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10/05/2016 | FRANCE | N°14BX00570

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 10 mai 2016, 14BX00570


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...B...et le syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler le permis de construire délivré le 3 mai 2012 par le maire de Saint-Jean-de-Luz à M. et Mme C...pour l'aménagement d'une terrasse en toiture à la Résidence du Golf.

Par un jugement n° 1201732 du 17 décembre 2013, le tribunal administratif de Pau a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires en réplique, enregi

strés respectivement les 20 février 2014 et 12 mars 2015, M. A... C..., représenté par Me D..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...B...et le syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler le permis de construire délivré le 3 mai 2012 par le maire de Saint-Jean-de-Luz à M. et Mme C...pour l'aménagement d'une terrasse en toiture à la Résidence du Golf.

Par un jugement n° 1201732 du 17 décembre 2013, le tribunal administratif de Pau a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés respectivement les 20 février 2014 et 12 mars 2015, M. A... C..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 17 décembre 2013 ;

2°) de condamner solidairement le syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf et Mme F...B...à lui verser les sommes de 642 096 euros et de 10 000 euros au titre des préjudices matériel et moral ayant résulté de l'action qu'ils ont introduite à l'encontre du permis de construire délivré le 3 mai 2012 ;

3°) de mettre à la charge de Mme F...B...et du syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf, pris ensemble, la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code du patrimoine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de MmeE...,

- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,

- et les observations de MeG..., représentant Mme B...et le Syndicat des copropriétaires de la résidence du Golf.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté en date du 3 mai 2012, le maire de Saint Jean de Luz a accordé à M. et Mme C...un permis de construire une extension par surélévation, d'une surface hors oeuvre nette de 60 m², au dernier niveau de l'immeuble dit " Résidence du Golf ", situé au 72, boulevard Thiers. Par un jugement du 17 décembre 2013, le tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté à la demande de Mme F...B...et du syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf. Par une requête enregistrée le 20 février 2014, M. C... relève régulièrement appel de ce jugement.

Sur la légalité du permis de construire en date du 3 mai 2012 :

2. Aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ".

3. Pour annuler la décision du maire de Saint Jean de Luz en date du 3 mai 2012, le tribunal administratif de Pau s'est fondé sur trois moyens tirés, le premier de l'insuffisance du projet architectural, le deuxième de ce que le projet méconnaît les règles de hauteur fixées à l'article 3.C B.2 du règlement de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP) de Saint Jean de Luz et, le troisième, de ce que l'avis de l'architecte des Bâtiments de France du 26 avril 2012 et, par voie de conséquence, le permis de construire en litige, sont entachés d'une contradiction interne justifiant l'annulation de ce dernier.

4. Pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation ainsi retenus et d'apprécier si l'un d'entre eux au moins justifie la solution d'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance. Dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens. Il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : (...) / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; (...) ". L'article R. 431-10 du même code dispose par ailleurs que : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, (...) dans le paysage lointain. (...) ".

6. Le dossier de permis de construire comprend, en PC 5, quatre plans dont les deux premiers représentent la façade sud-ouest de l'immeuble avant et après la réalisation de la surélévation projetée et les deux autres la façade nord-est du même immeuble avant et après ladite réalisation. Il comprend également en PC 4 une notice explicative qui, bien que succincte, est en l'espèce suffisante compte tenu des caractéristiques du projet. Une photographie prise à l'angle du boulevard Thiers et de l'avenue Pellot, jointe en PC 1, permet par ailleurs d'apprécier l'environnement proche du projet. Enfin, deux photographies de la façade sud-ouest, figurant en PC 6 et PC 8, dont les angles de prise de vue sont représentés sur un plan joint, ainsi que deux documents graphiques, illustrés en PC 6 bis et PC 7, représentent le toit de l'immeuble avant et après réalisation du projet, selon des angles de prise de vue également reportés sur le plan joint. Ces photographies et documents graphiques permettent, avec les documents précédemment énumérés, d'apprécier le projet, de dimensions modestes, ainsi que son impact visuel et son insertion dans l'environnement. M. C... est par suite fondé à soutenir que le dossier de permis de construire était suffisant pour permettre au service instructeur d'apprécier son projet au regard des dispositions précitées du code de l'urbanisme, lesquelles n'ont, dès lors, pas été méconnues.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 642-1 du code du patrimoine : " Une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine peut être créée à l'initiative de la ou des communes (...) sur un ou des territoires présentant un intérêt culturel, architectural, urbain, (...). Elle a pour objet de promouvoir la mise en valeur du patrimoine bâti et des espaces dans le respect du développement durable. Elle est fondée sur un diagnostic architectural, patrimonial et environnemental, (...), afin de garantir la qualité architecturale des constructions existantes et à venir ainsi que l'aménagement des espaces. L'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine a le caractère de servitude d'utilité publique. ".

8. Il ressort des pièces du dossier que la résidence du Golfe est située dans le secteur 3C de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP) de Saint Jean de Luz approuvée le 25 mars 2011. L'article 3.C B.2 du règlement de l'AVAP relatif à la hauteur du bâti, dans sa rédaction alors applicable, prévoyait que : " La hauteur des constructions existantes sera conservée. Toutefois, dans le cas d'un immeuble situé entre deux immeubles plus élevés, il sera possible de le surélever. (...) ".

