La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2009 | FRANCE | N°08BX02000

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 30 juin 2009, 08BX02000


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 31 juillet 2008, présentée pour M. Serge X, demeurant ..., par Me Aljoubahi, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 octobre 2004 par laquelle le ministre de la défense l'a sanctionné disciplinairement de 40 jours d'arrêts, de celle du 7 juillet 2005 par laquelle ce dernier a rejeté le recours formé contre cette punition, de celle du 22 mars 2006 par laquelle il a refusé

d'amnistier les faits et des décisions implicites par lesquelles il a rej...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 31 juillet 2008, présentée pour M. Serge X, demeurant ..., par Me Aljoubahi, avocat ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 juin 2008 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 octobre 2004 par laquelle le ministre de la défense l'a sanctionné disciplinairement de 40 jours d'arrêts, de celle du 7 juillet 2005 par laquelle ce dernier a rejeté le recours formé contre cette punition, de celle du 22 mars 2006 par laquelle il a refusé d'amnistier les faits et des décisions implicites par lesquelles il a rejeté les recours formés les 9 novembre 2004 et 21 février 2005 respectivement contre les décisions susmentionnées des 1er juillet 2004 et 8 octobre 2004 ;

2°) de faire application de la loi d'amnistie du 6 août 2002 et de le dispenser de toute sanction ;

3°) de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à venir de la cour d'appel de Riom ;

4°) d'annuler la décision du 8 octobre 2004 par laquelle le ministre de la défense l'a puni de quarante jours d'arrêts et la décision du 7 juillet 2005 par laquelle il a rejeté son recours dirigé contre cette décision ;

5°) d'enjoindre au ministre de la défense de supprimer la punition de 40 jours d'arrêts de son dossier ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant loi d'amnistie ;

Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;

Vu le décret n° 75-675 du 28 juillet 1975 portant règlement de discipline générale dans les armées ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2009 :

- le rapport de M. Davous, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

Considérant que, par une décision en date du 1er juillet 2004, l'autorité militaire de premier niveau a prononcé à l'encontre de M. X, adjudant-chef de la gendarmerie nationale affecté au centre national d'entrainement des forces de gendarmerie de Saint-Astier, une punition de 15 jours d'arrêts motif pris de l'atteinte portée à la dignité d'une subordonnée pour des faits commis alors qu'il était affecté à la cellule reprographie de l'école de gendarmerie de Montluçon ; que, par une décision du 8 octobre 2004, le ministre de la défense a porté à 40 jours d'arrêts cette punition ; que le ministre de la défense, par décision du 7 juillet 2005, a rejeté le recours formé contre cette punition et, par une décision du 22 mars 2006, a refusé d'amnistier les faits ayant motivé la sanction ; que, par jugement en date du 3 juin 2008, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté les requêtes de M. X dirigées contre les décisions des 8 octobre 2004, 22 mars 2006 et 7 juillet 2005 et contre les décisions implicites par lesquelles le ministre de la défense a rejeté les recours formés les 9 novembre 2004 et 21 février 2005 respectivement contre les décisions susmentionnées des 1er juillet 2004 et 8 octobre 2004 ; que M. X fait appel de ce jugement en tant qu'il concerne les décisions des 8 octobre 2004 et 7 juillet 2005 ;

Sur l'application de la loi du 6 août 2002 d'amnistie :

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie : Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles... Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité ou aux bonnes moeurs... ; que les motifs de la décision du 8 octobre 2004 infligeant la punition de 40 jours d'arrêts à M. X sont tirés de l'atteinte à la dignité d'une subordonnée qui a été malmenée par le requérant ; que ces faits, qui se sont poursuivis, au delà du 17 mai 2002 et qui ont été commis par M. X en qualité de chef du service dans lequel travaillait sa subordonnée, sont constitutifs de brimades répétées, et pour certains d'entre eux, de violences physiques ; qu'ainsi, les manquements reprochés à M. X sont contraires à l'honneur et à la respectabilité des militaires de la gendarmerie nationale et n'entraient pas dans le champ de l'amnistie prévue par la loi du 6 août 2002 précitée ;

