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22/06/2015 | FRANCE | N°13BX01763

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 22 juin 2015, 13BX01763


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 26 juin 2013 et régularisée par courrier le 1er juillet suivant, présentée pour la société Médiascience, venant aux droits de la société Jeulin, dont le siège est situé rue Jacques Monod ZI n° 1 BP 1900 à Evreux cedex (27019), par la société d'avocats Redlink ;

La société Mediascience demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001935 du 25 avril 2013 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation du marché conclu entre la région Aquitaine et la sociét

é Calibration en vue de l'équipement en systèmes d'expérimentation numérique pour les sc...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 26 juin 2013 et régularisée par courrier le 1er juillet suivant, présentée pour la société Médiascience, venant aux droits de la société Jeulin, dont le siège est situé rue Jacques Monod ZI n° 1 BP 1900 à Evreux cedex (27019), par la société d'avocats Redlink ;

La société Mediascience demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001935 du 25 avril 2013 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation du marché conclu entre la région Aquitaine et la société Calibration en vue de l'équipement en systèmes d'expérimentation numérique pour les sciences des lycées publics d'Aquitaine et, d'autre part, à la condamnation de la région à lui verser la somme de 400 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de son éviction de ce marché ;

2°) d'annuler le marché conclu par la région Aquitaine avec la société Calibration, et, en tout état de cause, de tirer les conséquences des irrégularités constatées ;

3°) de condamner la région Aquitaine à lui verser la somme globale de 1 200 000 euros, sauf à parfaire, en réparation des préjudices subis avec intérêts au taux légal et capitalisation ;

4°) de mettre à la charge de la région Aquitaine une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 2015 :

- le rapport de M. Olivier Gosselin, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Pierre Bentolila, rapporteur public ;

- et les observations de Me A...de la Société d'avocats Redlink, avocat de la

Société Mediascience et de Me Charrel, avocat de la région Aquitaine ;

1. Considérant que, le 10 septembre 2009, la région Aquitaine a lancé un appel d'offres ouvert à bons de commande, pour une durée de cinq mois à deux ans, concernant la fourniture d'équipements en systèmes d'expérimentation numérique de cent quatre-vingt cinq salles de sciences, réparties dans soixante-sept lycées publics de son ressort territorial ; que le marché portait sur l'acquisition de matériel informatique, de capteurs, de logiciels, de systèmes d'information et d'instruments de mesure physique ; que le montant initial des bons de commande était de 250 000 euros et le montant maximal de 1 000 000 euros ; que la société Médiascience, venant aux droits de la société Jeulin, candidate non retenue, relève appel du jugement du 5 avril 2013 du tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce marché et à l'indemnisation de son préjudice ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la société Mediascience soutient que les premiers juges n'ont pas mentionné les éléments de fait et de droit les ayant conduit à écarter le moyen tiré de ce que les prix de la société Calibration étaient anormalement bas ; qu'en effet, le jugement attaqué se borne à indiquer qu'il ne résulte pas de l'instruction que les prix proposés par la société Calibration, inférieurs de 30 % en base et 27 % en variante aux prix proposés par la société Jeulin, auraient été anormalement bas au sens de l'article 55 du code des marchés publics ; qu'en s'abstenant d'indiquer les éléments de l'instruction qu'ils retenaient pour écarter le moyen, qui n'était pas inopérant, alors que la société requérante avait précisé que le marché du matériel scientifique à usage de l'enseignement est caractérisé par une relative homogénéité de prix et de montant à matériel équivalent et qu'elle en déduisait que l'écart de prix laissait alors suspecter un prix anormalement bas, les premiers juges ont insuffisamment motivé leur jugement au regard des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ; qu'il doit, dès lors, être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiation sur la demande présentée par la société Mediascience devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et de condamnation :

4. Considérant qu'après avoir publié au bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) le 15 septembre 2009 un premier avis d'appel public à la concurrence, dans lequel la pondération des critères de sélection des offres était de 45 sur 100 pour la valeur technique du matériel, de 40 pour le prix et de 15 pour les délais de livraison, la région Aquitaine a, à la suite d'un échange de questions-réponses avec toutes les entreprises ayant téléchargé le dossier de consultation, via une messagerie sécurisée et horodatée, dont la requérante a pris connaissance, souhaité rectifier, à compter du 15 octobre 2009, la teneur du règlement de la consultation, en ce qui concerne la pondération de ces trois critères et en a informé directement et personnellement chacun des candidats ; qu'elle a publié le 17 octobre 2009 au BOAMP un avis rectificatif d'appel public à la concurrence dans lequel les critères désormais retenus donnaient une pondération de 65 sur 100 à la valeur technique du matériel, de 25 au prix et de 10 aux délais de livraison et dans lequel la date de remise des offres avait été repoussée au 25 novembre 2009 ;

