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26/04/2016 | FRANCE | N°15BX01935

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 26 avril 2016, 15BX01935


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

Le groupement d'entreprises Odicars/Cars, Arts/Autocar, Casteran/Autocars et Gérardin/Cars Evasion, représenté par la société Odicars a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, de résilier le contrat de délégation de service public conclu par le département de la Gironde avec la société Les autobus du Libournais pour l'exécution d'une ligne régulière du service public de transports interurbains, correspondant au lot n° 5, d'autre part, de condamner le département de la Gironde à lui verser la

somme de 18 155,14 euros hors taxes en réparation du préjudice résultant de son...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

Le groupement d'entreprises Odicars/Cars, Arts/Autocar, Casteran/Autocars et Gérardin/Cars Evasion, représenté par la société Odicars a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, d'une part, de résilier le contrat de délégation de service public conclu par le département de la Gironde avec la société Les autobus du Libournais pour l'exécution d'une ligne régulière du service public de transports interurbains, correspondant au lot n° 5, d'autre part, de condamner le département de la Gironde à lui verser la somme de 18 155,14 euros hors taxes en réparation du préjudice résultant de son éviction.

Par un jugement n° 1203101 du 15 avril 2015 le tribunal administratif de Bordeaux a résilié le contrat de délégation de service public conclu par département de la Gironde avec la société Les autobus du Libournais à compter du 17 août 2015 et a rejeté les conclusions indemnitaires du groupement.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 juin 2015, le département de la Gironde, représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 15 avril 2015 en tant qu'il prononce la résiliation du contrat de délégation de service public conclu par le département de la Gironde avec la société Les autobus du Libournais à compter du 17 août 2015, et de rejeter la demande d'annulation présentée devant le tribunal par la société Odicars ;

2°) de mettre à la charge de la société Odicars la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M.B...,

- les conclusions de M. Katz, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant le département de la Gironde, et de MeA..., représentant le groupement d'entreprises Odicars/Cars, Arts/Autocar, Casteran/Autocars et Gérardin/Cars Evasion.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis d'appel public à la concurrence du 29 juin 2011, le département de la Gironde a lancé une procédure de délégation de service public divisée en 485 lots pour assurer l'exploitation des lignes régulières spécialisées de transports scolaires pour la période 2012-2019. Le lot n° 5 a été attribué par contrat du 4 juin 2011 à la société Les Autobus du Libournais. Par un jugement du 15 avril 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a, à la demande du groupement d'entreprises Odicars/Cars, Arts/Autocar, Casteran/Autocars et Gérardin/Cars Evasion, résilié ce contrat avec effet différé au 17 août 2015 au motif que les dispositions de l'article 77 du code des marchés publics ont été méconnues. Le département de la Gironde relève appel de ce jugement en tant qu'il prononce cette résiliation.

Sur la régularité du jugement :

2. Si, selon les principes dégagés par la décision du Conseil d'Etat n° 358994 du 4 avril 2014, les tiers à un contrat ne peuvent invoquer, à l'appui d'une contestation de la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles, que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office, il résulte également de cette même décision que lesdits principes ne trouvent à s'appliquer, quelle que soit la qualité dont se prévaut le tiers, qu'aux litiges relatifs aux contrats signés à compter du 4 avril 2014, date de lecture de cette décision. En conséquence, ces principes ne sont pas applicables au présent litige et, par suite, le département de la Gironde ne peut valablement soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier dans la mesure où le tribunal a omis de statuer sur son moyen de défense tenant à l'absence de lésion des intérêts du groupement Odicars, lequel était inopérant. Les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à chacun des arguments des parties, n'ont pas davantage entaché leur jugement d'irrégularité en ne répondant pas explicitement à la remarque du département selon laquelle le pouvoir adjudicateur n'a pas cherché à favoriser un candidat.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la validité du contrat :

