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10/03/2015 | FRANCE | N°13BX00540

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 10 mars 2015, 13BX00540


Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013, présentée pour la société Foncière de la Roche, dont le siège est situé 109 quai Wilson à Bègles (33130), par Me Grasset, avocat ;

La société Foncière de la Roche demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100848, 110849 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de son premier exercice allant du 1er avril

2005 au 31 décembre 2006, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa c...

Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013, présentée pour la société Foncière de la Roche, dont le siège est situé 109 quai Wilson à Bègles (33130), par Me Grasset, avocat ;

La société Foncière de la Roche demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100848, 110849 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de son premier exercice allant du 1er avril 2005 au 31 décembre 2006, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er avril 2005 au 31 juillet 2007 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2015 :

- le rapport de Mme Béatrice Duvert, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public ;

1. Considérant que la société (SARL) Foncière de la Roche, qui exerce depuis le 1er décembre 2004 une activité de promoteur immobilier, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er décembre 2004 au 31 juillet 2007 ; qu'à l'issue de ce contrôle, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de son premier exercice allant du 1er avril 2005 au 31 décembre 2006, établies selon la procédure de taxation d'office, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er avril 2005 au 31 juillet 2007, établis selon la procédure contradictoire, ont été mis à sa charge ; que la SARL Foncière de la Roche interjette appel du jugement du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : / (...) 2° à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 68 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / (...) " ;

3. Considérant que si la société Foncière de la Roche soutient qu'elle a déposé dans les délais sa déclaration de résultats, relative à la période allant du 1er avril 2005 au 31 décembre 2006, correspondant à son premier exercice, auprès du centre des impôts de Bordeaux-Talence, elle n'apporte aucun élément de nature à en justifier ; qu'il résulte de l'instruction que, par courrier du 4 juillet 2007, la société requérante a été mise en demeure de déposer, dans un délai de trente jours à compter de la notification de ladite lettre, les déclarations de résultat de l'exercice clos le 31 décembre 2006, qui aurait dû être déposée avant le 3 mai 2007 ; que, malgré cette mise en demeure, la société n'a remis la déclaration en cause, que le 27 septembre suivant, soit postérieurement à l'expiration du délai de trente jours à compter de la notification, le 6 juillet 2007, de la mise en demeure ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit, en vertu des articles L. 66 et L. 68 précités du LPF, que l'administration a, en matière d'impôt sur les sociétés, procédé à la taxation d'office de la société requérante ;

4. Considérant que s'il ressort des termes de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié que la possibilité de faire appel, en cas de désaccord persistant avec le vérificateur, au supérieur hiérarchique de celui-ci puis, le cas échéant, à l'interlocuteur départemental, constitue une garantie substantielle de procédure, une telle garantie ne bénéficie qu'au contribuable relevant d'une procédure d'imposition contradictoire ; que la société Foncière de la Roche ayant en matière d'impôt sur les sociétés, ainsi qu'il a été dit au point 3, régulièrement fait l'objet d'une procédure de taxation d'office, en application des dispositions du 3 des articles L. 66 et L. 68 du LPF, le moyen tiré de ce qu'elle aurait été privée de la faculté de saisir le supérieur hiérarchique du vérificateur est inopérant ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) " ;

6. Considérant que si la société Foncière de la Roche fait valoir qu'à la page 2 de la proposition de rectification du 28 mars 2008, il est mentionné que les rectifications concernent les bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés de 2005 alors qu'à la page 10 serait également visée l'année 2006, la mention incomplète figurant en page 2 n'a pu être de nature à induire en erreur la société contribuable sur la période d'imposition, dès lors qu'il résulte clairement de la lecture complète du document que les rehaussements d'impôt sur les sociétés, résultant de la réintégration dans les bénéfices imposables d'une facture de la société IDBTP du 12 août 2005, ont été effectués au titre du premier exercice de la société allant du 1er avril 2005 au 31 décembre 2006 ; qu'il suit de là que la société Foncière de la Roche n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification serait entachée d'insuffisance de motivation de ce chef ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 10 du LPF : " (...) / Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. " ; que le paragraphe 5 du chapitre III de cette charte, remise en l'espèce à la société requérante, indique que : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal. Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur " ;

8. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ce paragraphe de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié que des éclaircissements supplémentaires ne peuvent être fournis par l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, qu'après que le vérificateur a, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, répondu aux observations du contribuable et informé celui-ci de la persistance du désaccord et des motifs de ce désaccord ; qu'il suit de là que la demande d'éclaircissements à l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, ne peut qu'être postérieure à l'envoi par le vérificateur au contribuable de la confirmation des redressements envisagés ; qu'ainsi, les dispositions du paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié font obstacle à ce que la demande de saisine de l'inspecteur principal formée par le contribuable soit subordonnée à la réalisation ultérieure d'une condition tenant à ce que le vérificateur maintienne les redressements envisagés dans la notification adressée au contribuable ; que, par suite, l'administration n'entache pas d'irrégularité la procédure d'établissement de l'impôt en s'abstenant de donner suite à une telle demande conditionnelle de saisine de l'inspecteur principal, qui ne peut être regardée comme régulièrement formée ; que ne peut donc qu'être écarté le moyen que la procédure aurait été viciée à raison de l'absence de saisine du supérieur hiérarchique du vérificateur ;