5. Considérant qu'une personne publique peut apporter une rectification au dossier de consultation remis aux candidats à un appel d'offres dès lors que cette modification est faite dans des conditions garantissant l'égalité des candidats et leur permettant de disposer d'un délai suffisant, avant la date limite fixée pour la réception des offres, pour prendre connaissance de ces modifications et adapter leur offre en conséquence ; qu'il résulte de l'instruction que la rectification de l'appel d'offres, qui ne modifiait d'ailleurs pas substantiellement les conditions initiales de l'appel d'offres, a été publiée au BOAMP et que tous les candidats en ont été préalablement avisés par messagerie que l'entreprise a consultée le 15 octobre 2009 à 15 h 37 sur la plate-forme transmettant le règlement de consultation modifié et indiquant que le délai de présentation des offres était repoussé de trente-cinq jours ; que dans ces conditions, la modification de l'appel d'offres a été faite dans des conditions garantissant l'égalité des candidats et ne peut être regardée comme entachée d'une méconnaissance par la collectivité des obligations de publicité et de mise en concurrence lui incombant ;

6. Considérant que si la société Mediascience soutient que la région Aquitaine s'en est tenue aux critères initiaux d'analyse des offres, au lieu d'appliquer les nouveaux critères ou, qu'à tout le moins, elle a fait régner une incertitude quant aux critères effectivement appliqués, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'analyse des offres du 25 février 2010 et de l'avis de la commission d'appel d'offres que le jugement des offres a bien été effectué en appliquant les pondérations modifiées ; que la circonstance que l'avis d'attribution, ultérieurement publié au BOAMP le 26 mars 2010, mentionne, à la suite d'une simple erreur matérielle, les critères initiaux de pondération des offres est sans incidence sur les conditions d'examen des offres, dès lors qu'elle est intervenue après que le choix a été effectué par le pouvoir adjudicateur ; qu'au demeurant les courriers notifiant le rejet des offres des candidats précisent expressément les motifs détaillés de rejet des offres et mentionnent les critères utilisés ainsi que leur pondération, à savoir ceux de l'avis rectificatif du 17 octobre 2009 ; qu'enfin la circonstance qu'à l'occasion de la diffusion, le 13 octobre 2009, des réponses apportées aux questions d'un candidat, la pondération antérieure des critères ait été mentionnée n'est pas de nature à avoir induit en erreur les candidats sur ce point, dès lors que ces courriers sont antérieurs à l'avis d'appel d'offres rectifié publié au BOAMP le 17 octobre 2009 ; que, dans ces conditions, la société Mediascience n'est pas fondée à soutenir que la région Aquitaine aurait méconnu les obligations de publicité et de mise en concurrence lui incombant ;

7. Considérant que le procès-verbal de la réunion de la commission d'appel d'offres du 25 février 2010 à l'issue de laquelle il a été décidé de retenir l'offre présentée par la société Calibration, qui reprend les conclusions du rapport d'analyse des offres, est signé par les membres de la commission ; que la circonstance que le rapport lui-même ne soit pas signé est sans incidence sur l'appréciation par la commission de la valeur relative des offres des sociétés candidates et n'a donc pu compromettre les chances de la société requérante de remporter le marché ; qu'il en est de même du fait que ce rapport ne mentionne pas les modifications apportées à la pondération des critères, dès lors qu'il rappelle en introduction les critères définitivement retenus à la suite de la rectification de l'appel d'offres et leur pondération pour le jugement des offres ;