Sur la légalité des décisions contestées :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 du décret modifié du 28 juillet 1975 : Tout militaire qui conteste une punition disciplinaire le concernant dispose d'un droit de recours qui est exercé dans les conditions suivantes : / 1. Si la punition a été infligée par une autorité militaire de premier niveau, la demande est adressée à cette autorité militaire de premier niveau et inscrite au registre prévu à cet effet. L'autorité saisie instruit la demande, entend l'intéressé et lui fait connaître sa réponse dans un délai de dix jours à partir de la date de cette inscription. Si l'intéressé n'a pas obtenu satisfaction et maintient son recours, l'autorité militaire de premier niveau transmet directement la demande à l'autorité militaire de deuxième niveau dont elle relève et fait remettre à l'intéressé une copie de la transmission effectuée. / L'autorité militaire de deuxième niveau instruit la demande, entend l'intéressé si elle le juge utile ou si ce dernier le sollicite par écrit et lui fait connaître sa réponse dans un délai de quinze jours à compter de la date de la réception du dossier. Si l'intéressé n'a pas obtenu satisfaction et maintient son recours, l'autorité saisie transmet la demande au chef d'état-major de l'armée d'appartenance de l'intéressé, ou à l'autorité correspondante pour les formations rattachées, et fait remettre à l'intéressé une copie de la transmission effectuée. (...) / 4. Lorsqu'il est saisi, le chef d'état-major d'armée, ou l'autorité correspondante, accuse réception à l'intéressé de la demande. S'il n'est pas en mesure de statuer, il transmet le dossier au ministre chargé des armées. Dans le cas contraire, il fait connaître sa réponse à l'intéressé dans un délai de trente jours à compter de la réception de la demande. / Le chef d'état-major d'armée ou l'autorité correspondante adresse copie de cette réponse au ministre chargé des armées. / 5. Si le militaire maintient son recours ou si le chef d'état-major d'armée ou l'autorité correspondante n'a pas été en mesure de statuer, le ministre chargé des armées fait instruire le dossier par l'inspecteur général concerné, décide de la suite à lui donner et répond à l'intéressé dans un délai de quarante jours à compter de la réception du recours. ; qu'aux termes de l'article 33 de ce même décret : En matière de punitions disciplinaires, les garanties sont les suivantes : / 1. Le droit de s'expliquer : avant que la punition ne lui soit infligée, le militaire a le droit de s'expliquer sur les faits qui lui sont reprochés, oralement devant l'autorité militaire de premier niveau dont il relève, par écrit lorsque la punition est infligée par une autorité militaire supérieure. Au préalable, un délai de réflexion est laissé à l'intéressé pour organiser sa défense. Ce délai ne peut être inférieur à 24 heures. L'explication écrite de l'intéressé ou la renonciation écrite à l'exercice du droit de s'expliquer est jointe au dossier transmis à l'autorité militaire supérieure. / 2. L'accès au dossier disciplinaire : avant d'être reçu par l'autorité militaire de premier niveau dont il relève, le militaire concerné doit obligatoirement être mis en mesure d'avoir communication des pièces et documents le concernant au vu desquels il est envisagé de le punir. / 3. L'application d'un barème : les punitions, autres que la réduction de grade ou le retrait de la distinction de 1ère classe, sont infligées dans la limite d'un barème fixé par arrêté. Ce barème énumère les différentes fautes, indiquant pour chacune d'elles le maximum de la punition qui peut être infligé. /4. La motivation de la punition : la motivation en droit et en fait de la punition doit être précisée sur la décision prononçant la punition. / 5. Le droit de recours : l'exercice de ce droit constitue la procédure d'appel des punitions disciplinaires. Les modalités sont définies à l'article 13 du présent décret. / (...) 6. Le contrôle hiérarchique : toute autorité supérieure peut intervenir au profit d'un militaire en vue d'une réduction de la punition qui a été prononcée. Seul le ministre chargé des armées peut aggraver une punition déjà infligée. ; qu'aux termes de l'article 34 de ce même décret : 1- Tout militaire a le droit et le devoir de relever les fautes commises par ses subordonnés ou les militaires placés après lui dans l'ordre hiérarchique et de demander qu'ils soient punis. (...) ; qu'aux termes de l'article 31 de ce même décret : 1. Les punitions disciplinaires qui peuvent être infligées aux militaires sont les suivantes : / 11. Pour les officiers et les sous-officiers : / Avertissement ; / Réprimande ; / Arrêts ; / Blâme ; / Arrêts de rigueur, (....) / 5. Dans certaines circonstances, notamment à l'occasion des fêtes nationales, les punitions peuvent être levées. Cette mesure n'efface pas la punition mais dispense de l'accomplissement de la fraction non encore effectuée. (...) ;

