La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/08/2014 | FRANCE | N°14BX00563

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 25 août 2014, 14BX00563


Vu la requête enregistrée le 21 février 2014, présentée pour M. D...A..., demeurant..., par MeB... ;

M. A...demande au juge d'appel des référés :

1°) de réformer l'ordonnance n° 1305695 du 7 février 2014 du président du tribunal administratif de Toulouse, statuant en référé, en tant qu'il a limité la mission de l'expert qu'il a désigné à apprécier et évaluer l'importance des souffrances physiques et morales qu'il a endurées ainsi que des préjudices esthétique et d'agrément qui ont résulté pour lui des accidents de service dont il a été victime les 1

er juin 2006 et 27 mars 2012, et rejeté ses conclusions tendant à ce que soit ordonnée un...

Vu la requête enregistrée le 21 février 2014, présentée pour M. D...A..., demeurant..., par MeB... ;

M. A...demande au juge d'appel des référés :

1°) de réformer l'ordonnance n° 1305695 du 7 février 2014 du président du tribunal administratif de Toulouse, statuant en référé, en tant qu'il a limité la mission de l'expert qu'il a désigné à apprécier et évaluer l'importance des souffrances physiques et morales qu'il a endurées ainsi que des préjudices esthétique et d'agrément qui ont résulté pour lui des accidents de service dont il a été victime les 1er juin 2006 et 27 mars 2012, et rejeté ses conclusions tendant à ce que soit ordonnée une expertise complète de l'évaluation de ses préjudices ;

2°) de prescrire la mesure d'expertise sollicitée ;

3°) de déclarer l'expertise commune et opposable à la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- sa demande tendant à l'extension de la mesure d'expertise prescrite par l'ordonnance attaquée présente un caractère d'utilité, dès lors qu'il entend obtenir devant le juge du fond la réparation intégrale de ses préjudices, sur le fondement de la jurisprudence Moya-Caville ;

- sa demande présente également un caractère d'utilité, dès lors qu'il conteste les conclusions de l'expertise diligentée par l'administration, notamment celles du 5 septembre 2013 en tant qu'elles fixent la date de consolidation de son état de santé au 5 septembre 2013 et son taux d'incapacité permanente partielle à 5%, s'agissant de l'accident de service dont il a été victime le 27 mars 2012 ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 20 juin 2014, présenté pour la communauté urbaine Toulouse Métropole, par MeC..., qui conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle a donné pour mission à un expert d'apprécier et d'évaluer les souffrances, et les préjudices esthétique et d'agrément subis par M. A...résultant pour lui de l'accident de service dont il a été victime le 1er juin 2006 ;

Elle fait valoir que :

- l'extension de la mesure d'expertise est inutile, dès lors que l'expertise sollicitée par le requérant ne s'inscrit pas dans la perspective d'un litige né et actuel ;

- s'agissant de ses conclusions incidentes, sa responsabilité en qualité d'employeur du requérant ne saurait être recherchée en ce qui concerne l'accident de service du 1er juin 2006, alors que M. A...était employé par le Sivom de la banlieue ouest de Toulouse, et ce sans méconnaître l'autorité de la chose jugée le 17 juin 2009 par le tribunal administratif de Toulouse et le 24 janvier 2011 par la cour administrative d'appel de Bordeaux, qui ont reconnu le droit de M. A...d'obtenir réparation des préjudices personnels causés par des accidents de service survenus avant son transfert ; ces décisions juridictionnelles ont jugé que, ni le transfert de la compétence " élimination et valorisation des déchets ménagers " à la communauté urbaine Toulouse Métropole, ni la convention relative à la reprise du personnel n'avaient eu pour effet de substituer la communauté urbaine Toulouse Métropole au Sivom en ce qui concerne l'action indemnitaire engagée par M.A... ;

