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11/02/2014 | FRANCE | N°12BX02254

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 11 février 2014, 12BX02254


Vu la requête, enregistrée le 22 août 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant ... par Me C...;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001636 du 15 mai 2012 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a limité à 9 000 euros le montant de l'indemnité que le centre hospitalier de Périgueux a été condamné à lui verser en réparation des préjudices subis du fait du décès de son enfant avant sa naissance ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Périgueux à lui verser une indemnité d'un montant de 50 000 euros ;

) de mettre à la charge du centre hospitalier de Périgueux la somme de 5 000 euros en applicatio...

Vu la requête, enregistrée le 22 août 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant ... par Me C...;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001636 du 15 mai 2012 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a limité à 9 000 euros le montant de l'indemnité que le centre hospitalier de Périgueux a été condamné à lui verser en réparation des préjudices subis du fait du décès de son enfant avant sa naissance ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Périgueux à lui verser une indemnité d'un montant de 50 000 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Périgueux la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ;

Vu l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 ;

Vu les décrets n° 2010-251 et n° 2010-252 du 11 mars 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 janvier 2014 :

- le rapport de M. Bernard Leplat,

- les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

1. Considérant que, le 27 novembre 2002, une échographie réalisée à 31 semaines d'aménorrhée dans le cadre du suivi de la grossesse de Mme B...au centre hospitalier de Périgueux, a permis de déceler une hypotrophie foetale ; que la sage-femme qui a réalisé l'échographie a adressé le jour même Mme B...au praticien hospitalier qui la suivait ; que celui-ci ne pouvant la recevoir, un rendez-vous a été fixé au 13 décembre ; que l'échographie réalisée lors de cette consultation a révélé le décès du foetus dont Mme B...a accouché le 16 décembre suivant ; qu'à la suite du dépôt du rapport de l'expertise effectuée en exécution de l'ordonnance du 12 avril 2006 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, Mme B..., imputant le décès de son enfant à une faute du centre hospitalier de Périgueux, a demandé au tribunal administratif de Bordeaux la condamnation de cet établissement à l'indemniser de ses préjudices ; que Mme B...relève appel du jugement du 15 mai 2012 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a limité à 9 000 euros le montant de l'indemnité que le centre hospitalier de Périgueux a été condamné à lui verser en réparation des préjudices subis du fait du décès de son enfant ;

2. Considérant que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou du traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.

3. Considérant qu'il n'est plus contesté qu'alors que l'échographie réalisée le 27 novembre 2002 par une sage-femme expérimentée avait révélé un retard de croissance du foetus, la circonstance que le gynécologue-obstétricien qui suivait la grossesse de Mme B...ne l'a pas examinée et ne lui a proposé un nouveau rendez-vous que le 13 décembre 2002, date à laquelle la mort du foetus n'a pu qu'être constatée, révèle une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier de Périgueux ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expertise, que, compte tenu des risques liés à la prématurité, la probabilité qu'une césarienne, pratiquée le 27 novembre 2002 ou peu de temps après, à 33 semaines d'aménorrhée, donne naissance à un enfant présentant des séquelles neuro-sensorielles était de l'ordre de 20 à 30 % ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la faute ainsi commise ne pourrait donner lieu qu'à la réparation d'une fraction des préjudices résultant de la perte de chance pour Mme B...de mettre au monde et d'élever une petite fille indemne de tout handicap ou de toute malformation; que, toutefois, alors qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les risques liés à la prématurité n'induisaient qu'une probabilité de naissance d'une enfant présentant des séquelles de l'ordre de 20 à 30 %, les premiers juges ont fixé à 50 % la fraction du préjudice devant être déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ; que s'ils ont, pour ce faire, tenu compte d'un risque lié à la pathologie de la mère, le rapport de l'expertise se borne à relever l'existence de cette pathologie sans faire état d'incidences de celle-ci sur le déroulement de la grossesse avant l'échographie du 27 novembre 2002 ; que le centre hospitalier de Périgueux n'apporte aucun élément probant de nature à établir que Mme B...n'aurait peut être pas accepté qu'une césarienne fût pratiquée ; que, dans ces conditions, la fraction du préjudice devant être déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue doit être fixée à 75 % ;

4. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que, contrairement à ce qu'elle soutient, la prise en charge de Mme B...par le centre hospitalier de Périgueux se serait déroulée, en dehors de la faute commise et rappelée au point 3, dans des conditions particulièrement désinvoltes et traumatisantes ; que Mme B...n'apporte pas davantage d'éléments, relatifs à sa situation personnelle et familiale, de nature à faire regarder les premiers juges comme ayant fait une insuffisante appréciation du préjudice moral et de celui résultant des troubles de toute nature dans les conditions d'existence en l'évaluant à la somme de 18 000 euros ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant de l'indemnité que le centre hospitalier de Périgueux doit être condamné à verser à Mme B...doit être porté à la somme de 13 500 euros ; que, dès lors, Mme B...est seulement fondée à demander la réformation dans cette mesure du jugement attaqué ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que, par décision du 22 octobre 2012, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande de Mme B...tendant à l'obtention de cette aide ; que, dès lors, son conseil ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, toutefois, Mme B...ayant demandé le paiement des frais exposés et non compris dans les dépens en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de du centre hospitalier de Périgueux le versement à celle-ci de la somme de 1 500 euros sur ce fondement ;

DECIDE

Article 1er : L'indemnité que le centre hospitalier de Périgueux a été condamné à verser à Mme B...par le jugement du 15 mai 2012 du tribunal administratif de Bordeaux est portée de 9 000 euros à 13 500 euros.

Article 2 : Le jugement du 15 mai 2012 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier de Périgueux versera à Mme B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

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No 12BX02254


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 12BX02254
Date de la décision : 11/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-01-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation. Responsabilité pour faute simple : organisation et fonctionnement du service hospitalier. Existence d'une faute. Retards.


Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Bernard LEPLAT
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS LE GUAY - CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-02-11;12bx02254 ?
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