La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/03/2016 | FRANCE | N°14BX02408

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 10 mars 2016, 14BX02408


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Société civile d'exploitation agricole (SCEA) du Ménuzé a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 20 avril 2011 du préfet du Gers en tant qu'elle n'a pas tenu compte, pour la mise en place du paiement découplé des aides communautaires pour la campagne 2011, d'une surface de 32,64 hectares consacrée à la culture de la prune d'Ente en 2007, ensemble la décision du ministre de l'agriculture du 17 octobre 2012 ayant rejeté son recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1

300123 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Pau a fait droit à sa demande.
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Société civile d'exploitation agricole (SCEA) du Ménuzé a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 20 avril 2011 du préfet du Gers en tant qu'elle n'a pas tenu compte, pour la mise en place du paiement découplé des aides communautaires pour la campagne 2011, d'une surface de 32,64 hectares consacrée à la culture de la prune d'Ente en 2007, ensemble la décision du ministre de l'agriculture du 17 octobre 2012 ayant rejeté son recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1300123 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Pau a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours, enregistré le 6 août 2014, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 28 mai 2014.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) nº 2201/96 du conseil du 28 octobre 1996 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits transformés à base de fruits et légumes ;

- le règlement (CE) n° 73/2009 du 19 janvier 2009, du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Mauny,

- les conclusions de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SCEA du Ménuzé.

Considérant ce qui suit :

1. Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt fait appel du jugement du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Pau a accueilli la demande de la SCEA du Ménuzé et annulé la décision du préfet du Gers du 20 avril 2011 en tant qu'elle n'a pas tenu compte, pour la mise en place du paiement découplé des aides communautaires pour la campagne 2011, d'une surface de 32,64 hectares consacrée à la culture de la prune d'Ente en 2007 ainsi que de la décision du 17 octobre 2012 du ministre de l'agriculture ayant rejeté son recours hiérarchique.

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 54 du règlement CE n° 73/2009 susvisé : " (...) 2. Les États membres peuvent conserver : a) jusqu'au 31 décembre 2010, jusqu'à 100 % de la composante des plafonds nationaux visés à l'article 40 du présent règlement qui correspond au soutien aux cultures de fruits et légumes autres que les cultures annuelles énumérées au troisième alinéa du présent paragraphe qui sont livrées à la transformation et qui étaient admissibles au bénéfice du régime d'aide prévu dans les règlements (CE) n° 2201/96 et (CE) n° 2202/96, et b) du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, jusqu'à 75 % de la composante des plafonds nationaux visés à l'article 40 du présent règlement qui correspond au soutien aux cultures de fruits et légumes autres que les cultures annuelles énumérées au troisième alinéa du présent paragraphe qui sont livrées à la transformation et qui étaient admissibles au bénéfice du régime d'aide prévu dans le règlement (CE) n° 2201/96 du Conseil du 28 octobre 1996 en ce qui concerne le régime d'aide dans le secteur des produits transformés à base de fruits et légumes et le règlement (CE) n° 2202/96 du Conseil du 28 octobre 1996 instituant un régime d'aide aux producteurs de certains agrumes. / Dans ce cas, et dans les limites du plafond fixé conformément à l'article 51, paragraphe 2, l'État membre concerné effectue, sur une base annuelle, un paiement supplémentaire en faveur des agriculteurs. / Le paiement supplémentaire est octroyé aux agriculteurs qui produisent un ou plusieurs des fruits et légumes ci-après, comme établi par l'État membre concerné, dans les conditions prévues au titre IV, chapitre 1, section 8 : (...) f) prunes d'Ente. (...) ". Aux termes du A de l'annexe IX de ce même règlement : " (...) 2. Les États membres déterminent le montant à inclure dans le montant de référence pour chaque agriculteur sur la base de critères objectifs et non discriminatoires, tels que : (...) b) la superficie utilisée pour la production des fruits et légumes, les pommes de terre de consommation et les pépinières (...) pour une période représentative, qui pourrait être différente pour chaque produit, d'une ou de plusieurs campagnes de commercialisation à partir de celle terminée en 2001 et, dans le cas des nouveaux États membres, jusqu'à la campagne de commercialisation prenant fin en 2007. / L'application des critères prévus au présent point peut varier selon les différents fruits et légumes, pommes de terre de consommation et pépinières si cela se justifie dûment d'une manière objective. Sur la même base, les États membres peuvent décider de ne pas déterminer les montants à inclure dans le montant de référence ni les hectares concernés au titre du présent point avant la fin d'une période transitoire de trois ans s'achevant le 31 décembre 2010. / 3. Les États membres déterminent les hectares concernés sur la base de critères objectifs et non discriminatoires tels que les superficies visées au point 2, premier alinéa, sous b). / 4. Tout agriculteur dont la production a été gravement affectée au cours de la période de référence visée au point 2 par un cas de force majeure ou des circonstances exceptionnelles survenus avant ou pendant ladite période de référence est habilité à demander que le montant de référence visé au point 2 soit calculé sur la base de l'année ou des années civiles de la période de référence qui n'ont pas été affectées par le cas de force majeure ou les circonstances exceptionnelles. ".

