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05/03/2015 | FRANCE | N°11BX00469

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, 05 mars 2015, 11BX00469


Vu la requête, enregistrée le 17 février 2011, présentée pour la SCI DLM, dont le siège est 8 rue Alibert à Rodez (12000), par Me B...;

La SCI DLM demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603360 du 17 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Rodez à lui verser la somme de 15 833,49 euros en réparation du préjudice résultant de l'inondation de l'immeuble lui appartenant ;

2°) de condamner le centre hospitalier à lui verser cette somme ainsi que les inté

rêts légaux et la capitalisation de ces intérêts à la date de sa demande devant le tr...

Vu la requête, enregistrée le 17 février 2011, présentée pour la SCI DLM, dont le siège est 8 rue Alibert à Rodez (12000), par Me B...;

La SCI DLM demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603360 du 17 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Rodez à lui verser la somme de 15 833,49 euros en réparation du préjudice résultant de l'inondation de l'immeuble lui appartenant ;

2°) de condamner le centre hospitalier à lui verser cette somme ainsi que les intérêts légaux et la capitalisation de ces intérêts à la date de sa demande devant le tribunal administratif ;

3°) subsidiairement, de désigner un expert afin qu'il identifie les dommages et détermine leur imputabilité et le coût des réparations nécessaires ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Rodez les dépens et une somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2015 :

- le rapport de Mme Sabrina Ladoire, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Christine Mège, rapporteur public ;

1. Considérant que la SCI DLM est propriétaire d'un immeuble situé 8 rue Alibert à Rodez (Aveyron), qui jouxte le centre hospitalier de Rodez ; qu'elle a subi, en juillet 2001, des inondations suite à l'infiltration d'eau à travers le mur mitoyen ; qu'imputant ces inondations à un fossé creusé par le centre hospitalier, qui se remplit d'eau régulièrement lors des intempéries, elle a sollicité la condamnation de cet hôpital à lui verser une somme de 15 833,13 euros TTC en réparation de ses préjudices ; qu'elle relève appel du jugement n° 0603360 du 17 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande indemnitaire ; que le centre hospitalier de Rodez demande à la cour de rejeter la requête de la SCI DLM et de condamner cette société à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice consécutif à l'acharnement procédural de cette société ; que par un arrêt avant-dire droit rendu le 1er mars 2012, la cour, après avoir écarté l'exception de prescription soulevée par le centre hospitalier, a ordonné une expertise afin de déterminer l'origine du sinistre subi par la société requérante et de chiffrer ses préjudices ; que l'expert désigné par le président de la cour a remis son rapport le 2 septembre 2014 ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier :

2. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expert que les infiltrations d'eau provenaient du fonds supérieur appartenant au centre hospitalier de Rodez, et préexistaient ainsi à l'excavation réalisée par ce centre en août 2001, afin d'identifier la cause des premières infiltrations survenues dans l'immeuble de la SCI DLM ; que si les investigations menées par le service des eaux de la commune, qui ont consisté à interrompre la distribution d'eau durant une nuit et à procéder à des tests de coloration, n'ont pas permis d'établir que cette eau provenait des réseaux de l'hôpital, il résulte de l'instruction que les premières infiltrations ont été constatées dans la maison de la société requérante quatre mois seulement après que le centre hospitalier ait procédé, en mars 2001, à la mise en place d'une conduite drainante afin de remédier à l'écoulement de l'eau dans le pavillon Jean Moulin implanté à proximité immédiate de l'immeuble en litige ; que contrairement à ce que soutient le centre hospitalier en défense, il ne ressort pas des pièces du dossier que les infiltrations auraient été antérieures à ces travaux, les désordres constatés en août 2001 étant alors d'une importance relative ainsi qu'en atteste le fait qu'ils avaient, à cette date, été évalués à la somme de 762,65 euros ; qu'en outre, le centre hospitalier n'a jamais déféré à la demande présentée par le cabinet d'expertise Elex, le 10 septembre 2001, et tendant à ce que cet hôpital produise des documents de nature à déterminer la nature exacte des travaux réalisés en mars 2001 et le volume de terre extrait à proximité du mur mitoyen ; qu'il existe ainsi une concomitance entre la réalisation des travaux de terrassement dans le pavillon Jean Moulin et les premières infiltrations survenues dans l'immeuble de la société requérante ; qu'en outre, suite à ces premières infiltrations, le centre hospitalier a créé une excavation de 7 mètres de longueur, 2 mètres de largeur et 2 mètres de profondeur, au droit du mur mitoyen avec la propriété de la SCI DLM, créant ainsi un réceptacle d'eaux attenant à ce mur ; que cette excavation n'a jamais été remblayée depuis 2002 alors que le centre hospitalier n'établit nullement qu'il aurait proposé une telle mesure à son voisin sans en obtenir de réponse ; qu'il ressort du rapport de l'expert que si l'origine des premières infiltrations reste selon lui indéterminée, celle des suivantes est de toute évidence le creusement par le centre hospitalier de la fouille contre le mur mitoyen, laquelle récupère les eaux de ruissellement, son abandon ultérieur sans réalisation d'un exutoire, ainsi que le déversement dans cette tranchée des eaux de toiture de l'immeuble voisin appartenant à M. A...; qu'ainsi, les inondations qui se sont produites dans le rez-de-chaussée de cet immeuble sont en lien direct avec les travaux réalisés par le centre hospitalier, quand bien même les eaux de l'immeuble A...s'y sont également déversées ; qu'enfin, si le centre hospitalier soutient que les inondations seraient imputables à un manquement de la société requérante qui n'aurait pas veillé à l'étanchéité du mur, il ressort de l'expertise réalisée par le cabinet Polyexpert en 2006, que le mur en pierres dont s'agit était d'une épaisseur suffisante pour interrompre toute inondation, et que la protection du mur mitoyen du côté de l'hôpital ne pouvait incomber qu'à celui-ci ; que le centre hospitalier ne saurait davantage se prévaloir utilement du fait que les inondations ont cessé depuis que la SCI DLM a créé un lit drainant sous le dallage du rez-de-chaussée de l'immeuble lui appartenant dans la mesure où selon l'expertise judiciaire, cette solution ne peut être efficace que temporairement, et où d'autres éléments, notamment la destruction du pavillon Jean Moulin en 2011, après la vente du bien à la communauté d'agglomération du Grand Rodez, ont pu également contribuer à la disparition des désordres ; que les inondations répétées de l'immeuble appartenant à la SCI DLM, qui constituent un dommage anormal et spécial, doivent donc être regardées come trouvant ainsi leur cause, principalement, dans l'excavation réalisée par le centre hospitalier de Rodez ; qu'il s'ensuit que la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier de Rodez soit déclaré responsable des conséquences résultant de ces inondations ;

3. Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que l'immeuble de la société DLM a été rénové à l'exclusion du cellier, qui conserve d'importantes traces d'humidité ; que la réfection de l'enduit de cette pièce, dégradé par les infiltrations, a été chiffrée par l'expert à la somme de 3 600 euros TTC ; que cette somme n'est pas sérieusement contestée par le centre hospitalier de Rodez ;

4. Considérant que les travaux visant à prévenir la survenance d'un nouveau sinistre, et qui consistent essentiellement à remblayer l'excavation et à créer une canalisation d'exutoire le long du mur mitoyen afin de permettre l'évacuation gravitaire des eaux drainées, sont évalués à la somme de 9 425,03 euros ; que de tels travaux ne peuvent être réalisés que par le propriétaire du terrain d'amont, soit aujourd'hui la communauté d'agglomération du Grand Rodez ; que par suite, la SCI ne saurait demander le versement à son profit de la somme nécessaire à leur réalisation ;

5. Considérant que la société DLM, qui s'est bornée depuis sa requête devant le tribunal à produire divers devis, mais aucune facture, et n'a pas justifié de ses préjudices auprès de l'expert, n'apporte aucune justification au surplus de la somme de 13 000 euros, portée sans autre explication en dernier lieu à 16 000 euros, qu'elle demande au titre des préjudices subis ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Rodez doit seulement être condamné à verser à la SCI DLM la somme de 3 600 euros TTC en réparation de ses préjudices ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

7. Considérant qu'en application de l'article 1153 du code civil, la SCI DLM a droit aux intérêts sur la somme de 3 600 euros que le centre hospitalier de Rodez est condamné à lui verser, à compter de la réception de sa réclamation préalable à l'administration du 17 novembre 2004 ; que cette société a demandé la capitalisation des intérêts le 1er septembre 2006 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément à l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter de cette date, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur les conclusions indemnitaires pour procédure abusive présentées par le centre hospitalier de Rodez :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que ni la demande de la SCI DLM présentée devant le tribunal administratif de Toulouse, ni sa requête devant la cour ne présentent un caractère abusif ; que par suite, les conclusions incidentes présentées par le centre hospitalier de Rodez tendant à ce que cette société soit condamnée à lui verser des dommages-intérêts pour procédure abusive ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Sur les frais d'expertise :

9. Considérant qu'aux termes de l'article R.761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties " ;

10. Considérant que les frais de l'expertise ont été taxés et liquidés, par ordonnance du 18 novembre 2014 de la présidente de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, à la somme de 3 978 euros TTC ; qu'il résulte de ce qui précède que ces frais doivent être mis à la charge du centre hospitalier de Rodez ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par le centre hospitalier de Rodez sur leur fondement ;

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Rodez une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SCI DLM et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0603360 du 17 décembre 2010 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier de Rodez versera la somme de 3 600 euros TTC à la SCI DLM. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable à l'administration du 17 novembre 2004. Les intérêts échus le 1er septembre 2006 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : Le centre hospitalier de Rodez versera à la SCI DLM la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 3 978 euros sont mis à la charge du centre hospitalier de Rodez.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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No 11BX00469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11BX00469
Date de la décision : 05/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-03 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. Lien de causalité.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Guillaume de la TAILLE LOLAINVILLE
Rapporteur public ?: Mme MEGE
Avocat(s) : COUTURIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-03-05;11bx00469 ?
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