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31/12/2013 | FRANCE | N°12BX01493

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 31 décembre 2013, 12BX01493


Vu la requête enregistrée le 14 juin 2012 présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) FDE représentée par son liquidateur amiable Mme A...domiciliée ...;

La société FDE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000506 du 12 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 27 982 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2010 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices qu'elle a subis

la suite des barrages et des attroupements qui ont entravé l'exercice de son commerce d...

Vu la requête enregistrée le 14 juin 2012 présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) FDE représentée par son liquidateur amiable Mme A...domiciliée ...;

La société FDE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000506 du 12 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 27 982 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2010 et de la capitalisation de ces intérêts, en réparation des préjudices qu'elle a subis à la suite des barrages et des attroupements qui ont entravé l'exercice de son commerce du 10 février au 14 mars 2009 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 27 982 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2010 et de la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de condamner l'Etat au paiement des entiers dépens de l'instance ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité intérieure ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2013 :

- le rapport de M. Philippe Cristille, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public ;

- et les observations de Me Laborie, avocat de la société FDE ;

1. Considérant que la société FDE exploite sous l'enseigne " Bocado " au centre commercial Génipa Plazza à Ducos, un magasin de vente d'objets de décoration, de cadeaux et de petits meubles ; qu'à la suite du mouvement de revendication contre la vie chère qui a affecté la Martinique en février et en mars 2009, la société FDE a recherché la responsabilité de l'Etat à raison de son manque à gagner qu'elle impute aux manifestations et aux barrages aux abords de son établissement ayant entravé ou ralenti son activité du 10 février au 14 mars 2009 ; que MmeA..., désignée comme liquidateur amiable de la société FDE, fait appel du jugement du 12 avril 2012 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté la demande de la société tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser, en réparation du préjudice subi, la somme de 27 982 euros majorée des intérêts légaux à compter du 10 mars 2010 et de la capitalisation de ces intérêts ;

Sur la responsabilité pour faute de l'Etat :

2. Considérant que s'il appartenait au préfet de la Martinique de prendre toutes dispositions nécessaires pour rompre les barrages dressés par les manifestants qui entravaient les voies de circulation et permettre une utilisation normale du domaine public, l'obligation qui lui incombait trouvait toutefois sa limite dans les nécessités de l'ordre public ; que si le préfet a choisi de poursuivre les négociations engagées avec les représentants des manifestants, cette attitude, qui a d'ailleurs permis la conclusion d'un protocole de fin de conflit, ne révèle pas, compte tenu de l'ampleur du mouvement, de la tension sociale et politique régnant sur l'Ile pendant toute la période en cause et des troubles plus graves encore qu'aurait pu entraîner la décision d'utiliser la force publique pour faire évacuer les barrages, de carence constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Sur la responsabilité sans faute de l'Etat sur le fondement de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales :

3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales alors applicable, désormais repris à l'article L.211-10 du code de la sécurité intérieure : " L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens " ; qu'il est établi, notamment par les constats d'huissiers dressés du 7 février au 10 mars 2009 à la demande de la société FDE ou d'autres sociétés décrivant les barrages installés à l'entrée du centre commercial Genipa à Ducos où se trouve l'établissement de la société requérante, que ces agissements sont constitutifs des délits d'entrave à la circulation et à la liberté du travail commis à force ouverte par un rassemblement précisément identifié composé de manifestants de la Confédération générale du travail de la Martinique et du "collectif du 5 février" dit K5F, qui avaient lancé un mouvement de grève générale contre la vie chère ; que, toutefois, à supposer que la totalité du préjudice commercial subi par la société requérante résulte de manière directe et certaine des agissements en cause, ceux-ci ne peuvent, dans les circonstances de l'espèce, être regardés, eu égard à leur caractère prémédité et organisé révélé par la concertation et les mesures de surveillance qu'impliquait le maintien des barrages pendant une telle durée, comme ayant été le fait d'un attroupement ou d'un rassemblement au sens de l'article L.2216-3 du code général des collectivités territoriales ;

Sur la responsabilité de l'Etat sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques :

4. Considérant que les dommages résultant de l'abstention de l'autorité administrative compétente de prendre les mesures nécessaires pour rétablir l'ordre ne peuvent, lorsque cette abstention n'est pas fautive, engager la responsabilité de cette autorité que si cette abstention a été directement à l'origine d'un dommage anormal et spécial ; que si la société requérante affirme avoir subi un préjudice s'élevant à 27 982 euros en raison de l'interruption de son activité du 10 février au 14 mars 2009, elle n'établit pas, eu égard au caractère général du blocage qui a nécessairement affecté la quasi-totalité des entreprises implantées en Martinique, avoir subi un préjudice spécial susceptible d'être indemnisé sur le fondement de la rupture de l'égalité devant les charges publiques ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société FDE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'aucun dépens n'a été exposé au cours de l'instance ; que les conclusions présentées par la société FDE à ce titre ne peuvent donc qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la société FDE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société FDE est rejetée.

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N°12BX01493


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX01493
Date de la décision : 31/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Philippe CRISTILLE
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : CABINAT D'AVOCATS TRILLAT ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2013-12-31;12bx01493 ?
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