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12/06/2014 | FRANCE | N°12BX02142

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 12 juin 2014, 12BX02142


Vu la requête, enregistrée le 9 août 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Lapique, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1002370 du 10 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 170 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des travaux publics réalisés sur la route nationale n° 21 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 170 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une s

omme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 9 août 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Lapique, avocat ;

Mme B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1002370 du 10 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 170 000 euros en réparation des préjudices subis du fait des travaux publics réalisés sur la route nationale n° 21 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 170 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mai 2014 :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Dupuy, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme B...est propriétaire d'un manoir à Villecomtal-sur-Arros (Gers) ; que, dans le cadre du programme d'amélioration de la sécurité routière, les services de l'Etat ont procédé à la pose de glissières le long de la route nationale 21 ; que la réalisation des travaux a entraîné la fermeture d'une allée de 200 mètres reliant le manoir de Mme B...à la route nationale 21 ; que Mme B...relève appel du jugement n°1002370 du 10 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 170 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de ces travaux ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que Mme B...avait demandé au tribunal administratif de Pau la condamnation de l'Etat sur les fondements de la responsabilité pour faute et sans faute ; que le tribunal a omis de se prononcer sur les conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité pour faute de l'Etat ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler son jugement ;

Sur la responsabilité pour faute :

3. Considérant qu'il est constant que la dangerosité de la route nationale 21, laquelle est bordée de platanes, rendait nécessaire la réalisation de travaux de sécurisation tenant au traitement des obstacles latéraux ; que si Mme B...fait valoir qu'il était possible d'interrompre la glissière de sécurité au droit de l'entrée de sa propriété, en abattant le cas échéant les deux platanes implantés en bordure de route, elle n'établit pas que ces travaux auraient permis d'assurer la sécurité de la route dans des conditions équivalentes ; que, dans ces conditions, l'Etat ne peut être regardé comme ayant commis une faute en décidant d'implanter une glissière de sécurité le long de la route nationale n°21, y compris au droit de la propriété de la requérante ; que la demande de cette dernière tendant à l'engagement de la responsabilité pour faute de l'Etat doit, par suite, être rejetée ;

Sur la responsabilité sans faute :

4. Considérant qu'il appartient au riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers d'établir, d'une part, le lien de causalité entre cette opération et les dommages invoqués et, d'autre part, le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter sans contrepartie les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les travaux susmentionnés ont eu pour effet de condamner l'accès au manoir de Mme B...par l'allée reliant la route nationale n° 21 à la cour intérieure de la propriété ; que si cette allée, dont Mme B...établit être la propriétaire, ne constituait pas la voie d'accès principale à la propriété, qui dispose d'un autre accès à la route nationale n° 21 via la voie communale n°16, il résulte cependant des clichés photographiques versés au dossier qu'elle participe au charme de la propriété ; qu'ainsi, la condamnation de cette allée par la pose d'une glissière de sécurité a porté atteinte au caractère des lieux et entraîné une dépréciation de la propriété, comme en atteste d'ailleurs un agent immobilier ; que, par leur importance, ces inconvénients excèdent ceux que les riverains des voies publiques doivent normalement supporter ; que, par suite, Mme B...est fondée à soutenir que la responsabilité sans faute de l'Etat est engagée ;

6. Considérant que la seule attestation d'un agent immobilier versée par MmeB..., relative au prix de mise en vente de la propriété, ne suffit pas à déterminer la dépréciation subie par l'immeuble de la requérante ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice tenant à cette dépréciation et du préjudice moral subi par Mme B...en lui allouant une somme totale de 10 000 euros ; qu'il y a lieu, par suite, de condamner l'Etat à verser à Mme B...la somme de 10 000 euros ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°1002370 du 10 juillet 2012 du tribunal administratif de Pau est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser une somme de 10 000 euros à MmeB....

Article 3 : L'Etat versera à Mme B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

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No 12BX02142


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12BX02142
Date de la décision : 12/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère spécial et anormal du préjudice.

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages causés par l'existence ou le fonctionnement d'ouvrages publics.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre DUPUY
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : SCP CHAMAYOU LAPIQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-06-12;12bx02142 ?
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