Considérant que si M. X conteste avoir eu communication d'une partie des pièces composant le dossier ayant servi à l'autorité militaire de premier niveau puis au ministre de la défense pour prononcer la punition de 15 jours d'arrêts, portée par le ministre, à 40 jours d'arrêts, il ressort des pièces du dossier que le gendarme Z, au cours du mois de juin 2003, avait alerté sa hiérarchie des faits dont s'était rendu coupable M. X, dans l'exercice de ses fonctions et qui ont été portés à la connaissance du requérant le 24 juillet 2003 ainsi que l'atteste la signature de celui-ci sur le document produit par le ministre de la défense ; que le rapport en date du 29 avril 2004, rédigé par le chef d'escadron Y sur le comportement de M. X, a été porté à la connaissance de l'intéressé le 29 avril 2004 ; que la circonstance que ce rapport ne contienne aucune pièce annexe est sans incidence sur la régularité de la procédure ; qu'enfin, M. X ne saurait valablement faire état de ce que l'autorité militaire aurait refusé la communication d'un rapport sur son comportement rédigé par le colonel A dont l'existence n'est pas établie ; que M. X ne peut dès lors utilement soutenir que le ministre de la défense l'aurait pris en compte pour aggraver la punition dont il a fait l'objet ; que, par conséquent, M. X n'est pas fondé à se prévaloir de ce que la procédure serait irrégulière à raison de l'absence de communication de certaines pièces de son dossier ; qu'enfin, la circonstance que le courrier du 29 avril 2004 l'informant de l'ouverture d'une procédure disciplinaire indique que celle-ci était ouverte à raison de son comportement à l'égard de sa subordonnée pour la période comprise entre le 15 avril et le 16 juin 2003 est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie dès lors que le dossier auquel M. X a eu accès contenait les éléments relatifs à l'ensemble des faits qui lui étaient reprochés, y compris ceux s'étant déroulés hors de la période indiquée et sur lesquels il a fourni ses observations ;

Considérant qu'il résulte du dernier alinéa du paragraphe 3.4 de la circulaire du 4 avril 2002 relative aux modalités d'établissement, d'enregistrement et d'effacement des punitions disciplinaires, dans sa version applicable à l'espèce, que : L'aggravation devra intervenir dans un délai de quatre mois à compter du jour de la signature de la décision qui a prononcé la punition initiale. Au terme de ce délai, la décision initiale sera réputée définitive ; que, la punition de 15 jours d'arrêts, décidée le 1er juillet 2004 par l'autorité militaire de premier niveau a été, dans le délai prévu par les dispositions précitées, portée à 40 jours d'arrêts par décision en date du 8 octobre 2004 du ministre de la défense ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision du ministre est intervenue au-delà du délai prévu pour l'aggravation de la punition ;

Considérant qu'aux termes du 4. de l'article 33 du décret du 28 juillet 1975 alors en vigueur : La motivation de la punition : la motivation en droit et en fait de la punition doit être précisée sur la décision prononçant la punition. ; que les motifs de la punition prise par l'autorité militaire de premier niveau sont suffisamment étayés par le rappel des principaux faits reprochés à M. X ; que le ministre n'était pas tenu d'indiquer les raisons pour lesquelles il avait décidé d'aggraver la punition dès lors qu'aucun élément nouveau n'était intervenu entre ces deux décisions ;

Considérant que si M. X soutient que la décision par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours hiérarchique contre la décision qui lui avait infligé des arrêts, est irrégulière faute d'être motivée, l'obligation de motivation des sanctions posées par les dispositions précitées du décret du 28 juillet 1975 concerne la décision infligeant la sanction et non la décision qui se borne à rejeter le recours contre cette sanction ;

Considérant que la décision contestée du 8 octobre 2004 par laquelle le ministre de la défense a aggravé la punition infligée à M. X est motivée par différents agissements commis à l'encontre du gendarme adjoint Linda Z, placée sous ses ordres à la cellule reprographie à l'école de gendarmerie de Montluçon ; qu'il lui est reproché d'avoir mis au sol sa subordonnée, sur le lieu de travail, de lui avoir attaché les mains et les pieds puis de l'avoir déposée dans le coffre de son véhicule personnel et de l'avoir transportée ainsi dans l'enceinte de l'école, de l'avoir, à nouveau plaquée au sol et de lui avoir tenu des propos outranciers ; que M. X a, pendant plusieurs mois, utilisé sa position hiérarchique pour exercer des pressions physiques et psychologiques sur ce militaire ; que si M. X ne conteste pas la matérialité des faits et se borne à soutenir qu'ils se sont déroulés dans un climat récréatif sans aucune intention malveillante de sa part alors que sa subordonnée aurait entretenu un comportement ambigu à son égard, ces agissements ont cependant porté gravement atteinte à la dignité militaire et au renom de l'armée et étaient de nature à justifier une punition ; qu'en dépit des états de service antérieurs de l'intéressé, le ministre de la défense n'a pas, en les sanctionnant d'une punition de quarante jours d'arrêts, prononcé une sanction manifestement disproportionnée ;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. X n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions du requérant tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de la défense de supprimer, dans son dossier administratif, la punition de quarante jours d'arrêts doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au requérant la somme qu'il demande sur le fondement de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

''

''

''

''

5

No 08BX02000


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 08BX02000
Date de la décision : 30/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Frédéric DAVOUS
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : ALJOUBAHI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-06-30;08bx02000 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award