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26/06/2008 | FRANCE | N°05BX01533

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 26 juin 2008, 05BX01533


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 28 juillet 2005 sous le n° 05BX01533, présentée pour l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DE LA GARTEMPE dont le siège social est Hôtel de Ville à Jouhet (86500) par Maître Anne-Sophie Bachelier, avocat ; l'association demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 9 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Vienne a implicitement refusé :

- d'imposer la remise en état de la carrière de sables et de grav

iers exploitée par la société « Carrières Pain » au lieu dit Les Roches sur l...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 28 juillet 2005 sous le n° 05BX01533, présentée pour l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DE LA GARTEMPE dont le siège social est Hôtel de Ville à Jouhet (86500) par Maître Anne-Sophie Bachelier, avocat ; l'association demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 9 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Vienne a implicitement refusé :

- d'imposer la remise en état de la carrière de sables et de graviers exploitée par la société « Carrières Pain » au lieu dit Les Roches sur le territoire de la commune de Saulgé conformément aux mesures définies dans ses arrêtés en date du 24 février 1989 et du 19 juillet 1999 ;

- d'utiliser les dispositions de l'article L. 515-12 du code de l'environnement afin d'assurer le respect de l'usage donné au site après sa remise en état ;

- d'interdire la poursuite du comblement de cette carrière ;

- d'imposer la reprise de tous les matériaux non inertes enfouis et stockés sur le site afin de le remettre dans l'état imposé par l'arrêté d'autorisation ;

- et de mettre un terme à l'exploitation d'une décharge classée pour la protection de l'environnement ;

2°) d'annuler la décision de refus du préfet de la Vienne ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la directive n° 75/442/CEE du 15 juillet 1975 relative aux déchets ;

Vu la directive n° 1999/31/CE du 26 avril 1999 concernant la mise en décharge des déchets ;

Vu la directive n° 2000/53/CE du Parlement Européen et du Conseil du 18 septembre 1990 relative aux véhicules hors d'usage ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

Vu le décret n° 2002-540 du 18 avril 2002 ;

Vu le décret n° 2002-1563 du 24 décembre 2002 relatif à l'élimination des pneumatiques usagés ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2008,

- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Balzamo, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par des arrêtés en date des 13 août 1985 et 24 février 1989, le préfet de la Vienne a autorisé la société Michel Pain à exploiter une carrière à ciel ouvert de sables et de graviers à Saulgé ; que, par arrêté en date du 19 juillet 1999, le préfet a mis en demeure la société de procéder à la remise en état du site ; qu'après l'établissement le 15 février 2002 par l'inspection des installations classées d'un procès-verbal de récolement, la société Michel Pain a adressé au maire de la commune de Saulgé une demande d'ouverture d'une décharge de déchets inertes ; qu'en réponse, le maire a imposé, par arrêté en date du 27 mai 2002, un certain nombre de prescriptions ; que le 2 septembre 2003, L'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DE LA GARTEMPE a demandé au préfet d'imposer à la société la parfaite remise en état de la carrière conformément aux mesures définies dans les arrêtés en date des 24 février 1989 et 19 juillet 1999, d'utiliser la procédure de l'article L. 515-12 du code de l'environnement afin d'assurer le respect de l'usage donné au site après sa remise en état, d'interdire à la société de poursuivre le comblement de la carrière et d'imposer à celle-ci de reprendre tous les matériaux non inertes enfouis et stockés afin de remettre le site dans l'état imposé par l'arrêté d'autorisation et de mettre un terme à l'exploitation sans autorisation d'une décharge de classe II ; que le préfet ayant gardé le silence sur cette demande, l'association a saisi le Tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant à l'annulation du refus implicitement opposé par le préfet ; que, par jugement en date du 9 juin 2005, le tribunal a rejeté cette demande ; que L'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DE LA GARTEMPE interjette appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 34-1 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 alors applicable : « I. Lorsqu'une installation classée est mise à l'arrêt définitif, son exploitant remet son site dans un état tel qu'il ne s'y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 susvisée. Le préfet peut à tout moment imposer à l'exploitant les prescriptions relatives à la remise en état du site, par arrêté pris dans les formes prévues à l'article 18 ci-dessus. II. L'exploitant qui met à l'arrêt définitif son installation notifie au préfet la date de cet arrêt au moins un mois avant celle-ci. Toutefois, dans le cas des installations autorisées pour une durée limitée définies à l'article 17-1, cette notification est adressée au préfet six mois au moins avant la date d'expiration de l'autorisation. III. Dans le cas des installations soumises à autorisation, il est joint à la notification un dossier comprenant le plan à jour des terrains d'emprise de l'installation, ainsi qu'un mémoire sur l'état du site. Le mémoire précise les mesures prises ou prévues pour assurer la protection des intérêts visés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 susvisée, et pouvant comporter notamment : 1° L'évacuation ou l'élimination des produits dangereux, ainsi que des déchets présents sur le site ; 2° La dépollution des sols et des eaux souterraines éventuellement polluées ; 3° L'insertion du site de l'installation dans son environnement ; 4° En cas de besoin, la surveillance à exercer de l'impact de l'installation sur son environnement. Le préfet consulte le maire de la commune concernée. En l'absence d'observations dans le délai d'un mois, son avis est réputé favorable. Lorsque les travaux prévus pour la cessation d'activité par l'arrêté d'autorisation ou par un arrêté complémentaire sont réalisés, l'exploitant en informe le préfet. L'inspecteur des installations classées constate la conformité des travaux par un procès-verbal de récolement qu'il transmet au préfet. IV. Dans le cas des installations soumises à déclaration, la notification doit indiquer les mesures de remise en état du site prises ou envisagées. Il est donné récépissé sans frais de cette notification » ;