Sur le bien-fondé des impositions :

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Foncière de la Roche, qui a été constituée en vue de construire une résidence de tourisme à La Roche Posay (Vienne) a, le 21 juillet 2005, conclu un marché, concernant le lot 08-VRD, avec la société IDBTP ; qu'à la suite de l'émission par cette société, le 12 août 2005, d'une facture d'acompte sur travaux de 30 % s'élevant à 244 900 euros toutes taxes comprises, la société requérante a, au titre de l'exercice clos en 2006, comptabilisé en charges la somme de 204 765 euros et, au titre du mois de novembre 2005, déduit la taxe sur la valeur ajoutée afférente, d'une montant de 40 134,11 euros ;

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

10. Considérant que l'administration a réintégré dans les bénéfices imposables de la société Foncière de la Roche au titre de l'exercice clos en 2006 la somme de 204 765 euros qu'elle avait déduite, estimant que cette somme couvrait une prestation fictive et ne correspondait pas, en contrepartie du règlement de la facture susmentionnée, à l'intérêt de l'exploitation ; que pour ce faire, l'administration s'est fondée sur les éléments recueillis dans l'exercice de son droit de communication auprès de l'architecte du chantier et de la Caisse d'Epargne Aquitaine ; qu'elle a ainsi constaté, d'une part, qu'aucune situation probante des travaux qui auraient été réalisés par la société IDBTP ne figurait au dossier et qu'un devis concernant des travaux identiques, ainsi qu'un marché concernant le gros-oeuvre, avaient été signés par les sociétés Potet et IDB, sociétés distinctes de la société IDBTP ; qu'elle a relevé, d'autre part, que le montant de l'acompte versé le 23 septembre 2005 par la société requérante à la société IDBTP avait été immédiatement reversé à des tiers ; que, par ailleurs, l'administration s'est fondée sur la circonstance qu'aucune facture de sous-traitance n'avait été comptabilisée au titre des travaux litigieux par la société IDBTP, alors que celle-ci ne disposait, au cours de la période litigieuse, d'aucun salarié ni d'aucun matériel et devait nécessairement faire appel à des entreprises sous-traitantes pour réaliser ses chantiers ;

11. Considérant que pour contester le bien-fondé du complément d'impôt sur les sociétés mis à sa charge, la société Foncière de la Roche, à qui incombe la charge de la preuve en application de l'article L. 193 du LPF, reprend en appel le moyen déjà soulevé en première instance et tiré de ce que la somme de 204 765,89 euros déduite de ses bénéfices imposables couvrait une prestation réellement effectuée sur le chantier en cause par la société IDTB ; que, toutefois, elle ne se prévaut d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

12. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

13. Considérant que l'administration fait état, ainsi qu'il a déjà été relevé au point 10, de ce qu'aucune situation probante de travaux réalisés par la société IDBTP n'a été produite, de ce que cette entreprise ne disposait d'aucun personnel et d'aucun matériel, de ce que des travaux identiques à ceux que devait effectuer la société IDBTP ont été réalisées par d'autres entreprises, enfin, de ce que le chèque de 244 900 euros, encaissé le 27 septembre 2005 par la société IDBTP, a fait l'objet de plusieurs reversements immédiats à des sociétés tierces ayant des liens avec la société requérante ; que, ce faisant, l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que l'acompte réglé sur la facture ne correspond pas à une opération réelle ; que si la société Foncière de la Roche produit plusieurs documents tels qu'un ordre de service du 21 juillet 2005 établi à l'intention de la société IDBTP pour qu'elle commence les travaux, la facture du 12 août 2005 susmentionnée et une situation de travaux au 29 juillet 2007, ces documents, en l'absence d'écriture comptable ou de pièce portant réception des travaux qu'aurait effectués la société IDBTP, ne permettent pas suffisamment de justifier de la réalité de l'opération ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a refusé d'admettre en déduction la taxe sur la valeur ajoutée grevant une charge dont la réalité n'est pas établie ;

Sur les pénalités :

14. Considérant qu'en vertu du 3. de l'article 1728 du code général des impôts, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti d'une majoration de 40 % lorsque celui-ci n'a pas déposé la déclaration qu'il est tenu de souscrire dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à la produire dans ce délai ;

15. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, la société Foncière de la Roche n'a pas déposé sa déclaration de résultats au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2006 dans les trente jours suivant la réception, le 6 juillet 2007, de la mise en demeure adressée par l'administration fiscale de déposer ladite déclaration ; que, par suite, c'est à bon droit que, par application des dispositions du 3 de l'article 1728 du CGI, les compléments d'impôt sur les sociétés auxquels la société requérante a été assujettis ont été assortis d'une majoration de 40 % ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Foncière de la Roche n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que la société Foncière de la Roche demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Foncière de la Roche est rejetée.

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N° 13BX00540


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX00540
Date de la décision : 10/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions.


Composition du Tribunal
Président : M. LALAUZE
Rapporteur ?: Mme Béatrice DUVERT
Rapporteur public ?: Mme DE PAZ
Avocat(s) : GRASSET.

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-03-10;13bx00540 ?
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