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18/12/2014 | FRANCE | N°14BX01957

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 18 décembre 2014, 14BX01957


Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2014, présentée pour Mme B...C...demeurant..., par Me Bonneau, avocat ;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400439 du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2014 du préfet des Deux-Sèvres lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d

es Deux-Sèvres, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze ...

Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2014, présentée pour Mme B...C...demeurant..., par Me Bonneau, avocat ;

Mme C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400439 du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2014 du préfet des Deux-Sèvres lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Deux-Sèvres, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de statuer à nouveau sur sa demande en tenant compte des motifs pour lesquels 1'annulation de 1'arrêté aura été prononcée, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de la décision, de lui remettre une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quarante-huit heures à compter de la même date, également sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Bonneau de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le traité sur l'Union européenne ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 10 septembre 2013, dans l'affaire C 383/13 PPU ;

Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2014 :

- le rapport de M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme B...D...épouseC..., ressortissante arménienne née le 27 mars 1993, est entrée irrégulièrement en France le 1er septembre 2011, accompagnée de son époux, M. A...C..., également de nationalité arménienne ; que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 24 décembre 2012, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 19 décembre 2013 ; que par arrêté du 17 janvier 2014, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays d'origine comme pays de renvoi ; que Mme C...relève appel du jugement n° 1400439 du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu, soulevé par la requérante à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français dans son mémoire en réplique ; que, par suite, le jugement attaqué est entaché d'irrégularité, pour ce motif, en tant qu'il a statué sur la demande de Mme C...tendant à l'annulation de cette décision et il doit être annulé dans cette mesure ; qu'il y a lieu, pour la cour, d'une part, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme C...tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, d'autre part, de statuer sur les autres conclusions par l'effet dévolutif de l'appel ;

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué a été signé par le secrétaire général de la préfecture, qui avait reçu délégation du préfet des Deux-Sèvres " à l'effet de signer tous les arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département ", à l'exception d'actes étrangers à l'application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par arrêté du 7 février 2013 publié au recueil normal des actes administratifs de la préfecture des Deux-Sèvres n° 8 du 8 février 2013, disponible en particulier sous sa forme électronique ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté préfectoral du 17 janvier 2014 vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cet acte rappelle les dispositions de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), en précisant " que Mme C... ne peut plus être autorisée à séjourner sur le territoire national au titre de sa demande d'asile " et qu' " elle ne peut être autorisée à séjourner sur le territoire national à un autre titre et notamment sous le couvert d'une carte de séjour délivrée sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du CESEDA... " ; que l'arrêté indique également que la requérante " ne fait valoir aucune considération humanitaire ni motif exceptionnel de nature à obtenir une admission exceptionnelle au séjour prévue par l'article L. 313-14 du CESEDA " et que " faisant l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour " elle " peut dès lors se voir appliquer les dispositions de l'article L. 511-1 I alinéa 3 du CESEDA ", article dont l'arrêté reprend les termes ; que le préfet a indiqué en outre que " le dossier de Mme C... ne permet pas d'établir qu'elle relèverait d'une des situations énumérées à l'article L. 511-4 du code précité " ; que, ce faisant, et contrairement à ce que soutient la requérante, l'autorité administrative a visé les dispositions du CESEDA dont elle a fait application ;

5. Considérant, en troisième lieu, que cet acte rappelle les conditions d'entrée en France de l'intéressée ainsi que le rejet de sa demande d'asile par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 24 décembre 2012, puis par arrêt de la Cour nationale du droit d'asile du 19 décembre 2013 ; qu'il précise, d'une part, que l'intéressée ne prouve ni être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, ni courir dans cet Etat un risque de traitements inhumains, d'autre part, que cette dernière n'a fourni aucun élément faisant apparaître qu'elle se trouverait dans une situation familiale, sociale, médicale ou autre justifiant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles les décisions qu'il contient sont fondées, est suffisamment motivé au regard des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que la décision obligeant Mme C...à quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle du refus de séjour dont ladite obligation découle, dès lors que ce refus est dument motivé, comme c'est le cas ; qu'il ressort de la motivation de l'arrêté que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de MmeC... ;

