La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2009 | FRANCE | N°07BX02655

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 29 septembre 2009, 07BX02655


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 26 décembre 2007, présentée pour la SA PARALU, dont le siège est situé 237 rue du général de Gaulle à Brignais (69530), par Me Frédéric Zenati-Castaing, avocat au barreau de Lyon ;

La SA PARALU demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 29 octobre 2007, par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à voir déclarer le département de la Haute-Garonne responsable des dommages subis à la suite du contrat passé pour

la réalisation des travaux de construction de l'hôtel du département ;

2°) de re...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 26 décembre 2007, présentée pour la SA PARALU, dont le siège est situé 237 rue du général de Gaulle à Brignais (69530), par Me Frédéric Zenati-Castaing, avocat au barreau de Lyon ;

La SA PARALU demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 29 octobre 2007, par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à voir déclarer le département de la Haute-Garonne responsable des dommages subis à la suite du contrat passé pour la réalisation des travaux de construction de l'hôtel du département ;

2°) de renvoyer l'affaire devant les premiers juges ;

3°) de condamner le département de la Haute-Garonne à lui payer une somme de 15 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2009 :

- le rapport de M. Zapata, président ;

- les observations de Me Zenati-Castaing, avocat de la SA PARALU ;

- les observations de Me Hennequin, avocat du département de la Haute-Garonne ;

- les observations de Me Cassagnes, avocat de la société Jacobs Serete ;

- les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties ;

Considérant que, par ordonnance du 29 octobre 2007, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté, sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la demande de la SA PARALU - titulaire du lot n° 6 menuiserie du marché public de construction de l'hôtel du département de la Haute-Garonne - tendant à la condamnation dudit département à l'indemniser, au vu des résultats d'une expertise en cours, des préjudices que lui ont causés les retards importants de ce chantier ; que la SA PARALU relève appel de cette ordonnance ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...) 5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens ; que le motif retenu par le président de la 4ème chambre relatif à la computation du délai de recours contentieux de l'entrepreneur sur décision de rejet d'une réclamation par le maître de l'ouvrage dans le cadre du décompte général d'un marché public de travaux nécessitait qu'il tranchât plusieurs points de droit ; que, dès lors, la SA PARALU est fondée à soutenir que sa demande n'était pas manifestement irrecevable et que le président de la 4ème chambre ne pouvait la rejeter en vertu des dispositions précitées ; qu'elle est fondée, par suite, à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la SA PARALU présentées devant le tribunal administratif de Toulouse ;

Considérant qu'aux termes de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, l'entrepreneur dispose d'un délai de 45 jours à compter de la notification du décompte général pour faire valoir dans un mémoire de réclamation, ses éventuelles réserves ; que le règlement du différend intervient selon les modalités précisées à l'article 50 ; que ce dernier auquel il est renvoyé stipule : 50-22 - Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. 50-23 - La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage (...). 50-32 - Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. Toutefois, le délai de six mois est suspendu en cas de saisine du comité consultatif de règlement amiable ; qu'aux termes des alinéas 3 et 6 de l'article 242 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable en l'espèce : (...) Le titulaire du marché peut saisir directement le comité en fin d'exécution du marché dès lors que la personne responsable du marché a rejeté une de ses demandes (...) / La saisine du comité suspend les délais de recours contentieux (...) jusqu'à la décision prise (...) ; que s'il résulte de ces dispositions que la saisine du comité consultatif de règlement amiable suspend le délai de recours contentieux courant à compter de la notification à l'entrepreneur de la décision prise par le maître d'ouvrage sur la réclamation de l'entrepreneur, aucune de ces dispositions ne prévoit que la décision prise par le maître d'ouvrage, après l'avis du comité consultatif de règlement amiable, ouvre un nouveau délai de recours contentieux pour l'entrepreneur, courant à compter de cette nouvelle décision ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA PARALU a contesté, par courrier du 10 décembre 1999 assorti d'un mémoire en réclamation, le décompte général du marché notifié le 28 octobre 1999 par le département de la Haute-Garonne ; que, par lettre du 4 août 2000, reçue le 7 août 2000, le président du conseil général de la Haute-Garonne a informé la SA PARALU que la commission permanente du conseil général lui avait accordé, suivant une délibération du 5 juillet 2000, une somme de 1 067 669,20 F TTC, forfaitaire, non révisable, non actualisable et s'entendant tous préjudices confondus , sur les 8 256 416,89 F HT réclamés ; que la SA PARALU a saisi, le 24 janvier 2001, le comité consultatif interrégional de règlement amiable qui, par avis du 6 novembre 2001, a évalué son préjudice à la somme de 892 700,00 F (136 091,24 €) pour l'ensemble des postes de réclamation et a invité les parties à conclure une transaction ; que, par lettre du 28 janvier 2002, le président du conseil général de la Haute-Garonne a informé la SA PARALU qu'il suivait l'avis du comité et lui a adressé un projet de protocole transactionnel réglant le litige sur le décompte général (...) et prenant acte de l'avis du comité ; que la SA PARALU, qui n'a pas répondu à ce courrier, a saisi, le 6 mai 2002, le tribunal administratif de Toulouse d'une demande de condamnation du département de la Haute-Garonne, en différant le chiffrage de son préjudice jusqu'au dépôt du rapport d'expertise en cours ; que l'expert ayant déposé son rapport le 17 juillet 2006, la SA PARALU a introduit, le 7 mars 2007, une demande en référé provision devant le tribunal administratif en vue d'obtenir la condamnation du département à lui verser une somme de 460 693,12 € ; que cette demande a été rejetée pour tardiveté, par ordonnance du président du tribunal administratif du 10 mai 2007, avant que, par l'ordonnance attaquée du 29 octobre 2007, le président de la 4ème chambre du même tribunal ne rejette la requête introduite au fond le 6 mai 2002 ;

