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. X ne saurait utilement soutenir que le tribunal administratif de Basse-Terre aurait omis de statuer sur sa demande d'annulation des décisions lui refusant le bénéfice de l'indemnité d'éloignement au titre de sa titularisation en 1980 ;
Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à soutenir, sans apporter de précisions, que le jugement du 27 février 2003, dont il relève appel, ne mentionne pas l'ensemble des pièces de la procédure en violation de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, M. X ne permet pas à la cour d'apprécier le bien-fondé de ce moyen ;
Au fond :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l'Etat en service dans les départements d'outre-mer : « Les fonctionnaires de l'Etat qui recevront une affectation dans l'un des départements de la Guadeloupe, de la Guyane française, de la Martinique ou de la Réunion, à la suite de leur entrée dans l'administration, d'une promotion ou d'une mutation et dont le précédent domicile était distant de plus de 3 000 km du lieu d'exercice de leurs nouvelles fonctions, percevront, s'ils accomplissent une durée minimum de services de quatre années consécutives, une indemnité dénommée « indemnité d'éloignement des départements d'outre-mer » non renouvelable dont les taux et les conditions d'attribution sont fixés ci-après : l'indemnité d'éloignement est payable en trois fractions : la première lors de l'installation du fonctionnaire dans son nouveau poste, la seconde au début de la troisième année de service et la troisième après quatre ans de service » ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 : « Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières à la loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis » ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : « La prescription est interrompue par toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...) un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption » ; qu'enfin, aux termes de l'article 3, « la prescription ne court pas contre le créancier (...) qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a été titularisé le 1er mars 1980 en tant que gardien de la paix ; qu'il a été muté dans le département de la Guadeloupe par arrêté du 28 février 1990 ; qu'en vertu des dispositions sus-rappelées, cette mutation a fait naître - à supposer que l'intéressé ait eu droit à l'indemnité qu'il réclame - une créance à son profit à compter de cette date ; que celle-ci était prescrite le 1er janvier 1995 pour la première fraction de l'indemnité d'éloignement, le 1er janvier 1997 pour la deuxième fraction et le 1er janvier 1999 pour la troisième ; que M. X a effectué deux demandes de versements, les 15 décembre 1999 et 21 juin 2000, postérieurement à la date d'acquisition de la prescription pour l'ensemble des fractions de ladite indemnité ; qu'ainsi, les créances dont M. X demande le versement à l'administration sont prescrites ; que la circonstance que l'administration ait refusé de verser à M. X cette indemnité au titre de sa mutation en Guadeloupe au motif qu'il rejoignait son département d'origine n'est pas de nature à le faire légitimement regarder comme ayant ignoré l'existence de sa créance alors qu'il lui était loisible de présenter sa demande et, sur refus de l'administration, de former un recours contentieux ; que, par ailleurs, M. X ne saurait se prévaloir utilement de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 dont les dispositions ne concernent pas les relations du service avec ses agents ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le ministre de l'intérieur lui a opposé la prescription quadriennale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Basse-Terre a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à verser à l'Etat la somme que celui-ci demande au titre des mêmes frais ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de l'intérieur sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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No 03BX01112