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13/03/2008 | FRANCE | N°07BX02058

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites à la frontière, 13 mars 2008, 07BX02058


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 9 octobre 2007, présentée pour M. Guy X, demeurant au centre de rétention administrative rue François de Sourdis à Bordeaux (33000), par Me Cesso, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703819 du 5 septembre 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 1er septembre 2007 décidant sa reconduite à la frontière, et fixant le pays de dest

ination, ainsi que de l'arrêté du même jour ordonnant son placement en rétention...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 9 octobre 2007, présentée pour M. Guy X, demeurant au centre de rétention administrative rue François de Sourdis à Bordeaux (33000), par Me Cesso, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703819 du 5 septembre 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 1er septembre 2007 décidant sa reconduite à la frontière, et fixant le pays de destination, ainsi que de l'arrêté du même jour ordonnant son placement en rétention ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de la décision de la commission des recours des réfugiés ;

4°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 € au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2008 :
- le rapport de Mme Dupuy, conseiller ;
- les observations de Me Cesso, avocat de M. X ;
- et les conclusions de M. Etienvre, commissaire du gouvernement ;


Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sous réserve du respect des dispositions de l'article 33 de la convention de Genève (…), l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (…) 4° la demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente (…) » ; que l'article L. 742-3 du même code prévoit : « L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la commission des recours. Il dispose d'un délai d'un mois à compter de la notification du refus de renouvellement ou du retrait de son autorisation de séjour pour quitter volontairement le territoire français » ; que le premier alinéa de l'article L. 742-6 dudit code ajoute que : « L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité congolaise (République Démocratique du Congo), est entré en France en juin 2004 ; qu'il a vu sa demande d'asile rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 10 août 2004, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 21 février 2005 ; que le requérant a présenté le 28 juin 2006 une demande de réexamen de sa demande d'asile ; que l'office français de protection des réfugiés et apatrides a pris, le 29 juin 2006, une nouvelle décision de rejet, déférée par l'intéressé devant la commission des recours des réfugiés, devenue la cour nationale du droit d'asile, qui n'a pas encore statué ;

Considérant que la demande de réexamen de M. X, présentée plus d'un an après le rejet de sa première demande d'asile, était fondée tant sur l'allégation de faits nouveaux, notamment le décès de son épouse et de son fils alors qu'ils tentaient d'échapper aux forces de police congolaises et les persécutions subies par le pasteur coordinateur de l'église à laquelle il appartenait, que sur la production de documents postérieurs à la décision susmentionnée de la commission des recours des réfugiés, à savoir une lettre de son frère et des articles de presse émanant de journaux congolais ; que le refus opposé par l'office français de protection des réfugiés et apatrides à la nouvelle demande du requérant n'est d'ailleurs pas motivée par le défaut d'éléments nouveaux depuis la précédente décision de la commission des recours des réfugiés, mais par l'absence de bien-fondé de cette demande ; que, dans ces conditions, la demande de réexamen de M. X ne peut être regardée comme présentant un caractère abusif ou dilatoire au sens des dispositions précitées du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet de la Gironde ne pouvait, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 742-3 du même code, prendre à l'encontre de l'intéressé une mesure de reconduite à la frontière alors que la commission des recours des réfugiés n'avait pas encore statué sur sa demande ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 1er septembre 2007 décidant sa reconduite à la frontière, et fixant le pays de destination, ainsi que de l'arrêté du même jour ordonnant son placement en rétention ;


Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'à la suite d'une annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour et, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ;

Considérant qu'en vertu de ces dispositions, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Gironde de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour valable jusqu'à ce qu'il ait été à nouveau statué sur son cas ;


Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que M. X a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Cesso, avocat de M. X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat, qui est dans la présente instance la partie perdante, la somme de 1 000 euros au profit de Me Cesso au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;


DECIDE :


Article 1er : Le jugement rendu le 5 septembre 2007 par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux, l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 1er septembre 2007 décidant la reconduite à la frontière de M. X, ainsi que les décisions du même jour fixant le pays de destination et ordonnant son placement en rétention, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour valable jusqu'à ce qu'il ait été à nouveau statué sur son cas.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Cesso, avocat de M. X, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Cesso renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

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No 07BX02058


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07BX02058
Date de la décision : 13/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre DUPUY
Rapporteur public ?: M. ETIENVRE
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-03-13;07bx02058 ?
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