Considérant, en premier lieu, que si l'inspecteur des installations classées a été accompagné lors de la visite sur le site le 29 janvier 2002, qu'il a effectuée afin de se prononcer sur la conformité des travaux de remise en état, par le maire de la commune de Saulgé, il ne résulte cependant pas de l'instruction que l'inspecteur se soit cru lié par l'appréciation portée par le maire sur les conséquences de la non réalisation d'une partie de ces travaux ;

Considérant, en deuxième lieu, que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet devait imposer à l'exploitant de procéder à la remise en état de l'intégralité du site dès lors que par arrêté en date du 19 juillet 1999, le préfet de la Vienne a autorisé la société Michel Pain à maintenir sur les parcelles 100, 101, 102, 103, 104, 108 et 109 l'installation de traitement de matériaux et la zone nécessaire au stockage des matériaux ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme : « L'autorisation des installations et travaux divers est délivrée dans les formes, conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'Etat : a) Dans les communes où un plan local d'urbanisme ou une carte communale a été approuvé, au nom de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale ou de l'Etat, selon les cas et modalités prévus aux articles L. 421-2-1 à L. 421-2-8 ; les dispositions de l'article L. 421-9 sont alors applicables ; b) Dans les autres communes, au nom de l'Etat. Un décret en Conseil d'Etat détermine les types d'installations et de travaux divers pour lesquels la délivrance de l'autorisation prévue au premier alinéa est obligatoire » ; qu'aux termes de l'article R. 442-2 : « Dans les communes ou parties de communes visées à l'article R. 442-1 ainsi que pour les garages collectifs de caravanes, sur l'ensemble du territoire est subordonnée à l'obtention d'une autorisation préalable la réalisation d'installations ou de travaux dans les cas ci-après énumérés, lorsque l'occupation ou l'utilisation du terrain doit se poursuivre durant plus de trois mois : (...) c) Les affouillements et exhaussements du sol, à la condition que leur superficie soit supérieure à 100 mètres carrés et que leur hauteur, s'il s'agit d'un exhaussement, ou leur profondeur dans le cas d'un affouillement, excède deux mètres » ; qu'aux termes de l'article R. 442-3 : « L'autorisation prévue à l'article L. 442-1 n'est pas exigée dans le cas où les installations ou travaux mentionnés à l'article R. 442-2 sont soumis à autorisation ou déclaration en application ... de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement » ; qu'aux termes de l'article R. 442-4 : « La demande d'autorisation des installations et travaux divers est présentée par le propriétaire du terrain, par son mandataire, par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à exécuter lesdits installations ou travaux, ou par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation du terrain pour cause d'utilité publique » ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret n° 2002-1563 du 24 décembre 2002 relatif à l'élimination des pneumatiques usagés : « La valorisation des pneumatiques usagés est préférée à leur destruction chaque fois que les conditions techniques, économiques et géographiques le permettent. Pour l'application des dispositions du présent décret, sont considérés comme des opérations de valorisation des pneumatiques usagés leur réemploi, leur rechapage, leur utilisation pour des travaux publics, des travaux de remblaiement ou de génie civil, leur recyclage, leur utilisation comme combustible, leur incinération avec récupération d'énergie, leur utilisation par les agriculteurs pour l'ensilage ainsi que leur broyage ou leur découpage en vue d'un traitement conforme aux opérations mentionnées au présent alinéa » ;

