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27/03/2012 | FRANCE | N°11BX03187

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 27 mars 2012, 11BX03187


Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2011 au greffe de la cour sous le n° 11BX03187, présentée pour M. Perparim X, demeurant ..., par Me de Boyer Montegut ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 26 avril 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a procédé au retrait de sa carte de résident et a assorti ce retrait d'une obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêt

en date du 26 avril 2011 ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle...

Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2011 au greffe de la cour sous le n° 11BX03187, présentée pour M. Perparim X, demeurant ..., par Me de Boyer Montegut ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 26 avril 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a procédé au retrait de sa carte de résident et a assorti ce retrait d'une obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté en date du 26 avril 2011 ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1.600 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle établi près le tribunal de grande instance de Bordeaux admettant M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2012 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

Considérant que M. X fait appel du jugement du 10 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 26 avril 2011 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a procédé au retrait de sa carte de résident et a assorti ce retrait d'une obligation de quitter le territoire français ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, d'admettre M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'administration a envoyé à M. X à l'adresse qu'il avait indiqué comme étant la sienne un courrier en date du 10 février 2011 l'invitant à présenter ses observations sur le retrait de titre de séjour envisagé et que le pli a été retourné avec la mention " non réclamé " ; que, par suite, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, dès lors qu'il a mis le requérant à même, par son courrier du 10 février 2011, de présenter des observations écrites sans être tenu de le mettre, par ce même courrier, à même de présenter des observations orales, de se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix, cette obligation ne lui incombant le cas échéant que si l'intéressé en effectue la demande ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne aurait entaché sa décision de retrait de son certificat de résident d'un vice de procédure ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le retrait, motivé par la rupture de la vie commune, de la carte de résident délivrée sur le fondement du 3° de l'article L. 314-9 ne peut intervenir que dans la limite de quatre années à compter de la célébration du mariage (...) " ; et qu'aux termes de l'article L. 314-9 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " La carte de résident peut être accordée : (...) 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. " ;

Considérant que M. X a épousé une ressortissante française le 28 octobre 2003 ; qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant a établi, le 26 janvier 2010, une attestation à l'appui d'un dossier de demande d'acquisition de la nationalité française par laquelle il déclare vivre avec une compatriote depuis 2006 ; qu'il a donc dissimulé à l'autorité préfectorale la rupture de sa communauté de vie en qualité de conjoint de français lorsqu'il a déposé sa demande de délivrance d'une carte de résident en cette qualité le 18 avril 2007 ; que le titre de séjour qui lui a été délivré le 6 juin 2007 à la suite de cette demande a donc été obtenu par fraude et pouvait lui être retiré sans condition de délai, soit au-delà du délai de 4 ans mentionné par les dispositions précitées de l'article L. 314-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le requérant ne peut, par suite, utilement se prévaloir ; que, dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur de fait que le préfet de la Haute Garonne a retiré à M. X son titre de séjour ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant, né en 1977, est entré en France au mois d'avril 2004 en conséquence du mariage qu'il a contracté au mois d'octobre 2003 avec une ressortissante française ; qu'une requête en divorce a été déposée au mois d'octobre 2007 ; qu'il vit depuis 2006 avec Mlle Y, compatriote en situation irrégulière, dès lors que la requête qu'elle a formée contre la décision portant refus de séjour a été rejetée par un arrêt du même jour que le présent arrêt ; qu'il se prévaut également de la naissance de leur trois enfants en 2007, 2008 et 2011 sur le sol français et de la scolarisation des deux aînés ; qu'il fait également valoir la présence en France de membres de sa proche famille et sa bonne intégration professionnelle ; que, toutefois, rien ne s'oppose à ce qu'il puisse reconstituer sa cellule familiale au Kosovo, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans, avec sa concubine et leurs trois jeunes enfants ; que, dans les circonstances de l'espèce, les décisions portant retrait de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté ; que, pour les mêmes motifs, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, rien ne s'oppose à ce que le requérant, sa compagne et leurs trois jeunes enfants s'installent ensemble au Kosovo, pays dont est originaire tant M. X que sa compagne ; que la circonstance tenant à la naissance des enfants en France et au début de scolarisation des aînés à l'école maternelle ne suffit pas à établir que l'autorité administrative n'aurait pas accordé, en l'espèce, une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants du requérant, compte tenu notamment de leur âge et de la faible durée de leur séjour sur le territoire national ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive susvisée du 16 décembre 2008 : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers de partir plus tôt. 2. Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...)" ;

Considérant que le requérant n'établit pas que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant à un mois seulement son délai de départ volontaire, en se bornant à faire valoir " l'ancienneté de son séjour et ses attaches familiales " ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préfet se serait cru lié par le délai de départ volontaire de 30 jours et n'aurait pas examiné la nécessité de prolonger ledit délai, comme le prévoit le 2) de l'article 7 de la directive susvisée du 16 décembre 2008 ; qu'enfin, la scolarisation des deux filles aînées du requérant en école maternelle n'imposait pas au préfet d'octroyer un délai de départ particulier ;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi, alors même que le préfet a procédé au retrait de sa carte de résident en même temps qu'il a rejeté la demande de titre de séjour de sa concubine, Mlle Y, en avril 2011 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 novembre 2011, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser au conseil du requérant la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : La requête de M. Perparim X est rejetée.

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No 11BX03187


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 11BX03187
Date de la décision : 27/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. JACQ
Rapporteur ?: M. Jean-Emmanuel RICHARD
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : DE BOYER MONTEGUT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2012-03-27;11bx03187 ?
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