9. Le projet litigieux consiste à créer, au centre de la toiture terrasse qui surplombe la partie centrale de la résidence du Golf et qui est bordée de deux petites " tours ", une extension d'une superficie de 60 m² par une surélévation couverte d'une toiture en zinc à quatre pans s'étendant d'une " tour " à l'autre et placée à environ 4 mètres de chacune des balustrades de pierre situées en bordure de la toiture terrasse. Ce projet se traduit ainsi par une modification de la hauteur du bâtiment dans sa partie centrale et ne peut s'analyser comme une surélévation d'un immeuble situé entre deux immeubles plus élevés au sens des dispositions précitées de l'article 3.C B.2 du règlement de l'AVAP de Saint Jean de Luz. Il méconnaît ainsi l'objectif de conservation de la hauteur des bâtiments existants fixé par cet article, quand bien même la surélévation projetée ne porte que sur une seule partie du bâtiment et non sur la totalité de celui-ci. Dans ces conditions, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, le permis de construire en litige méconnaît les dispositions du règlement de l'AVAP de Saint Jean de Luz relatives à la hauteur des bâtiments.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 642-6 du code du patrimoine : " Tous travaux, (...) ayant pour objet ou pour effet de transformer ou de modifier l'aspect d'un immeuble, bâti ou non, compris dans le périmètre d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (...) sont soumis à une autorisation préalable délivrée par l'autorité compétente (...). Cette autorisation peut être assortie de prescriptions particulières destinées à rendre le projet conforme aux prescriptions du règlement de l'aire. (...) ".

11. Par un avis en date du 26 avril 2012, l'architecte des bâtiments de France a considéré que " le projet, en l'état, est de nature à porter atteinte à la conservation de la zone de protection mais qu'il peut y être remédié ". Dans ce cadre, il a assorti sont avis favorable du respect de deux prescriptions : " la menuiserie en aluminium sera de teinte foncée et de finition mat. Exclure toutes les superstructures en toiture ". Dans la mesure où l'extension autorisée par l'arrêté en litige comporte une couverture dépourvue de tout élément de superstructure, le tribunal administratif en a conclu que la prescription figurant à l'article 2 du permis de construire litigieux, reprenant la prescription de l'architecte des bâtiments de France consistant à exclure toute superstructure en toiture, devait être interprétée comme excluant la toiture même de l'extension autorisée. Il a jugé que le maire avait, ce faisant, porté une atteinte significative à l'identité et à la cohérence du projet et que son arrêté se trouvait par là-même entaché d'une contradiction interne justifiant son annulation. Néanmoins, la prescription émise par l'architecte des bâtiments de France à l'appui de son avis favorable, si elle manque effectivement de clarté dès lors que le projet soumis à son appréciation ne comportait aucune superstructure en toiture, ne saurait toutefois être interprétée comme imposant la suppression de la toiture prévue au projet. Dans ces conditions, la contradiction interne relevée par le tribunal administratif n'est pas établie et le motif d'annulation ainsi retenu ne peut être regardé comme fondé en droit.

12. Dans la mesure où, ainsi qu'il a été dit au point 9, le permis de construire délivré le 3 mai 2012 méconnaît les dispositions du règlement de l'AVAP de Saint Jean de Luz relatives à la hauteur des bâtiments, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau en a prononcé l'annulation.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :

13. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel (...) ".

14. Par mémoire distinct enregistré le 12 mars 2015, M. C... a demandé la condamnation solidaire de Mme F...B...et du syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf à lui verser une somme totale de 652 096 euros au titre des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme. Toutefois, la circonstance que, par un arrêt du 27 mars 2006, devenu définitif, la cour d'appel de Pau a jugé que M. C... avait le droit de réaliser le projet en litige et que la résolution de l'assemblée générale des copropriétaires du 25 novembre 2000 ayant refusé d'autoriser ce projet était de nul effet, ne permet pas d'établir que l'action portée par Mme F...B...et le syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf devant le juge administratif, tendant à l'annulation de l'arrêté de permis de construire en date du 3 mai 2012, excèderait la défense de leurs intérêts légitime, une telle action ayant pour objet d'apprécier la légalité dudit permis de construire au regard de la réglementation d'urbanisme applicable à la date à laquelle il a été accordé et étant dès lors sans rapport avec le litige porté devant le juge judicaire concernant une résolution des copropriétaires prise en application des dispositions de l'article 25b de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965. Par suite, les conclusions à fin de dommages et intérêts présentées par M. C... doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation. ".

16. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme F...B...et du syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf, qui ne sont pas, dans la présente instance la partie perdante, le versement des sommes que M. C... et la commune de Saint Jean de Luz demandent au titre des frais qu'ils ont exposés, non compris dans les dépens. Par ailleurs, et dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par Mme F...B...et le syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf au titre de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme F...B...et le syndicat des copropriétaires de la Résidence du Golf d'une part, et la commune de Saint Jean de Luz d'autre part, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

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N° 14BX00570


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00570
Date de la décision : 10/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CHERRIER
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : SELARL TORTIGUE PETIT SORNIQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2016-05-10;14bx00570 ?
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