3. Aux termes de l'article D. 615-62-6 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable au litige : " II.- (...) Les montants à découpler pour les prunes d'ente destinées à la transformation sont répartis entre les agriculteurs admissibles, pendant la campagne de commercialisation de 2007, au régime d'aide visée au b du 2 de l'article 54 du même règlement (CE) n° 73/2009 et qui étaient titulaires du droit d'exploiter des vergers de prune d'ente au 31 août 2007. / III.- Les montants à inclure dans le montant de référence mentionné au point A de l'annexe IX du même règlement (CE) n° 73/2009 correspondent aux produits de la surface utilisée en 2007 par un montant unitaire fixé pour chaque catégorie de fruits par arrêté conjoint du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé du budget. / Les modalités de détermination des surfaces utilisées en prunes d'ente, en pêches et en poires destinées à la transformation sont définies par arrêté du ministre chargé de l'agriculture. / Cet arrêté précise également les modalités de prise en compte des circonstances exceptionnelles visées à l'article 31 du même règlement (CE) n° 73/2009. ". Aux termes de l'article premier de l'arrêté du 30 décembre 2011 relatif à l'intégration d'aides couplées dans le régime de paiement unique prévue par le règlement (CE) n° 73/2009 du 19 janvier 2009 : " Les surfaces en prunes d'ente et en pêches destinées à la transformation mentionnées au III de l'article D. 615-62-6 du code rural et de la pêche maritime sont celles mesurées dans le cadre du recensement des vergers effectué durant l'hiver 2007-2008 par système de positionnement par triangulation satellitaire (GPS) et transmises par les organisations de producteurs reconnues au ministre chargé de l'agriculture. ".

4. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées que l'assiette des aides communautaires prévues par le règlement n° 73/2009 est constituée des surfaces utilisées pour la culture des prunes d'Ente. Or il n'est pas contesté que la SCEA du Ménuzé, qui était titulaire du droit d'exploiter des vergers de prune d'Ente au 31 août 2007 et disposait de plantations sur une surface de 37,36 hectares à cette date, a procédé en décembre 2007 à la plantation de pruniers sur une surface supplémentaire de 32,64 hectares. Le ministre de l'agriculture n'est donc pas fondé à soutenir, quand bien même ces plants n'étaient pas productifs à cette date, que les 32,64 hectares litigieux n'étaient pas utilisés en 2007 pour la production de prunes. Par ailleurs, le préfet ne peut pas utilement soutenir que ces 32,64 hectares devaient être exclus de l'assiette des aides communautaires auxquelles la SCEA pouvait prétendre au motif qu'elle ne bénéficiait pas, concernant cette surface, de l'aide prévue par le règlement CE n° 2201/96 du Conseil du 28 octobre 1996, dès lors que ledit règlement portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits transformés à base de fruits et légumes prévoyait une aide à la production accordée au transformateur et non au producteur, et que la SCEA ne pouvait donc pas, en tout état de cause, bénéficier d'une aide au titre de cette surface en vertu dudit règlement.