Vu le mémoire complémentaire enregistré le 3 juillet 2014, présenté pour M.A..., qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Il ajoute que la communauté urbaine Toulouse Métropole ne peut lui opposer l'autorité de chose jugée en raison de l'absence d'identité d'objet ; en effet, les décisions juridictionnelles dont la communauté urbaine Toulouse Métropole se prévaut concernaient les accidents de service dont il a été victime les 24 mai 1994 et 3 juillet 2000 ; en outre, la commission départementale de réforme désigne la communauté urbaine Toulouse Métropole comme étant son employeur s'agissant de l'accident de service du 1er juin 2006 ;

Vu le mémoire complémentaire enregistré le 17 juillet 2014, présenté pour la communauté urbaine Toulouse Métropole, qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu le mémoire complémentaire enregistré le 30 juillet 2014, présenté pour M.A..., qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 13 février 2014 du président de la cour portant désignation de M. Bernard Chemin, président de chambre, en qualité de juge des référés en application des dispositions du livre V du code de justice administrative ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) " ; qu'il appartient, en vertu de ces dispositions, au juge des référés saisi d'une demande d'expertise de rechercher dans quelle mesure cette expertise peut être utile à la solution d'un éventuel litige, en tenant compte, notamment, de l'existence d'une perspective contentieuse recevable, des possibilités ouvertes au demandeur pour arriver au même résultat par d'autres moyens, de l'intérêt de la mesure pour le contentieux né ou à venir ;

2. Considérant que M.A..., agent de salubrité territorial de la communauté urbaine Toulouse Métropole, a été victime d'accidents le 1er juin 2006 et le 27 mars 2012 qui ont été reconnus comme imputables au service ; qu'il a sollicité auprès du juge des référés une expertise complète afin d'évaluer le préjudice qu'il a subi du fait de ces accidents ; que par une ordonnance du 7 février 2014, le président du tribunal administratif de Toulouse a fait droit partiellement à demande en limitant l'expertise à l'effet d'apprécier et d'évaluer les souffrances physiques et morales endurées ainsi que les préjudices esthétique et d'agrément consécutifs à ces accidents de service ; que M. A...fait appel de cette ordonnance en tant qu'il n'a pas été fait droit à sa demande portant une expertise complète de l'évaluation du préjudice subi ; que par la voie de l'appel incident, la communauté urbaine Toulouse Métropole demande que l'ordonnance attaquée soit annulée en tant qu'elle a prescrit une expertise portant sur l'évaluation de préjudices consécutifs à l'accident de service du 1er juin 2006 ;

3. Considérant, en premier lieu, que pour demander la réformation de l'ordonnance attaquée, la communauté urbaine Toulouse Métropole fait valoir que sa responsabilité en qualité d'employeur ne saurait être recherchée pour ce qui concerne l'accident de service survenu le 1er juin 2006, alors que le requérant était employé par le Sivom de la banlieue ouest de Toulouse, et elle se prévaut à cet effet de l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal administratif de Toulouse du 17 juin 2009, confirmée par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 24 janvier 2011, qui ont jugé que ni le transfert de la compétence " élimination et valorisation des déchets ménagers " à la communauté urbaine Toulouse Métropole, ni la convention relative à la reprise du personnel n'avaient eu pour effet de substituer la communauté urbaine Toulouse Métropole au Sivom en ce qui concerne l'action indemnitaire engagée par M.A... ;

4. Considérant, toutefois, que la communauté urbaine Toulouse Métropole ne saurait se prévaloir de l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ces décisions juridictionnelles, dès lors qu'elles sont relatives à des actions indemnitaires engagées par le requérant portant sur des accidents de service dont il avait été victime antérieurement les 24 mai 1994 et 3 juillet 2000 ; qu'en outre, il appartient pas au juge des référés, qui n'est pas saisi du principal, de se prononcer sur le bien-fondé de l'action en responsabilité qui est susceptible d'être engagée, mais d'apprécier l'utilité de la mesure sollicitée sans que cette mesure ne préjuge la question de la responsabilité qui relève de la seule compétence du juge du fond ; que, par suite, la communauté urbaine Toulouse Métropole n'est pas fondée à demander, par la voie de l'appel incident, que la mesure d'expertise soit limitée aux conséquences dommages de l'accident de service survenu le 27 mars 2012 ;