8. Considérant qu'aux termes du I de l'article 59 du code des marchés publics : " I. - Il ne peut y avoir de négociation avec les candidats. Il est seulement possible de demander aux candidats de préciser ou de compléter la teneur de leur offre. (...) " ; que si les services de la région Aquitaine ont contacté la société Calibration le 19 janvier 2010 pour qu'elle leur indique le débiteur des frais de renvoi du matériel sous garantie, les délais de garantie et un tarif de prix sur l'offre " variante ", cette circonstance ne suffit pas à établir que la région Aquitaine aurait, en méconnaissance des dispositions précitées, négocié avec cette entreprise candidate ; qu'enfin, les précisions demandées ne peuvent faire regarder l'offre de la société Calibration comme incomplète ;

9. Considérant qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article 52 du code des marchés publics, applicable à la sélection des candidatures : " Avant de procéder à l'examen des candidatures, le pouvoir adjudicateur qui constate que des pièces dont la production était réclamée sont absentes ou incomplètes peut demander à tous les candidats concernés de compléter leur dossier de candidature dans un délai identique pour tous et qui ne saurait être supérieur à dix jours. (...) Il en informe les autres candidats qui ont la possibilité de compléter leur candidature dans le même délai. (...) " ; qu'aux termes du troisième alinéa du même article : " Les candidatures (...) sont examinées au regard des niveaux de capacités professionnelles, techniques et financières mentionnées dans l'avis d'appel public à la concurrence (...). Les candidatures qui ne satisfont pas à ces niveaux de capacité sont éliminées. " ; qu'aux termes de l'article 53 de ce code : " I.- Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur se fonde : / 1° Soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l'objet du marché, notamment la qualité, le prix, la valeur technique (...). / III.- Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. (...) " ; qu'aux termes de l'article 58 du même code : " I. L'ouverture des plis n'est pas publique ; les candidats n'y sont pas admis. / Seuls peuvent être ouverts les plis qui ont été reçus au plus tard à la date et à l'heure limites qui ont été annoncées dans l'avis d'appel public à la concurrence. / Avant de procéder à l'examen des candidatures, le pouvoir adjudicateur qui constate que des pièces dont la production était réclamée sont absentes ou incomplètes, peut demander aux candidats de compléter leur dossier conformément aux dispositions du I de l'article 52. / II.-Au vu des seuls renseignements relatifs aux candidatures, les candidatures qui ne peuvent être admises en application des dispositions de l'article 52 sont éliminées. Cette élimination est effectuée par la commission d'appel d'offres pour les collectivités territoriales. Les candidats non retenus en sont informés conformément au I de l'article 80. / III.-Les offres inappropriées au sens du 3° du II de l'article 35 ainsi que les offres irrégulières ou inacceptables au sens du 1° du I de l'article 35 sont éliminées. Cette élimination est effectuée par la commission d'appel d'offres pour les collectivités territoriales. " ; que si la commission d'appel d'offres est seule à même de procéder à l'élimination d'un candidat lors de l'ouverture des plis, il résulte de l'instruction qu'en l'espèce, lors de la séance d'ouverture des plis le 26 novembre 2009, il n'a été procédé à aucune élimination de candidats ; que, dès lors, l'intervention de la commission d'appel d'offres ne s'imposait pas au cours de la phase de sélection des candidatures et le vice de procédure allégué, tiré de l'absence de réunion de ladite commission au cours de cette phase, doit être écarté ; qu'il a ensuite été procédé à l'analyse des offres le 25 février 2010 ; que dans ces conditions, la société Mediascience n'est pas fondée à soutenir que l'examen de l'offre de la société Calibration aurait été effectué avant que sa candidature ait été sélectionnée ;

10. Considérant que la société Mediascience soutient que la région Aquitaine n'a pas indiqué les modalités suivant lesquelles ont été pratiqués les tests sur les échantillons qu'elle lui avait remis et que ces tests n'ont pas été réalisés sur l'intégralité des produits couverts par la consultation, certains échantillons transmis n'ayant pas été déconditionnés ; que l'alinéa 2.3 de l'article 4 du règlement de consultation prévoyait qu' " afin d'optimiser l'analyse des offres et de vérifier le contenu du mémoire technique, une opération de test sera réalisée. " ; qu'à cette fin, il était prévu que chaque candidat remette des matériels d'équipement d'une salle, conformément à la liste décrite à l'article III.1-1 du cahier des clauses techniques particulières ; que font notamment partie de ces matériels les capteurs de tension, " teslamètres ", " conductimètres " et " luxmètres ", destinés à " mesurer les variations d'une grandeur physique provenant d'un phénomène biologique, physique ou chimique ", ainsi qu'une interface ou console destinée à permettre la connexion entre les capteurs et un micro-ordinateur ; que l'alinéa 4.2 du même article prévoit que les candidats présentent un dossier général " variantes " comportant un sous-dossier particulier pour chaque variante qu'ils proposent ; que si pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, rappelés par le II de l'article 1er du code des marchés publics, le pouvoir adjudicateur a l'obligation d'indiquer, comme en l'espèce, dans les documents de consultation les critères d'attribution du marché et leurs conditions de mise en oeuvre, il n'est en revanche pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation retenue pour apprécier les offres au regard de chacun de ces critères ; que la société Mediascience ne peut donc se prévaloir utilement de ne pas avoir été informée de la méthode de test et de notation des offres ; qu'il ne ressort par ailleurs pas de ces dispositions ni d'aucune des pièces du dossier de consultation que l'opération de test imposait au pouvoir adjudicateur de vérifier tous les matériels déposés contrairement à ce que soutient la société requérante ;

