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08/10/2013 | FRANCE | N°13BX00037

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 08 octobre 2013, 13BX00037


Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par MeC... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201839 du 4 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 16 mars 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler les décisions contestées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l

a Haute-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié",...

Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par MeC... ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201839 du 4 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 16 mars 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler les décisions contestées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord instituant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie en date du 12 septembre 1963, approuvé et confirmé par la décision 64/732/CEE du Conseil du 23 décembre 1963 ;

Vu la décision du conseil d'association entre la Communauté économique européenne et la Turquie n° 1/80 du 19 septembre 1980 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2013 :

- le rapport de M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité turque, interjette appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 4 décembre 2012 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 mars 2012 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement ;

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant la décision attaquée rappelle les conditions d'entrée et de séjour en France de M. A...et précise que ce dernier a épousé une ressortissante française le 6 septembre 2008, qu'une ordonnance de non-conciliation a été prononcée par le tribunal de grande instance de Toulouse, qu'il est entré récemment en France et qu'il a conservé des attaches familiales dans son pays d'origine, à savoir ses parents, ses deux soeurs et ses quatre frères ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient M.A..., la décision est suffisamment motivée en fait ; que l'arrêté mentionne les textes dont le préfet a fait application ; que, dès lors que l'intéressé a formulé sa demande sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'absence de visa de l'accord instituant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie en date du 12 septembre 1963 et des décisions du conseil d'association entre la Communauté économique européenne et la Turquie n° 1/80 et 3/80 du 19 septembre 1980, dont, au demeurant, il n'a pas été fait application, n'affecte pas la motivation de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation au regard des prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 manque en fait ;

3. Considérant que, si M. A...est entré en France pour la première fois en 2005, il est constant qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement exécutée en 2009 et qu'il est revenu en France pour la dernière fois le 18 janvier 2010, comme en atteste le tampon apposé sur son passeport ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'erreur de fait sur la date d'entrée en France de l'intéressé manque également en fait ;

4. Considérant que, d'une part, aux termes de l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association institué par l'accord d'association susvisé, conclu le 12 septembre 1963 entre la Communauté économique européenne et la République de Turquie : " 1. Sous réserve des dispositions de l'article 7 relatif au libre accès à l'emploi des membres de sa famille, le travailleur turc, appartenant au marché régulier de l'emploi d'un Etat membre : / - a droit, dans cet Etat membre, après un an d'emploi régulier, au renouvellement de son permis de travail auprès du même employeur, s'il dispose d'un emploi (...) " ; que, d'autre part, aux termes de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande : (...) 4° Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s'il est titulaire du statut de résident de longue durée-CE accordé par la France en application de l'article L. 314-8. A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour (...) " ;

5. Considérant que M. A...soutient que, reposant sur le défaut de production d'un visa long séjour, la décision est entachée d'erreur de droit au regard des stipulations de l'article 6 de la décision du conseil d'association entre la Communauté économique européenne et la République de Turquie du 19 septembre 1980, qui ne prévoit pas une telle condition ; que, toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier, en particulier de la demande de titre de séjour du requérant, que ce dernier a sollicité, à la suite de son divorce, un changement de statut sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur le fondement des stipulations susmentionnées ; que, d'autre part, l'intéressé a sollicité ce changement le 16 janvier 2012, alors que sa carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " expirait le 6 janvier 2012 ; que, dans ces conditions, la demande de l'intéressé, tardive au regard des dispositions susrappelées de l'article R. 311-2 du même code, ne pouvait qu'être analysée comme une première demande, qui devait être accompagnée d'un visa de long séjour, conformément aux dispositions de l'article L. 311-7 dudit code ; qu'en l'absence d'un tel visa, c'est sans erreur de droit que le préfet de la Haute-Garonne a rejeté la demande de titre de séjour de M. A...en qualité de salarié ;

6. Considérant que le requérant produit plusieurs copies de bulletin de salaire couvrant une période comprise entre 2 août 2010 et le 13 juillet 2011 émanant de plusieurs employeurs et un contrat de travail à durée indéterminée daté du 12 septembre 2011 ; que, par suite et alors même que son changement d'emploi au mois de septembre 2011 était dû à la liquidation judiciaire de l'entreprise, les éléments produits ne justifient pas de ce qu'à la date de la demande de titre de séjour, soit le 16 janvier 2012, le requérant travaillait auprès du même employeur depuis plus d'un an, condition de durée posée par les stipulations de l'article 6 de la décision du conseil d'association du 19 septembre 1980 ; qu'en tout état de cause, le préfet n'étant pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé pouvait prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement de l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980, le moyen tiré de la violation de ces stipulations ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant que M. A...fait valoir qu'il appartenait au préfet de transmettre les documents joints à sa demande de titre de séjour en qualité de salarié à la direction départementale du travail (DIRECCTE) et, s'il estimait que le dossier de demande était incomplet, de l'inviter à fournir les pièces nécessaires, en application de l'article 2 du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 ; que, toutefois, compte tenu de l'absence de justification d'un visa long séjour, le préfet pouvait, pour ce seul motif, refuser à M. A...le titre de séjour portant la mention " salarié " ; que, par suite et en tout état de cause, le préfet n'était dans l'obligation ni de saisir la direction départementale chargée du travail, ni d'inviter M. A...à compléter son dossier ;