5. Considérant, en deuxième lieu que la réparation forfaitaire à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions, ne fait cependant obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétique ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci ; que, dès lors, et dans la perspective d'une action en responsabilité tendant à la réparation intégrale du préjudice subi du fait des accidents en service dont a été victime M.A..., la mesure d'expertise médicale sollicitée par le requérant présente un caractère d'utilité au sens des dispositions précitées de l'article R. 532-1 du code de justice administrative ; que concernant l'accident de service du 27 mars 2012, si l'administration a fait procéder les 15 avril et 5 septembre 2013 à des expertises par un médecin agréé auprès d'elle, et si ces expertises avaient pour objet de fixer la date de consolidation, la durée de l'incapacité temporaire de travail, le taux d'incapacité permanente partielle et l'aptitude de M. A...à la reprise du travail, l'expertise diligentée par l'administration le 23 avril 2008 concernant l'accident du 1er juin 2006 avait seulement pour objet de fixer la date de consolidation ainsi que le taux d'incapacité permanente partielle de l'intéressé ; qu'en outre, le requérant fait valoir en appel qu'il conteste ces expertises, et notamment la date de consolidation au 5 septembre 2013 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 5 % ; que la mesure d'expertise sollicitée présente ainsi un intérêt dans le cadre d'un contentieux né ou à venir ;

6. Considérant, en troisième lieu, que M. A...demande que la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) soit attraite aux opérations d'expertise ; que, toutefois, le juge des référés a décidé que l'expertise se déroulerait au contradictoire de la caisse des dépôts et consignations, gestionnaire de la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales ; que, par suite, les conclusions du requérant tendant à ce que l'expertise soit déclarée commune et opposable à la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales sont dépourvues d'objet et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est seulement fondé à demander que l'ordonnance attaquée soit réformée en ce qu'elle a limité la mission assignée à l'expert s'agissant de l'évaluation de son préjudice, et de faire droit à la demande de l'intéressé en complétant cette mission comme il est dit au dispositif de la présente ordonnance ; qu'en revanche, la communauté urbaine Toulouse Métropole n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Toulouse a prescrit une mesure d'expertise portant sur l'évaluation de préjudices consécutifs à l'accident de service du 1er juin 2006 ;

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la communauté urbaine Toulouse Métropole une somme 800 euros à verser à M. A...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

ORDONNE

Article 1er : La mission confiée au docteur Borgel, expert, par l'article 2 de l'ordonnance n° 1305695 du 7 février 2014 du président du tribunal administratif de Toulouse, statuant en référé, est complétée ainsi qu'il suit :

- décrire les séquelles affectant M. A...en relation avec les accidents de service dont il a été victime le 1er juin 2006 et le 27 mars 2012, indépendamment de l'existence d'un éventuel état antérieur ;

- d'indiquer si son état de santé est ou non consolidé ; dans la négative, de préciser s'il est susceptible d'amélioration ou d'aggravation, ainsi que le délai à l'issue duquel il pourra être procédé à un nouvel examen ;

- de dégager l'ensemble des éléments propres à justifier l'indemnisation du préjudice subi, sous tous ses aspects, en relation stricte avec ces accidents de service, en particulier, sur la durée et le ou les taux de l'incapacité temporaire, la date de consolidation des blessures, le taux d'incapacité permanente partielle ;

- de donner son avis sur la répercussion de l'incapacité médicalement constatée sur la vie personnelle et professionnelle du requérant.

Article 2 : L'article 2 de l'ordonnance n° 1305695 du 7 février 2014 du président du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'elle a de contraire avec l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : La communauté urbaine Toulouse Métropole versera la somme de 800 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de A...et les conclusions d'appel incident de la communauté urbaine Toulouse Métropole sont rejetés.

''

''

''

''

2

N°14BX00563


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 14BX00563
Date de la décision : 25/08/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-011-04 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé tendant au prononcé d'une mesure d'expertise ou d'instruction. Conditions.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SANSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-08-25;14bx00563 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award