11. Considérant que la société Mediascience soutient que le motif lui reprochant son " impossibilité d'exporter des données vers un tableur externe " lui a été opposé à tort dans le courrier du 18 mars 2010 dès lors que les données acquises avec ses interfaces " Sinéo " et son logiciel " Atelier scientifique " prévoient et permettent l'export de données vers un tableur externe ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que si la fonctionnalité d'exporter des données vers un tableur externe existait bien dans le matériel fourni par la société Jeulin, cette fonctionnalité n'était pas aisément accessible ou identifiable par les élèves, futurs utilisateurs de ces matériels comme l'a noté la commission d'appel d'offres ; que, dès lors, la circonstance que le pouvoir adjudicateur ait, postérieurement au choix de l'offre retenue, résumé de façon erronée l'avis émis par les professeurs de lycée et les inspecteurs pédagogiques formant le groupe d'experts ayant procédé aux tests des matériels dans le courrier indiquant les motifs du rejet de l'offre de la société requérante, n'est pas de nature à établir que la région Aquitaine, en ne retenant pas cette offre, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de celle-ci sur ce point ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article 80 du code des marchés publics dans sa rédaction alors en vigueur : " I.-1° Pour les marchés et accords-cadres passés selon une procédure formalisée autre que celle prévue au II de l'article 35, le pouvoir adjudicateur, dès qu'il a fait son choix pour une candidature ou une offre, notifie à tous les autres candidats le rejet de leur candidature ou de leur offre, en leur indiquant les motifs de ce rejet. / Cette notification précise le nom de l'attributaire et les motifs qui ont conduit au choix de son offre aux candidats ayant soumis une offre et à ceux n'ayant pas encore eu communication du rejet de leur candidature. (...) " ; qu'aux termes de l'article 83 du même code : " Le pouvoir adjudicateur communique à tout candidat écarté qui n'a pas été destinataire de la notification prévue au 1° du I de l'article 80 les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre dans les quinze jours de la réception d'une demande écrite à cette fin. / Si le candidat a vu son offre écartée alors qu'elle n'était aux termes de l'article 35 ni inappropriée, ni irrégulière, ni inacceptable, le pouvoir adjudicateur est en outre tenu de lui communiquer les caractéristiques et les avantages relatifs de l'offre retenue ainsi que le nom du ou des attributaires du marché ou de l'accord-cadre. " ;

13. Considérant que la société Mediascience reproche à la région Aquitaine de ne pas avoir satisfait à son obligation de communiquer les caractéristiques et avantages relatifs de l'offre retenue, alors que, le 17 mai 2010, elle avait sollicité la communication de l'ensemble des documents de la consultation et du marché désormais conclu ; que, toutefois, si, pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, le pouvoir adjudicateur a l'obligation d'indiquer dans les documents de consultation les critères d'attribution du marché et leurs conditions de mise en oeuvre, il n'est en revanche pas tenu d'informer les candidats de la méthode de notation des offres, ainsi qu'il est rappelé au point 10 ci-dessus ; que, si la société requérante soutient que la collectivité a méconnu l'obligation de motivation de son courrier de rejet de l'offre d'un candidat évincé résultant des dispositions des articles 80 et 83 du code des marchés publics, il résulte de l'instruction que la personne publique a informé cette dernière du nom de l'entreprise attributaire du marché et des notes respectives obtenues par les deux sociétés concurrentes sur chacun des critères du marché, tant en offres de base qu'en variantes ; que ces informations, qui répondent aux prescriptions de l'article 83 du code des marchés publics, étaient suffisantes pour permettre à la société requérante de contester utilement son éviction devant le juge administratif ; que, dans ces conditions, aucun manquement ne peut être reproché à la région Aquitaine quant à ses obligations de communiquer les motifs de rejet de l'offre d'un candidat évincé ;