Considérant que contrairement à ce que l'association requérante soutient, l'utilisation de pneumatiques usagés à des fins de remblaiement n'est pas limitée aux opérations de travaux publics ; que l'utilisation, par suite, de pneumatiques usagés par la société Michel Pain pour le remblaiement de sa carrière constitue non pas une opération d'élimination de ces déchets ni une opération de stockage ou de traitement de ceux-ci ou de déchets ménagers mais une opération de valorisation au sens des dispositions précitées de l'article 3 du décret du 24 décembre 2002 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces dispositions soient incompatibles avec les objectifs de la directive n° 2000/53/CE du 18 septembre 2000 relative aux véhicules hors d'usage ; qu'il s'ensuit que les travaux de remblaiement litigieux, que les pneumatiques usagés puissent être regardés ou non comme des déchets inertes, ne relevaient pas du régime des installations classées mais devaient faire l'objet de l'autorisation préalable exigée par l'article L. 442-1 précité ; qu'en imposant à la société Michel Pain, par les arrêtés en date des 27 mai 2002 et 10 octobre 2002, des prescriptions, le maire de la commune de Saulgé a implicitement mais nécessairement accordé à la société Michel Pain ladite autorisation ; que si l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DE LA GARTEMPE soutient que cette autorisation a été délivrée alors que la société Michel Pain n'avait pas qualité pour solliciter celle-ci et sans être instruite selon la procédure prévue, elle n'est cependant pas recevable à exciper ainsi de l'illégalité de cette décision dont il résulte de l'instruction qu'elle était devenue définitive ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'association requérante n'est pas fondée à se prévaloir de ce que l'arrêté en date du 24 février 1989 ne prévoyait pas que la carrière soit remblayée avec des pneumatiques usagés dès lors que, comme il a été dit précédemment, ce remblaiement a été autorisé par le maire de la commune de Saulgé les 27 mai 2002 et 10 octobre 2003 ;

Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré de ce que le préfet devait instituer sur le fondement des dispositions de l'article L. 515-12 du code de l'environnement des servitudes à l'effet de protéger la ressource en eau n'est pas plus en appel qu'en première instance assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien fondé ;

Considérant, en sixième et dernier lieu, que si l'association requérante soutient que le préfet devait imposer à la société Michel Pain d'étanchéifier le fond de la carrière à l'effet d'éviter que les eaux pluviales polluent la nappe phréatique lors de leur passage dans le sol de la partie du site au remblaiement duquel il est procédé à l'aide de pneumatiques usagés, il ne résulte toutefois pas de l'instruction que ces déchets, classés comme non dangereux par la nomenclature du décret n° 2002-540 du 18 avril 2002, soient susceptibles de porter préjudice à l'environnement ou de mettre en danger la santé de l'homme ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DE LA GARTEMPE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'accorder à la société « De conditionnement et de matériaux de carrières (S.C.M.C.) » le bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DE LA GARTEMPE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société « De conditionnement et de matériaux de carrières (S.C.M.C.) » tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

5

No 05BX01533


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05BX01533
Date de la décision : 26/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme BALZAMO
Avocat(s) : BACHELIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2008-06-26;05bx01533 ?
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