Considérant, en premier lieu, que la commission permanente du conseil général de la Haute-Garonne était compétente, en vertu de l'article L. 3213-5 du code général des collectivités territoriales pour statuer, comme elle l'a fait, par délibération du 5 juillet 2000, sur la réclamation de la SA PARALU du 10 décembre 1999 ; que, par la lettre du 4 août 2000, le président du conseil général a pu légalement notifier à la SA PARALU ladite délibération et reprendre la proposition de règlement amiable ainsi que l'y autorise l'article L. 3221-1 du code général des collectivités territoriales ; qu'ainsi les moyens doivent être écartés ;

Considérant qu'eu égard à sa teneur et à sa formulation, la lettre du 5 juillet 2000 doit être regardée comme une décision du maître de l'ouvrage prise sur la réclamation de ladite société au sens des dispositions précitées du cahier des clauses administratives générales des marchés de travaux et non pas comme une simple proposition qui n'aurait pas ouvert le délai de recours contentieux ; que le courrier du 28 janvier 2002, par lequel le président du conseil général, exprimant la position du département de la Haute-Garonne, s'est rallié à l'avis du comité consultatif des règlements amiables doit également être regardé comme une décision du maître de l'ouvrage ;

Considérant, en deuxième lieu, que la procédure de réclamation préalable rappelée ci-dessus résulte des clauses du cahier des clauses administratives générales auxquelles ont souscrit les parties en signant le marché, qui organisent ainsi les règles particulières de saisine du juge du contrat ; que, dès lors, si en vertu des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, les délais de recours contre les décisions administratives ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision, ces dispositions n'étaient pas applicables à la décision de rejet par le maître de l'ouvrage de la réclamation préalable formée par la SA PARALU à l'encontre du décompte général ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 2244 du code civil : Une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie, signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire, interrompent la prescription ainsi que les délais pour agir ; que l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, en date du 13 mars 2000, par laquelle l'expertise, ordonnée dans le même litige le 24 décembre 1999 à la demande de la société Guinet-Derriaz, a été étendue à la SA PARALU à sa demande, n'a pu avoir pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux, né postérieurement à la date de réponse donnée par le département de la Haute-Garonne, le 4 août 2000, à la réclamation de la SA PARALU formulée sur le fondement des stipulations précitées du CCAG-travaux ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en vertu des clauses précitées du CCAG, si la saisine du comité consultatif des règlements amiables suspend le délai de recours contentieux de six mois, prévu par l'article 50-32 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux - courant à compter de la notification à l'entrepreneur de la décision prise par le maître de l'ouvrage sur sa réclamation - elle ne l'interrompt pas, contrairement à ce que soutient la SA PARALU ; que la SA PARALU ne saurait soutenir utilement que la décision prise par le maître de l'ouvrage, après avis du comité consultatif de règlement amiable, lui aurait ouvert un nouveau délai de recours contentieux de six mois ;

Considérant, en cinquième lieu, que la SA PARALU soutient que le département n'ayant pas répondu à sa réclamation du 10 décembre 1999, une décision implicite de rejet serait intervenue, le 10 mars 2000 et qu'ainsi aucun délai d'action ne pouvait lui être opposé ; qu'en admettant même qu'une décision implicite de rejet de la réclamation est intervenue, le 10 mars 2000, la décision expresse de rejet de la réclamation prise le 4 août 2000 a en tout état de cause, commencé à faire courir le délai de six mois prévu par le cahier des clauses administratives générales ; qu'ainsi le moyen doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, tant le courrier du président du conseil général de la Haute-Garonne du 4 août 2000, reçu le 7 août 2000 par ladite société, lui accordant une indemnité de 1 067 669,20 F TTC, que celui du 28 janvier 2002 se ralliant à l'avis du comité consultatif des règlements amiables, revêtent le caractère de décisions et non pas de simples propositions qui seraient sans incidence sur l'ouverture et la computation du délai de recours contentieux de six mois ; qu'il suit de là que le délai de recours contentieux, ouvert à la SA PARALU sur la décision du 4 août 2000, a commencé à courir le 7 août 2000 ; qu'il a été suspendu le 24 janvier 2001 - date d'enregistrement de son mémoire devant le comité consultatif - au terme d'un délai de 5 mois et 17 jours, pour reprendre son cours le 31 janvier 2002, date de réception de la décision prise, le 28 janvier 2002, par le président du conseil général de la Haute-Garonne sur avis du comité consultatif des règlements amiables ; que dès lors, le délai de six mois était expiré, quand la SA PARALU a introduit, le 6 mai 2002, sa demande devant le tribunal administratif de Toulouse ; que, par suite, la demande de la SA PARALU présentée devant le tribunal administratif de Toulouse n'est pas recevable et ne peut qu'être rejetée ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le département de la Haute-Garonne, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la SA PARALU la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la SA PARALU à payer au département de la Haute-Garonne une somme de 1 500 € au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la société Jacobs Serete à l'encontre de la SA PARALU, appelée en garantie par le département de la Haute-Garonne ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Toulouse en date du 29 octobre 2007 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par la SA PARALU devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.

Article 3 : La SA PARALU versera au département de la Haute-Garonne une somme de 1 500 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société Jacobs Serete présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

''

''

''

''

3

No 07BX02655


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 07BX02655
Date de la décision : 29/09/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ZAPATA
Rapporteur ?: M. Michel DRONNEAU
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : ZENATI-CASTAING

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2009-09-29;07bx02655 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award