14. Considérant que la société Mediascience soutient que la société Calibration ne disposait pas des capacités techniques et financières pour présenter sa candidature et aurait fourni des informations erronées à ce sujet à la région Aquitaine ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la société avait fourni la liste des principales fournitures effectuées au cours des trois dernières années demandées par le règlement de consultation en indiquant avoir équipé, depuis 2006, au moins trente-huit lycées et en mentionnant la date d'exécution du marché et le montant ; que ni la circonstance que la société Mediascience n'aurait pas retrouvé trace de marchés attribués à l'entreprise retenue sur le site officiel des marchés publics, ni celle qu'au compte de résultat de l'entreprise figurerait un montant de chiffre d'affaires différent du total déclaré dans l'appel d'offres ne sont de nature à faire regarder les déclarations de l'entreprise comme erronées et susceptibles d'avoir eu pour effet de porter atteinte au principe d'égalité de traitement des candidats et à la transparence de la procédure ; qu'au demeurant, le règlement d'appel d'offres n'imposait pas de fournir des documents comptables ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article 55 du code des marchés publics : " Si une offre paraît anormalement basse, le pouvoir adjudicateur peut la rejeter par décision motivée après avoir demandé par écrit les précisions qu'il juge utiles et vérifié les justifications fournies. Pour les marchés passés selon une procédure formalisée par les collectivités territoriales et les établissements publics locaux, à l'exception des établissements publics de santé et des établissements publics sociaux ou médico-sociaux, c'est la commission d'appel d'offres qui rejette par décision motivée les offres dont le caractère anormalement bas est établi. (...) " ; que la société Mediascience soutient que l'offre de la société Calibration était d'environ 30 % inférieure à la sienne alors que le marché du matériel scientifique à usage de l'enseignement serait caractérisé par une relative homogénéité de prix et de montant à matériel équivalent et que c'est à tort que l'autorité administrative n'a pas mis en oeuvre la procédure de contrôle de l'article 55 relatif à l'offre anormalement basse ; que toutefois, il résulte de l'instruction que, sans être moins disante, l'offre d'une autre société était également inférieure à celle de la société Jeulin ; que par ailleurs, les allégations de la société Calibration sur l'homogénéité des prix dans ce type de marché ne sont assorties d'aucun commencement de preuve ; que, dès lors, la commission d'appel d'offres, en ne rejetant pas l'offre de la société Calibration comme anormalement basse et susceptible de compromettre la bonne exécution du marché, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il ait été besoin de rechercher s'il résultait de l'instruction que la société requérante établissait avoir été lésée par les manquements qu'elle invoque et de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par la région Aquitaine ou sur la recevabilité des conclusions indemnitaires présentées en appel, que la société Mediascience n'est fondée à demander ni l'annulation du marché conclu entre la région Aquitaine et la société Calibration en vue de l'équipement en systèmes d'expérimentation numérique pour les sciences des lycées publics d'Aquitaine, ni la condamnation de la région à réparer le préjudice qu'elle aurait subi du fait de son éviction de ce marché ;

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la région Aquitaine, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société Mediascience, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, pour les mêmes motifs, la demande présentée par la société Mediascience tendant à la condamnation de la région Aquitaine aux dépens doit être également rejetée ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée par la région Aquitaine au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1001935 du tribunal administratif de Bordeaux du 5 avril 2013 est annulé.

Article 2 : La requête de la société Mediascience présentée devant le tribunal administratif de Bordeaux et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions de la région Aquitaine présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 13BX01763


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 13BX01763
Date de la décision : 22/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-02-03 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Mode de passation des contrats. Appel d'offres.


Composition du Tribunal
Président : M. JOECKLÉ
Rapporteur ?: M. Olivier GOSSELIN
Rapporteur public ?: M. BENTOLILA
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS REDLINK

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2015-06-22;13bx01763 ?
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