3. Aux termes de l'article 77 du code des marchés publics : " (...) II. - La durée des marchés à bons de commande ne peut dépasser quatre ans, sauf dans des cas exceptionnels dûment justifiés, notamment par leur objet ou par le fait que leur exécution nécessite des investissements amortissables sur une durée supérieure à quatre ans. / L'émission des bons de commande ne peut intervenir que pendant la durée de validité du marché. (...) " ;

4. Il résulte de l'instruction, et notamment du paragraphe 3 de la section II de l'avis d'appel d'offre et de l'article 12 du cahier des clauses administratives particulières, que le marché en cause est un marché à bons de commande conclu pour une durée de quatre-vingt-quatre mois à compter de la rentrée scolaire de septembre 2012, excédant par conséquent la durée maximale de quatre ans prévues par les dispositions précitées de l'article 77 du code des marchés publics. Le département de la Gironde fait valoir que cette durée s'explique par la durée d'amortissement des autocars, dans la mesure où les exigences qualitatives en matière de sécurité et de normes environnementales figurant dans le dossier de consultation imposent aux entreprises soumissionnaires d'envisager des investissements en cours d'exécution du contrat, notamment le renouvellement des véhicules. Il résulte toutefois des mentions du cahier des clauses techniques particulières que la limite d'âge imposée aux véhicules des candidats a été fixée à 15 ans. Ainsi les véhicules, dont l'ancienneté pouvait atteindre 15 ans, étaient déjà partiellement amortis à la date du début d'exécution du marché et, s'agissant des véhicules plus récents, pouvaient continuer à être amortis, après l'expiration du marché, dans le cadre d'une activité de prestation de services ultérieure, ou faire l'objet d'une revente venant compenser l'impossibilité d'amortir totalement les véhicules dans le cadre de la durée de contrat prévue. Par suite, la durée d'amortissement des autocars ne caractérise pas un cas exceptionnel, au sens des dispositions précitées de l'article 77 du code des marchés publics, justifiant qu'il soit dérogé à la durée de principe de 4 ans prévue pour les marchés à bons de commande. En prévoyant une durée de sept ans pour le marché en cause, le département de la Gironde, ainsi que l'a estimé le tribunal, a donc méconnu ces dispositions.

En ce qui concerne les conséquences du vice entachant la validité du contrat :

5. Lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, il appartient au juge d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci.

6. Le vice entachant en l'espèce la validité du contrat, contrairement à ce que soutient le département de la Gironde, a été de nature à influencer de manière déterminante la comparaison des offres dès lors qu'il ressort du tableau d'évaluation des offres que l'âge des véhicules des entreprises soumissionnaires et son incidence sur leur état général et leur conformité aux règles d'hygiène et de sécurité constituait un sous-critère essentiel du critère technique, lequel comptait pour moitié dans l'évaluation des offres. Dans ces conditions, et eu égard à ce qui a été dit au point 5, l'illicéité du contrat litigieux ne permet pas la poursuite de son exécution et n'est donc pas régularisable. Ainsi, quand bien même le pouvoir adjudicateur n'a pas cherché à favoriser un candidat, et dès lors que le tribunal, compte tenu des considérations d'intérêt général tirées de la nécessité d'assurer la continuité du service public de transport scolaire durant le délai nécessaire au département pour passer un nouveau marché, a différé la résiliation du contrat au 17 août 2015, les premiers juges n'ont pas inexactement apprécié l'importance du vice considéré et les conséquences à en tirer.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le département de la Gironde n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé, à la date du 17 août 2015, la résiliation du marché conclu le 4 juin 2011 avec la société Les Autobus du Libournais.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du groupement Odicars et autres, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que sollicite le département de la Gironde au titre des frais exposés et par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de la Gironde la somme de 1 500 euros à verser au groupement d'entreprises Odicars et autres en application des mêmes dispositions.

DECIDE

Article 1er : La requête du département de la Gironde est rejetée.

Article 2 : Le département de la Gironde versera au groupement d'entreprises Odicars et autres la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 15BX01935


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 15BX01935
Date de la décision : 26/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PEANO
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. KATZ
Avocat(s) : SCP AVOCAGIR

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-04-26;15bx01935 ?
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