8. Considérant que le requérant soutient qu'il est entré en France en 2005 et qu'il réside donc depuis six ans sur le territoire national ; que, cependant, comme il a été dit précédemment, si l'intéressé est entré en France pour la première fois en 2005, il est constant qu'il a quitté ce pays en 2009 pour ne revenir que le 18 janvier 2010 ; qu'en outre, il est séparé de son épouse et sans enfant à charge ; qu'il n'établit pas avoir noué d'autres liens sur le territoire national depuis 2005 alors qu'il conserve des attaches familiales en Turquie où il a vécu la majeure partie de sa vie et où résident notamment ses parents et ses six frères et soeurs ; que, dans ces circonstances, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, la décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant que M. A...fait valoir que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en s'abstenant de faire usage de son pouvoir de régularisation ; que, s'il appartient à l'autorité préfectorale d'apprécier, au regard de la situation personnelle de l'étranger, l'opportunité d'une mesure de régularisation, il ressort des pièces du dossier, notamment des énonciations de la décision en litige, que le préfet de la Haute-Garonne s'est livré à un examen approfondi de la situation personnelle de M. A...avant de décider de lui refuser un titre de séjour ; que, par suite, le moyen manque en fait ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, que, pour les motifs développés ci-dessus, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de titre opposé à M. A...ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ;

12. Considérant que M. A...fait valoir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée faute de viser l'accord instituant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie en date du 12 septembre 1963, approuvé et confirmé par la décision 64/732/CEE du Conseil des communautés européennes du 23 décembre 1963, et les décisions du conseil d'association entre la Communauté économique européenne et la Turquie n° 1/80 et 3/80 du 19 septembre 1980 ; que, toutefois, il résulte de ce qui précède que la décision de refus de séjour est suffisamment motivée ; que l'arrêté vise le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont le préfet a fait application et qui fonde l'obligation contestée ; que, dans ces conditions, la décision en litige comporte une motivation conforme à l'article L. 511-1 ;

13. Considérant que le requérant entend reprendre à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français l'ensemble des moyens soulevés à l'appui de la contestation du refus de séjour ; que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés, ces moyens doivent être écartés ;

14. Considérant que M. A...ne démontre pas qu'il pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour ; qu'en conséquence, il n'invoque pas pertinemment un tel droit pour contester l'obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant un délai de départ volontaire de trente jours :

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours " ;

16. Considérant que M. A...soutient que le délai de trente jours qui lui a été accordé pour quitter le territoire français est insuffisamment motivé ; que, toutefois, dès lors que ce délai de trente jours accordé à un étranger pour exécuter une obligation de quitter le territoire français constitue un délai équivalent au délai de droit commun susceptible d'être accordé, l'absence de prolongation de ce délai n'a pas à faire l'objet d'une motivation spécifique, distincte de celle du principe même de ladite obligation, à moins que l'étranger ait expressément demandé le bénéfice d'une telle prolongation en faisant valoir des éléments suffisamment précis quant à sa situation personnelle, susceptibles de rendre nécessaire une telle prolongation ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ait demandé au préfet de la Haute-Garonne à bénéficier d'une prolongation du délai de trente jours accordé pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

17. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne, qui a mentionné dans son arrêté que la situation personnelle de M. A...ne justifiait pas qu'à titre exceptionnel un délai de départ supérieur à trente jours lui soit accordé, se soit abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de l'intéressé ;

18. Considérant que, si le requérant soutient qu'il aurait dû bénéficier d'un délai supérieur compte tenu de l'ancienneté de son séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier que, en lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours, soit le délai de droit commun prévu par le II de l'article L. 511-1, le préfet ait fait une appréciation manifestement erronée de la situation de l'intéressé ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

19. Considérant qu'il suit de ce qui vient d'être exposé que le moyen, invoqué par voie d'exception, tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

21. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions d'annulation de l'arrêté en litige, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A...ne peuvent être accueillies ;

Sur les frais de procès :

22. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. A...demande le versement au profit de son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête susvisée de M. A...est rejetée.

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No 13BX00037


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00037
Date de la décision : 08/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Michel BAYLE
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : THEPOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-10-08;13bx00037 ?
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