5. En deuxième lieu, si le ministre soutient, d'une part, que la date du 7 avril 2008 figurant sur le relevé de mesures par GPS de la surface des 11 îlots de la SCEA de Ménuzé ne saurait donner date certaine à ce document, il ne prétend pas cependant que ce document aurait été contrefait, et ne conteste pas les courriers du Bureau national interprofessionnel du pruneau, dont le premier, daté du 7 avril 2008, fait état de la mesure par GPS des 11 îlots de l'exploitation, et le second, répondant à une demande de l'intimé du 2 janvier 2012, fait état d'une mesure de la surface de son verger effectuée en 2008. Le ministre n'est donc pas fondé à soutenir qu'il n'est pas établi que le relevé litigieux aurait été effectué pendant l'hiver 2007-2008, conformément à l'arrêté du 30 décembre 2011 précité. D'autre part, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la SCEA ne pouvait plus demander la modification de ses surfaces de référence le 3 janvier 2012, date à laquelle le Bureau national interprofessionnel du pruneau lui a communiqué une copie du relevé susmentionné, dès lors qu'il ressort sans ambigüité des pièces du dossier que cette demande a été effectuée par la société le 11 mai 2011, par un courrier qui n'a pas été regardé comme tardif par les services de la préfecture du Gers. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment d'un compte rendu de paiement du 1er décembre 2008 adressé à la SCEA, faisant état d'une surface de 70 hectares pour les prunes d'Ente pour transformation, que les services du ministère de l'agriculture n'auraient eu connaissance de ces mesures qu'au cours de la procédure précontentieuse.

6. En troisième lieu, les premiers juges ne se sont pas fondés sur la circonstance que la SCEA du Ménuzé aurait été contrainte de reporter à la fin de l'année 2007 la plantation des 32,64 hectares de pruniers d'Ente initialement prévue en 2006 pour annuler les décisions en litige. Le ministre ne saurait utilement rechercher l'annulation du jugement attaqué au motif qu'un tel report est sans incidence sur le calcul de ses surfaces de référence.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'agriculture n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du préfet du Gers du 20 avril 2011 en tant qu'elle n'a tenu compte, pour la mise en place du paiement découplé pour la campagne 2011, que d'une surface d'exploitation de 37,36 hectares consacrée en 2007, ainsi que de la décision du 17 octobre 2012 ayant rejeté le recours hiérarchique de la société.

Sur les conclusions à fin d'injonction de la SCEA du Ménuzé :

8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

9. Le présent arrêt implique nécessairement que le préfet du Gers prenne une nouvelle décision fixant la surface consacrée par la SCEA du Ménuzé à la culture de la prune d'Ente à 70,0030 hectares, au titre des éléments de référence pour la mise en place d'un paiement découplé en 2011, et lui octroie le complément d'aide correspondant aux 32,64 hectares non pris en compte. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Gers d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions aux fins d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, dans les circonstances de l'espèce, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SCEA du Ménuzé et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : Le recours du ministre de l'agriculture est rejeté.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Gers de prendre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une décision fixant la surface consacrée par la SCEA du Ménuzé à la culture de la prune d'Ente à 70 hectares, au titre des éléments de référence pour la mise en place d'un paiement découplé en 2011, et de lui octroyer, dans le même délai, le complément d'aide auquel elle peut prétendre.

Article 3 : Le ministre de l'agriculture versera à la SCEA du Ménuzé la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SCEA du Ménuzé est rejeté.

''

''

''

''

7

2

N° 14BX02408


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX02408
Date de la décision : 10/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-06 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Aides de l'Union européenne.


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MUNOZ-PAUZIES
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS LARROUY-CASTERA

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-03-10;14bx02408 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award