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-13 du CESEDA: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-11 est délivrée de plein droit à l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire en application de l'article L. 712-1 du présent code, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) La carte délivrée au titre du présent article donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle. " ; qu'aux termes de l'article L. 314-11 du même code : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / (...) 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code ainsi qu'à son conjoint et à ses enfants dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 lorsque le mariage est antérieur à la date de cette obtention ou, à défaut, lorsqu'il a été célébré depuis au moins un an, sous réserve d'une communauté de vie effective entre les époux ainsi qu'à ses ascendants directs au premier degré si l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié est un mineur non accompagné (...) " ; que, dès lors que le statut de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire avaient été refusés à MmeC..., par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le préfet des Deux-Sèvres était tenu de refuser à cette dernière la délivrance des titres de séjour prévus à l'article L. 313-13 et au 8° de l'article L. 314-11 du CESEDA, sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ;

7 Considérant, toutefois, que le préfet, qui ne s'est pas cru lié par les décisions de l'OFPRA et de la Cour nationale du droit d'asile, a estimé que Mme C...ne pouvait être autorisée à séjourner sur le territoire national à un autre titre et notamment sous couvert d'une carte de séjour délivrée sur le fondement des articles L. 313-11 7° ou L. 313-14 du CESEDA ; que, par suite, la requérante peut se prévaloir de ces textes pour contester le refus de titre de séjour, alors même qu'elle n'aurait sollicité la délivrance d'une carte sur ces fondement que le 24 janvier 2014, postérieurement à la décision en litige ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du CESEDA : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ;

9. Considérant que Mme C...soutient que le centre de ses intérêts est désormais en France où se situent ses attaches familiales et où elle poursuit ses efforts d'insertion et de formation ; qu'elle se prévaut en particulier de son engagement en qualité de bénévole dans un commerce solidaire à Niort depuis le 15 janvier 2014 et de son inscription auprès de diverses associations dans le but d'apprendre le français ; qu'elle allègue n'avoir plus de contact avec ses parents qui auraient dû fuir en Russie ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme C... est entrée en France irrégulièrement en septembre 2011 selon ses déclarations ; qu'ainsi qu'il a été dit, sa demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA le 24 décembre 2012 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 19 décembre 2013 ; qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'elle ne justifie pas de son insertion dans la société française et n'établit pas y avoir tissé des liens personnels et familiaux en dehors de son époux, qui fait l'objet d'une mesure identique et concomitante, et de leurs enfants mineurs ; que, si elle fait valoir que son fils Gajik, né le 22 décembre 2011 à Niort, est inscrit dans une halte garderie dans cette ville depuis le mois de juin 2012 et doit être scolarisé à compter de septembre 2014, Mme C... ne démontre pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie familiale hors de France, avec son époux et ses deux enfants mineurs ; que, dans ces conditions, la décision de refus de séjour du 17 janvier 2014 n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui la fondent ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que cette décision méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou le 7° de l'article L. 313-11 du CESEDA doivent être écartés ; que pour les motifs précités, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7.(...) " ;

11. Considérant, d'une part, que MmeC..., qui argue à ce titre de l'état de santé de son époux, produit des certificats médicaux datés des 12 novembre 2012, 30 décembre 2013 et 16 janvier 2014 émanant de médecins du centre hospitalier de Niort et se prévaut de l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé le 1er avril 2014 dans le cadre de la demande de carte de séjour en qualité d'étranger malade que son conjoint a présentée par courrier du 24 janvier 2014 ; que, toutefois, si ces certificats, rédigés à la demande de M. C..., confirment qu'il souffre d'un stress post traumatique et qu'il bénéficie d'un suivi psychiatrique et d'un traitement médical régulier dont l'interruption serait néfaste à son état psychique, comme le reconnaît d'ailleurs le médecin de l'agence régionale de santé, ils ne remettent pas en cause, en raison des termes généraux et non circonstanciés dans lesquels ils sont rédigés, l'avis de ce médecin selon lequel il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ; que ces certificats n'établissent pas davantage qu'un retour dans son pays exposerait ce dernier à une réminiscence des événements traumatiques allégués, susceptible d'aggraver son état de santé ; que, si Mme C...excipe également sur ce point des risques que son mari encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, elle n'apporte aucun élément permettant de tenir pour établis la réalité et le caractère actuel comme personnel de ces risques ; que, par suite doit être écarté le moyen tiré de ce que, en lui refusant un titre de séjour, le préfet des Deux-Sèvres aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du CESEDA ; que pour les même motifs doit être écarté, en tout état de cause, le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 susvisée ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

12. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union " ;

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 511-1 du CESEDA, applicables au présent litige, sont issues de dispositions de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui ont procédé à la transposition, dans l'ordre juridique interne, des objectifs de la directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

14. Considérant, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé dans les motifs de son arrêt du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, que les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui relève des droits de la défense figurant au nombre des droits fondamentaux faisant partie intégrante de l'ordre juridique de l'Union européenne et consacrés par la charte des droits fondamentaux ; que si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu ;

15. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du CESEDA, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

16. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance d'un titre de séjour, le cas échéant au titre de l'asile, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, Mme C...a précisé sa situation à l'administration, les motifs pour lesquels elle demandait que lui soit délivré un titre de séjour et a pu produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartenait, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'elle jugeait utiles ; qu'il lui était loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressée d'être entendue, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'imposait pas à l'autorité administrative de la mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir qu'en prenant à son encontre une mesure d'éloignement sans la mettre en mesure de présenter ses observations, le préfet aurait porté atteinte au principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement ainsi qu'au principe général des droits de la défense tel qu'ils figure à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union ;

17. Considérant que, pour critiquer la motivation de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 17 janvier 2014, Mme C...ne peut utilement se prévaloir directement des articles 5 et 6 de la directive 2008/115/CE susvisée dès lors qu'à la date de cet arrêté, cette directive avait été transposée en droit interne ; qu'en outre, ainsi qu'il vient d'être dit aux points 4 et 5, l'arrêté attaqué énonce de manière suffisamment détaillée les motifs de droit et de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour estimer que l'intéressée n'avait pas droit au séjour et, par suite, lui faire obligation de quitter le territoire français ;

18. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier des termes de l'arrêté du 17 janvier 2014, que le préfet ne s'est pas cru tenu d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;

19. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'implique pas en elle-même la fixation du pays de renvoi ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article L. 513-2 du CESEDA est inopérant et doit être écarté ;

20. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;

21. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (....) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

22. Considérant que, comme il a été dit au point 11, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C...serait dans l'impossibilité de bénéficier effectivement des traitements médicaux appropriés dans son pays d'origine, l'Arménie ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 511-4,10° du CESEDA doit, en tout état de cause, être écarté ;

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de renvoi :

23. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

24. Considérant que, ainsi qu'il a été dit au point 1, la demande d'asile présentée par Mme C...a été rejetée par décision de l'OFPRA du 24 décembre 2012 et que le recours de l'intéressée contre ce refus a été rejeté par la Cour nationale du droit d'asile le 19 décembre 2013 ; que, si la requérante fait valoir que son époux aurait fait l'objet de violences quand il se trouvait en Arménie et que son retour dans ce pays l'exposerait à un risque de traitements inhumains ou dégradants, elle ne produit au soutien de ses allégations, au demeurant non circonstanciées, aucun élément de nature à établir la réalité des craintes qu'elle invoque ; que, dans ces conditions, en désignant l'Arménie comme pays d'éloignement, le préfet des Deux-Sèvres, dont il n'apparaît pas qu'il se soit senti lié par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne s'est pas davantage livré à une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de MmeC...;

25. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MmeC..., d'une part, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du préfet des Deux-Sèvres du 17 janvier 2014 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et fixant le pays de renvoi, d'autre part, n'est pas non plus fondée à demander l'annulation de la décision de cette autorité l'obligeant à quitter le territoire français ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

26. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de MmeC..., n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

27. Considérant que les dispositions de ces articles font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400439 du 28 mai 2014 du tribunal administratif de Poitiers est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme C...tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français prise par l'arrêté du 17 janvier 2014 du préfet des Deux-Sèvres.

Article 2 : La demande de Mme C...devant le tribunal administratif de Poitiers tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français prise par l'arrêté du 17 janvier 2014 du préfet des Deux-Sèvres et le surplus des conclusions de sa requête devant la cour sont rejetés.

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N° 14BX01957


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX01957
Date de la décision : 18/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: M. Jean-Michel BAYLE
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : SCP ARTUR - BONNEAU - CALIOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-12-18;14bx01957 ?
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